DE NOTRE CORRESPONDANTE
LES MITOCHONDRIES et les peroxysomes sont des structures intracellulaires dynamiques : elles se déplacent et subissent continuellement des événements de fusions et de fissions. Ces processus de fusion et fission sont étudiés depuis peu et plusieurs observations récentes ont indiqué leur importance.
La fusion des mitochondries requiert trois protéines GTPases de la famille des dynamines (MFN1, MFN2, et OPA1) ; tandis que leur fission et celle des peroxysomes requièrent une autre dynamine GTPase nommée DLP1 (Dynamin-Like Protein 1).
Des défauts de la fusion mitochondriale ont été liés à des affections neurodégénératives. La maladie de Charcot-Marie-Tooth de type 2A est ainsi causée par des mutations de MFN2 ; l'atrophie optique dominante par des mutations de l'OPA1. Ces pathologies sont localisées et tardives.
Le premier exemple humain de défaut de la fission des mitochondries et des peroxysomes est décrit par Waterham (centre médical académique d'Amsterdam) et coll. Les conséquences en sont bien plus sévères.
Le cas est celui d'une petite fille née à terme, de parents anglo-saxons, non consanguins et en bonne santé. Pendant la grossesse, la mère remarque une baisse des mouvements foetaux. Le poids de naissance est de 2,8 kg et l'enfant, apparemment normal, sort de l'hôpital au quatrième jour.
Deux jours après, elle est réadmise, ne s'alimentant guère et restant silencieuse. L'examen révèle de profondes anomalies. Notamment, une microcéphalie et une neuropathie sévère, avec hypotonie, peu de mouvements spontanés, absence de réflexes et atrophie optique.
Une dysmyélinisation.
L'IRM cérébrale montre des anomalies des lobes frontaux, associées à une dysmyélinisation. A la biologie existent des anomalies métaboliques : lactacidémie élevée, concentration plasmatique accrue des acides gras à chaîne très longue. Un taux élevé des lactates est également trouvé dans le LCR.
Pendant le séjour à l'hôpital, aucune croissance ou prise de poids ne sont observées, malgré l'alimentation parentérale. Le décès survient à l'âge de 37 jours.
Les biopsies musculaires ne montrent pas d'anomalie histologique des mitochondries et leur fonction paraît normale invitro. Mais les taux élevés de lactate dans le sang et le LCR indiquent une fonction mitochondriale compromise invivo.
L'examen des fibroblastes de la peau met en évidence une forme excessivement allongée et tubulaire des peroxysomes et des mitochondries. De plus, ces dernières, au lieu d'être dispersées, sont concentrées autour du noyau.
Ces anomalies évoquent un trouble de la fission des mitochondries et des peroxysomes, obtenu précédemment invitro en surexprimant dans les cellules une mutation du gène DLP1.
Une mutation hétérozygote.
Les chercheurs ont donc analysé le gène DLP1 chez la patiente. Ils ont effectivement découvert une mutation hétérozygote. Puisque cette mutation n'a pas été retrouvée dans les cellules sanguines des parents, on peut penser qu'elle est apparue spontanément chez l'enfant, ou qu'elle est uniquement présente dans les cellules germinales d'un parent.
«L'association des symptômes cliniques, de taux élevés de lactate dans le sang et dans le LCR , de taux élevés d'acides gras à chaîne très longue dans le plasma, pourraient identifier d'autres patients porteurs d'une anomalie de la fission des mitochondries et des peroxysomes», concluent les chercheurs.
Si les neurones semblent particulièrement sensibles aux anomalies de la dynamique mitochondriale, c'est probablement parce que la fonction mitochondriale joue un rôle crucial dans la transmission nerveuse.
Les peroxysomes, qui contiennent des enzymes oxydatives, ont de multiples fonctions : détoxication, dégradation des acides gras et synthèse des plasmalogènes, les principaux phospholipides de la myéline. On comprend donc qu'un défaut de leur dynamique puisse exacerber la neuropathie liée au défaut de la dynamique des mitochondries.
Waterham et coll. « New England Journal of Medicine », 26 avril 2007, p. 1736.
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