«Mon histoire cardio-vasculaire commence en 1970 avec la découverte d'une hypercholestérolémie à la faveur d'une analyse, explique Alain Decaux. Comme je suis de nature extrêmement disciplinée, j'ai suivi scrupuleusement un régime et les choses sont rentrées dans l'ordre. Neuf ans plus tard, lors d'un séjour en montagne, une hypertension artérielle à 170/100 mmHg a fait mettre en route un traitement antihypertenseur. De retour à Paris, j'ai consulté le Pr Di Matteo, cardiologue, qui a vérifié la normalité de mon ECG et a changé ma monothérapie antihypertensive. Puis le temps passe et mon emploi du temps est rempli au-delà de tout ce qui est possible. En 1985, et alors que j'avais de moi-même arrêté mon traitement antihypertenseur, reconnaît l'académicien, une consultation médicale systématique avant un départ en tournée retrouve une nouvelle fois la présence de deux facteurs de risque, à savoir une hypertension et un excès de cholestérol. Je suis alors à nouveau traité et un suivi cardiologique régulier est mis en place. »
« En 1986, lors d'un spectacle dans le cadre des Rencontres du Palais-Royal, j'ai ressenti une immense fatigue tout à fait insolite pour un homme infatigable, précise l'historien. Je suis donc sorti respirer dans le jardin en pensant que le trouble n'était que passager mais cela n'a pas été suivi de résultat. De retour à mon domicile, j'ai ressenti le fameux malaise avec une douleur dans la poitrine et l'épaule gauche. Cela m'a permis de rencontrer pour la première fois un voisin médecin, le Dr Thiroloix qui, après avoir pratiqué à mon chevet un ECG, m'a gentiment demandé de préparer une valise... pour l'hôpital.
« Une ischémie myocardique a effectivement été confirmée aux urgences de l'hôpital Boucicaut où j'avais été transporté. Je me souviens du désarroi du jeune cardiologue de garde devant mes réponses négatives aux questions usuelles sur les facteurs de risque. Je ne fumais pas (j'avais fumé six mois à 18 ans), je prenais soin de mon alimentation et je pratiquais la course à pied une fois par semaine.A la demande du Pr Gay, le Pr Iradj Gandjbakhch a pratiqué mon premier pontage bitronculaire, poursuit Alain Decaux. J'ai souvenir d'un réveil et de suites opératoires très pénibles du fait d'un état de fatigue extrême. Après un séjour en rééducation à Maison-Lafitte, j'ai progressivement repris l'ensemble de mes activités. Il m'a tout de même fallu six mois pour m'en remettre mais les téléspectateurs n'en ont rien su, car je n'ai manqué qu'une seule émission du Dossier d'Alain Decaux sur Antenne 2 et la chaîne a eu l'élégance de programmer une rediffusion à la place de celle qui manquait. »
Autorisation médicale à exercer des fonctions ministérielles
« En 1988, Michel Rocard, alors Premier ministre, m'a proposé le ministère de la Francophonie. Avant de lui donner ma réponse, j'ai demandé l'avis du Dr Thiroloix, devenu mon médecin et mon ami qui se trouvait alors en congrès à l'étranger, sans omettre de lui préciser que ce poste allait me faire beaucoup voyager, raconte l'académicien . Ce dernier a donné son aval et j'ai été ministre de la Francophonie pendant trois ans sans le moindre problème. En 1992 cependant, une douleur thoracique gauche et un essoufflement m'ont amené à avoir une nouvelle coronarographie, dont la sanction a été un renforcement de mon traitement médicamenteux sans geste chirurgical et une surveillance par scintigraphie myocardique annuelle au thallium.Les années passent ainsi jusqu'en 1997, se rappelle le ministre, date à laquelle la majoration de mon essoufflement fait pratiquer une épreuve d'effort. Une crise d'angor catastrophique sur le pédalier me fait transporter directement sur la table de coronarographie. Les choses sont nettement plus complexes que la première fois : le Pr Gandjbakhch donne à ma femme - pas à moi ! - 50 % de chances de réussite au pontage. La décision conduit inéluctablement au deuxième geste chirurgical pratiqué par le Pr Gandjbakhch. Je suis alors émerveillé par la facilité des suites opératoires, sans comparaison avec ce que j'avais vécu onze ans plus tôt. Quelques heures après mon réveil, j'ai même accepté de dédicacer l'un de mes livres à un infirmier ! »
« Mais l'histoire ne s'arrête pas là, poursuit Alain Decaux. La douleur thoracique réapparaît lors d'un séjour dans le Midi. Le renforcement du traitement médicamenteux n'est alors qu'en partie efficace et je présente des symptômes d'angor pendant des mois. A la rentrée 1998, une première tentative de pose de stent échoue mais, trois mois plus tard, le Pr Laffont de l'hôpital Boucicaut réussit le geste et met fin à mes problèmes.
« Aujourd'hui, je n'ai conservé que le quart des activités précédant mon deuxième pontage. Comme me l'a expliqué le Pr Michel Desnos, devenu mon cardiologue, "il faut supprimer les stress d'obligation". J'ai donc arrêté tout l'audiovisuel qui me faisait régulièrement passer des examens devant des millions d'auditeurs et de téléspectateurs, confie l'historien . Je me consacre à l'écriture et à mes nouvelles responsabilités de président du Collège des conservateurs du domaine de Chantilly. »
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