« ET LES AUTRES SOIRS, que faisiez-vous ? », est une question que l'on pose volontiers à Elisabeth Schwarzkopf, installée depuis la mort de son mari, pigmalion et producteur Walter Legge en mars 1979, dans une retraite qui n'exclut nullement une activité de pédagogue.
Le personnage public est devenu une personne privée et a même quitté Zurich pour se retirer à quatre-vingt-neuf ans dans les montagnes autrichiennes, mais, avant cela, a tenu à laisser son témoignage. Elle y développe dans le plus grand détail la réponse qui est, en substance, qu'il n'y avait pas d'autres soirs. Le temps était entièrement consacré au travail, à l'étude, à la préparation, à la répétition, au perfectionnement de ce qui était sa vie, la scène et les studios d'enregistrement. Vie austère, certes, mais vie d'artiste exigeante encore plus avec elle-même qu'avec les autres, vie occupée à donner le meilleur d'elle-même tant vocalement que par l'image et la composition du personnage.
Ni confidence ni état d'âme.
Que l'on n'y cherche pas la confidence, l'état d'âme, rien ne déborde le cadre strictement professionnel. Quelques considérations sur la profession et surtout son évolution au cours de ses années de carrière, quelques coups de griffe aussi, notamment des rancœurs au sujet d'Herbert von Karajan qui, après avoir lancé sa carrière scénique, tenta de la bloquer quand il devint l'éminent et omnipotent chef de l'Europe musicale.
Sinon, le récit bien huilé d'une carrière exemplaire avec force détails et toujours en filigrane, ce credo : un acharnement vers la perfection qui a été son image de marque tant dans les rôles d'opéra qu'elle a marqués de sa personnalité, Donna Elvira, Fiordiligi, la Comtesse, Alice Ford, la Maréchale, sa « carte de visite », pour ne citer que les plus forts, que dans le récital avec le Lied allemand, Hugo Wolf particulièrement pour la réhabilitation duquel elle fit tant sous l'impulsion de Walter Legge. Sur cette collaboration, on lira avec profit « la Voix de mon Maître », paru chez Belfond. Dans une postface, André Tubeuf explique comment s'est fait ce livre, biographie préparée oralement pendant quelques quinze longues années avant d'être dictée à celui, ami et confident, qui était le plus à même d'en faire une biographie autorisée à la première personne. Il y ajoute une impressionnante chronologie de sa carrière et un index qui en font d'emblée un ouvrage de référence musicologique.
Le son et l'image en plus.
Pour ceux qui voudront ajouter son et image à la lecture, EMI vient de rééditer le film réalisé en 1995 par André Tubeuf et Gérald Caillat « Elisabeth Schwarzkopf, a self-portait » dont les photos d'archives situent formidablement la carrière dans son époque, ainsi qu'un DVD consacré aux trois grands représentants de l'art du Lied allemand, elle-même entourée de Irmgard Seefried et Dietrich Fischer-Dieskau. On y trouve un enregistrement en noir et blanc du final du premier acte du « Chevalier à la Rose », de Richard Strauss, sous la direction de Charles Mackerras, à Londres en 1961. C'est le même document que l'on retrouve dans l'album qui lui est consacré dans la nouvelle collection « Legend », concept nouveau lancé par EMI Classics cet automne avec pour chaque artiste un DVD, plus un CD dans le même boîtier. Le CD, entièrement consacré aux Lieder de Richard Strauss, contient son meilleur enregistrement des « Quatre derniers Lieder », sous la direction de George Szell en 1969.
(1) Tallandier, 368 pages, 29 euros.
(2) EMI Classics : 1 DVD, 1 DVD « Classic archive » et 1 CD + 1 DVD « Legend ».
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