EN DEPIT DE progrès dans le diagnostic et le traitement des anévrismes de l'aorte abdominale, on estime que près de 6 000 hommes - soit 50 % des sujets atteints de dissection - en décèdent chaque année en Angleterre et au Pays de Galles. Globalement, les anévrismes de l'aorte sont donc à l'origine de 2 % des décès dans ce pays. Pourtant, ils peuvent être facilement diagnostiqués, avant même de devenir symptomatiques, par un simple examen échographique de l'abdomen.
Afin d'évaluer l'intérêt de campagnes de dépistage, des médecins de la région du Gloucestershire ont mis en place, dès 1990, un programme ciblé à destination des hommes de 65 ans. Une invitation à se rendre dans un centre d'examen leur est ainsi adressée au cours de leur 66e année. Et chaque année, une échographie est donc proposée à 3 000 hommes de la région.
Au-delà de 40 mm.
L'examen est pratiqué par des techniciens spécifiquement formés et chacun des centres est placé sous la responsabilité d'une infirmière coordinatrice. Lorsque le diamètre mesuré de l'aorte est inférieur à 26 mm, aucun suivi n'est pratiqué. Si ce chiffre est compris entre 26 et 39 mm, un suivi échographique annuel est proposé. Lorsqu'il dépasse 40 mm, le patient est adressé à un chirurgien vasculaire. Il peut décider soit de l'opérer, soit de placer une prothèse endovasculaire, soit, enfin, de se contenter d'une suivi échographique rapproché. Des études pilotes mises en place en prenant en compte ces critères échographiques ont montré qu'il est possible d'obtenir une baisse de 42 % à 4 ans de la mortalité liée à cette pathologie.
En début d'étude, le taux d'intervention chirurgicale pratiqué en urgence sur les anévrismes était de 45 %. Ce chiffre est passé à 20 % en 2003. « La baisse a été progressive car d'une part les campagnes de dépistage ne se sont adressées qu'aux hommes de 65 ans et elles ont exclu les plus âgés et que, d'autre part, l'adhésion à ce type de programme se produit de façon très progressive dans la population », analysent le Dr J. Earnshaw (Gloucester).
Les interventions sont passées de 15 à 70 %.
Après treize années de suivi de la population, la mortalité dans les suites d'une intervention urgente ou préventive sur un anévrisme est passée de 9 à 3 %. Le nombre des interventions pratiquées chez des patients asymptomatiques est, pour sa part, passé de 15 à 70 %.
Forts de ces résultats, les chirurgiens proposent la mise en place d'un programme national de dépistage. Ils soulignent néanmoins que cette idée devrait connaître des détracteurs. Les autorités sanitaires, d'une part, qui mettront en avant le coût d'un tel dépistage et qui pourraient préférer un dépistage ciblé chez les porteurs de facteurs de risque ; les partisans d'un dépistage plus précoce, dès l'âge de 60 ans, d'autre part, en raison du coût gagné en années de vie dans cette population plus jeune. Néanmoins, le Dr Earnshaw explique que « si l'échographie de dépistage est effectuée précocement, un second examen devra être pratiqué de cinq à dix ans après le premier. »
Les investigateurs concluent en soulignant les limites de l'étude. Ils estiment qu'en 2003 15 % des hommes environ ne répondaient pas à l'appel au dépistage et que dans cette population l'incidence des facteurs de risques (hypertension, hypercholestérolémie, tabagisme, obésité...) était plus importante que chez les sujets qui ont participé au dépistage. En outre, ils expliquent que près de 10 % des ruptures d'anévrisme surviennent chez des moins de 65 ans qui sont, du fait de leur « jeune » âge, exclus de l'étude.
« BMJ » , vol. 328, pp. 1122-1124, 8 mai 2004.
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