A L'HEURE où les députés débattent d'une nouvelle taxation de l'industrie pharmaceutique et de l'industrie du tabac pour combler le déficit de la Sécurité sociale, ils devraient se souvenir que le coût de l'alcool et de ses conséquences atteint 20 milliards d'euros par an*, soit nettement plus que toutes les autres drogues licites et illicites réunies, y compris le tabac, rappelle un généraliste alsacien aux élus de sa région.
Installé près de Colmar, le Dr Claude Deroussent a écrit aux députés Yves Bur et Gilbert Meyer pour s'étonner que les producteurs d'alcool soient épargnés par les nouvelles taxations, alors même qu'ils se distinguent, en Alsace comme ailleurs, par « l'aisance de leur patrimoine ».
Pour lui, « la fumée ne doit pas cacher le coût des autres comportements », et ce d'autant plus que ce n'est pas le tabac qui provoque « les drames de la route, les meurtres et les incarcérations », souligne ce généraliste, par ailleurs médecin des prisons. Une taxation plus élevée de l'alcool permettrait de lancer un débat sur la boisson, poursuit-il, tout en rappelant que la jeunesse « ne peut comprendre l'interdiction du cannabis quand, dans le même temps, rien n'est fait contre l'alcoolisme ». L'alcool, souligne le Dr Deroussent, a, en 2000, coûté 1 966 francs à chaque Français, soit 1,42 % du PIB, 20 % de plus que le tabac et près de dix fois plus que les drogues illicites. « J'aimerais que tous les médecins, eux aussi, s'adressent à leurs députés pour leur rappeler ces quelques évidences : il est grand temps que la France sorte de sa culture de l'alcool et de son déficit sanitaire dans ce domaine. »
(1) Source : « Le coût social des drogues licites et illicites en France », Observatoire français des drogues et toxicomanies, 2000.
Polémique sur le Conseil de modération
Les députés socialistes ont tenté en vain, lors du débat sur le budget de la Sécu (Plfss 2006), de contrecarrer l'amendement au projet de loi d'orientation agricole qui a modifié la semaine dernière la composition du nouveau Conseil de modération et de prévention de l'alcoolisme (« le Quotidien » du 18 octobre). Cet amendement prévoit que, compte tenu de la composition de ce nouveau conseil, « toute campagne de prévention dans notre pays sera soumise à l'approbation de l'industrie et du commerce alcooliques », a dénoncé le député PS Jean-Marie Le Guen. C'est, aux yeux du député socialiste de Paris, « un retour en arrière caricatural et invraisemblable, du jamais vu depuis trente ans en matière de santé publique ! ».
Plusieurs députés PS, dont Claude Evin, avaient déposé un amendement au Plfss 2006 pour revenir sur cette mesure, estimant qu'elle avait un « lien avec le financement de la Sécurité sociale ». Mais leur amendement a été jugé irrecevable par la Commission des Finances de l'Assemblée et par Philippe Bas, ministre délégué à la Sécurité sociale, provoquant ainsi un rappel au règlement à l'initiative de Claude Evin et plusieurs interruptions de séance au Palais-Bourbon.
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