LA FIBROSE hépatique est la conséquence de toute maladie chronique du foie, dont la prévalence en France est élevée, mais dont le diagnostic est en règle tardif voire méconnu. Or, le diagnostic et l’évaluation de la fibrose hépatique sont des éléments essentiels de la décision thérapeutique et des critères de surveillance du patient. Ce diagnostic est classiquement fondé sur la ponction-biopsie hépatique. Le stade de fibrose est alors défini par l’index Métavir. Cet examen invasif est toutefois grevé d’une mortalité et d’une morbidité non négligeables, et des erreurs d’interprétation de l’évaluation de la fibrose sont possibles en raison de sa répartition irrégulière. Mais le diagnostic non invasif de la fibrose est désormais possible, grâce à des marqueurs sanguins ou par élastométrie impulsionnelle. Les marqueurs sanguins de la fibrose hépatique peuvent être directs ou indirects. Les marqueurs directs, qui sont des molécules impliquées dans le processus fibrogène, ont été très étudiés. Le dosage de l’acide hyaluronique, ou hyaluronate, est le plus performant. Il est en effet peu influencé par d’autres variables histopathologiques comme l’activité ou la nécrose. Les marqueurs indirects sont le reflet du processus de la fibrose dont on ne peut pas affirmer qu’ils sont impliqués dans le processus lui-même. Le taux de prothrombine est le marqueur indirect sensible le plus ancien.
L’élastométrie impulsionnelle ultrasonore, ou Fibroscan, a pour principe d’apprécier l’élasticité tissulaire pour en déduire l’importance de la fibrose. Une onde mécanique indolore est générée en regard du foie. La progression de la déformation mécanique ainsi induite est suivie par un transducteur échographique afin d’apprécier sa vitesse de propagation. Cette vitesse est d’autant plus élevée que le milieu dans lequel la déformation se propage est dur. Le résultat de cet examen très reproductible est la médiane de 10 mesures. Ses limites sont l’obésité et la présence d’une ascite. Des scores de fibrose ont été développés afin d’améliorer l’estimation de la fibrose hépatique en raison de l’insuffisance de performance diagnostique des paramètres considérés isolément. Ils sont calculés à partir d’algorithmes utilisant plusieurs paramètres directs ou indirects. C’est par exemple le cas du test sanguin FibroMètre (SNIFF pour Score Non Invasif de Fibrose du Foie) (1).
Une valeur prédictive positive de 70 %.
Afin d’évaluer la performance diagnostique des marqueurs sanguins de la fibrose, deux populations de patients à risque d’hépatopathie fibrosante ont été inclus dans une étude entre 2000 et 2005. La première population, composée de 19 554 sujets dont 10 973 ont été évalués, était celle d’un centre d’examens périodiques de santé, la seconde, composée de 34 malades, celle de patients chez lesquels 8 médecins généralistes ont pratiqué un dépistage individuel. Un dosage des marqueurs sanguins de la fibrose a été pratiqué chez les sujets ayant un facteur de risque de fibrose hépatique et complété, à partir d’avril 2004, par un FibroMètre et un Fibroscan. Lorsque les patients avaient un taux de prothrombine inférieur ou égal à 85 % et un taux d’acide hyaluronique sérique supérieur ou égal à 100 microgrammes par litre, ce qui suggère une fibrose avec index Métavir supérieur ou égal à F3, une ponction-biopsie hépatique a été proposée.
Dans la population générale, 1 440 sujets, soit 13,1 % de l’effectif, avaient un facteur de risque de fibrose. Ce risque était essentiellement lié à une intoxication par l’alcool, appréciée par le questionnaire CAGE (Cutting down, Annoyance by criticism, Guilty feeling, Eye-openers) ou par l’existence d’une anomalie biologique. Un dosage des marqueurs sanguins de la fibrose a été pratiqué chez 469 sujets. Un marqueur a été positif chez 58 d’entre eux, soit 12,4 %. Ces sujets ont été réévalués à 3 mois et une indication de biopsie hépatique a été portée chez 10 malades. Les deux marqueurs étaient positifs dans 10 cas, soit 2,1 %. Ainsi, au total, une ponction-biopsie hépatique était indiquée chez 25 sujets, et a été réalisée chez 10 d’entre eux. Sept d’entre eux avaient un index Métavir supérieur ou égal à F3.
Parmi les 34 malades présélectionnés en médecine générale, 10 avaient au moins un marqueur sanguin de la fibrose positif, les deux marqueurs étant positifs chez 4 sujets. Une indication de ponction-biopsie hépatique a été posée chez 8 malades, 7 ayant été réalisées et 5 ayant un index Métavir supérieur ou égal à F3.
Dans ces deux populations ayant des facteurs de risque de fibrose hépatique, les marqueurs sanguins de la fibrose ont été positifs chez 23 % des patients présélectionnés par les médecins généralistes et chez 5 % des sujets de la population générale. La prévalence de fibrose avec index Métavir supérieur ou égal à F3 a été respectivement de 17 et 4 %. La valeur prédictive positive des marqueurs sanguins de la fibrose pour la fibrose avec index Métavir supérieur ou égal à F3 a été de 71 et 70 % respectivement.
Ainsi, la valeur prédictive positive de la combinaison de deux marqueurs sanguins pour la fibrose sévère est de l’ordre de 70 %. Les résultats du Fibroscan et du FibroMètre sont en attente.
D’après un entretien avec le Pr Paul Calès, CHU, Angers.
(1) Calès P, et coll. A novel panel of blood markers to assess the degree of liver fibrosis. Hepatology 2005 ; 42 : 1373-81.
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