« Plutôt que de s'intéresser à la classique notion de sévérité qui n'est plus recommandée, on préfère désormais s'occuper du contrôle de l'asthme, c'est-à-dire des événements respiratoires qui ont pu se passer dans les trois ou quatre semaines précédant la consultation », remarque le Pr Alain Didier. Des questionnaires, comme « Asthma control test » (ACT) ou « Asthma control questionnary » (ACQ), permettant de mieux apprécier si l'asthme est correctement contrôlé ou pas, sont ainsi apparus. Ils peuvent être remplis par le patient avant la consultation : les questions portent sur la symptomatologie diurne, nocturne, l'impact sur l'activité physique ou quotidienne, le recours aux traitements de secours et, si oui, à quelle fréquence dans la semaine, etc. Ils sont, bien sûr, à compléter par des mesures de la fonction respiratoire.
Par analogie avec les traitements de la douleur qui vont crescendo, on parle aujourd'hui de paliers thérapeutiques pour l'asthme. Le premier palier correspond à la prise de bêta-mimétiques de courte durée d'action, sans traitement de fond. Les paliers 2 à 5 comportent des traitements de fond qui vont en augmentant progressivement, depuis la corticothérapie ou les antileucotriènes seuls jusqu'à la corticothérapie à forte dose associée aux bêta-mimétiques de longue durée d'action, voire aux corticoïdes per os et aux anti-IgE. A noter que le montélukast (antileucotriènes) a fait l'objet d'une extension d'AMM comme alternative aux corticoïdes inhalés à faibles doses chez les patients présentant un asthme persistant léger, sans antécédent récent de crises d'asthme sévères ayant justifié une corticothérapie orale, et dont l'incapacité à adhérer à un traitement par corticoïdes inhalés est démontrée. « Quand un patient n'est pas contrôlé, soit il n'a pas de traitement, et il suffit de lui appliquer le palier thérapeutique 2 ou 3, soit il a déjà un traitement, et il faut augmenter d'un niveau thérapeutique. En cas de changement de palier, il faut le faire au minimum durant plusieurs semaines et en moyenne pendant trois mois. En effet, il n'est pas question de changer de palier thérapeutique juste pour quinze jours », poursuit le Pr Didier. A l'inverse, quand un patient est parfaitement bien contrôlé depuis au moins trois mois, on peut diminuer d'un palier thérapeutique.
Des anti-IgE réservés aux cas les plus sévères.
L'omalizumab, un anticorps monoclonal anti-IgE, est le premier traitement issu des biotechnologies que l'on utilise en pneumologie : il a pour dessein de bloquer les IgE circulantes, afin qu'elles ne se fixent plus sur les cellules et, donc, n'entraînent plus leur activation lors de la rencontre allergène-anticorps. Réservé aux asthmes allergiques qui restent symptomatiques malgré un traitement de fond de palier 4 ou 5 (corticoïdes inhalés à fortes doses, avec, parfois, des corticoïdes per os en plus), ce traitement vient s'ajouter à ces derniers. Prescrit par le pneumologue sur un ordonnancier spécifique, il est administré par injections sous-cutanées, tous les quinze jours ou tous les mois, après calcul de la dose en fonction du poids et du taux d'IgE totales circulantes. L'évaluation du bénéfice doit se faire à seize semaines, afin de juger de la poursuite ou non du traitement. L'omalizumab a notamment été évalué versus placebo dans l'étude prospective française Innovate - étude multicentrique randomisée contrôlée en double insu - qui a inclus 419 patients ayant un asthme allergique persistant sévère et insuffisamment contrôlé malgré des traitements de palier 4. Ils ont reçu, en plus de leur traitement, pour moitié un placebo et pour l'autre de l'omalizumab en injections sous-cutanées toutes les deux à quatre semaines, à une posologie d'au moins 0,016 mg/kg par UI/ml d'IgE, pendant 28 semaines. Le suivi a porté sur 16 semaines supplémentaires. L'étude a montré une très nette réduction des exacerbations, une réduction du recours aux traitements d'urgence et une amélioration de la qualité de vie. De plus, l'incidence des effets secondaires était comparable dans les deux groupes sur la période étudiée.
Il semble que la présence de facteurs de sévérité augmente les chances de répondre positivement à ce traitement. Les critères de réponse biologique permettant de faire précocement la différence entre patients répondeurs et non répondeurs restent à définir. De même, la question de la durée du traitement n'a pas encore été résolue : pour l'instant, il est mis en place pour une durée d'au moins 16 semaines, puis un bilan est réalisé. S'il est positif, le traitement est poursuivi, mais seules les études en cours permettront de dire pour combien de temps. Hormis des douleurs au point d'injection et quelques urticaires, la tolérance du traitement est bonne, du moins à court terme. Le recul est encore insuffisant pour apprécier la tolérance du traitement à très long terme.
* CHU de Rangueil, Toulouse.
Quels critères de réponse?
Aujourd'hui, il n'est pas possible de prévoir d'avance quels seront les patients répondeurs aux anti-IgE et quels seront les patients non répondeurs. Pour tenter de répondre à cette question, 50 patients ont été enrôlés dans une étude multicentrique randomisée : les résultats devraient être connus d'ici à décembre 2007. Il est possible que certains patients ne répondent pas en raison du mode de calcul de la dose d'IgE. Il repose sur le poids du patient (qui est à peu près stable) et sur le taux d'IgE totales, qui, lui, varie d'un dosage à l'autre. Beaucoup de pneumologues estiment ainsi qu'un certain nombre de patients non répondeurs ont probablement reçu une dose inférieure à leurs besoins.
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