FABIENNE GODET a mené de front, pendant plusieurs années, son métier de psychologue et l’apprentissage du cinéma. Elle travaillait dans un hôpital à l’accompagnement des mourants. Parfois, les gens lui disaient : «Voilà, j’ai loupé ma vie, j’aurais dû faire ci, j’aurais voulu faire ça, j’ai pas réussi, j’ai pas pu ou j’ai pas osé, c’est trop tard...» «C’est quelque chose qui m’a toujours bouleversée, explique-t-elle. Je crois qu’on oublie vite que l’on n’a qu’une vie et qu’il ne faut pas s’en remettre au lendemain.»
C’est l’un des sujets de son premier long métrage. L’autre s’inspirant également de son expérience professionnelle. La directrice de la société qui l’employait a été remplacée par un « nettoyeur »; «il est arrivé en octobre, et en décembre il y avait déjà deux personnes licenciées, puis très rapidement, ça a été tout le personnel permanent qui a été écarté. Fautes lourdes, dépressions, licenciements abusifs... En mettant la pression, leur objectif était de nous virer à coût zéro.»
Des histoires comme celle-là, les salariés et leurs proches peuvent vous en raconter beaucoup. Fabienne Godet et son coscénariste Franck Vassal ont choisi de l’incarner à travers la prise de conscience – «le réveil», dit la réalisatrice –, d’un homme dont la vie va basculer. Elle a choisi aussi, et bien choisi, de faire jouer ce personnage dont on suit les hésitations et les tourments, par Olivier Gourmet, découvert grâce aux frères Dardenne et qui n’a pas souvent les premiers rôles qu’il mérite. Entouré de partenaires de choix, Marion Cotillard, Julie Depardieu, Dominique Blanc, il porte le film sur ses solides épaules.
Tout n’est pas convaincant dans la mise en scène et la direction d’acteurs, la ponctuation musicale et les noirs de certaines images sont un peu redondants. Mais la construction intelligente, la force de l’histoire et du personnage principal font vite oublier les quelques faiblesses de ce premier film. Et si aujourd’hui le sujet de la souffrance au travail n’est plus inédit dans le cinéma français, il est beaucoup plus stimulant que ceux qui font la plupart des succès actuels.
> RENÉE CARTON
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