Recommandations formalisées d'experts

Le contrôle de la glycémie en réanimation

Publié le 08/10/2008
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APRÈS DES NOTIONS de physiologie et de physiopathologie, les recommandations ont été cotées au moyen du système GRADE (Grades of Recommandation Assessment, Development and Evaluation) et sont fondées sur l'accord, le désaccord ou l'indécision des experts. Les 74 recommandations sont consensuelles, puisqu'un seul désaccord a été noté.

Chez les malades en réanimation et en période périopératoire, l'hyperglycémie résulte essentiellement d'une élévation initiale des hormones de contre-régulation, ainsi que d'une insulinorésistance persistante favorisée par l'inflammation. L'utilisation du glucose est régulée grâce à des transporteurs spécifiques. Le transporteur facilitateur GLUT-4 est stimulé par l'insuline. Toute agression induit une hyperglycémie (diabète de stress), dont les mécanismes sont multiples. Dans ces situations, l'hyperglycémie est une adaptation au stress. L'insuline exerce un rôle anti-inflammatoire et augmente la production d'espèces réactives oxygénées. L'apport exogène de glucose peut être délétère. L'hypoglycémie, quant à elle, est définie par une glycémie < 0,6 g/l (3,3 mmol/l) et l'hypoglycémie sévère par une glycémie < 0,4 g/l (2,2 mmol/l). Pour les experts, «il est possible que l'application de stratégies de contrôle glycémique strict expose à une augmentation de l'incidence des hypoglycémies sévères». Son risque neuronal apparaît lié à la reperfusion de glucose. La surveillance de la glycémie doit être vigilante pour dépister précocement les hypoglycémies, dont le diagnostic impose l'utilisation d'échantillons artériels ou veineux et non l'échantillon capillaire, qui surestime le plus souvent la glycémie. Les recommandations précisent également qu'il faut probablement exercer un contrôle du niveau glycémique avec une cible inférieure à 1,1 g/l (6,1 mmol/l) chez les adultes en réanimation, afin de diminuer les complications pendant l'hospitalisation ; qu'il faut exercer un contrôle strict de la glycémie (< 1,1 g/l ou 6,1 mmol/l) chez les adultes chirurgicaux de réanimation et, enfin, qu'il faut maintenir une glycémie < 1,1 g/l (6,1 mmol/l) en réanimation après chirurgie cardiaque.

Un protocole écrit est indispensable.

Ces recommandations font essentiellement suite aux travaux de G. van den Berghe qui ont montré l'intérêt majeur de l'insulinothérapie intensive chez les malades de réanimation, notamment après chirurgie cardiaque. Cet auteur a également mis en évidence le bénéfice en réanimation médicale, mais au prix d'hypoglycémies nombreuses et d'une surmortalité chez les patients normoglycémiques hospitalisés moins de trois jours. Deux grandes études européennes, VISEP et GLUCONTROL, réalisées afin de confirmer ces données, ont été prématurément interrompues du fait du nombre élevé d'hypoglycémies graves. Les métaanalyses récentes ne remettent pas en cause les recommandations, dans l'attente des résultats de la Normoglycaemia in Intensive Care Evaluation and Survival Using Glucose Algorithm Regulation (NICE-SUGAR) Study. Par ailleurs, la perfusion de glucose-insuline-potassium n'a probablement pas d'effet bénéfique si le niveau glycémique n'est pas contrôlé. Concernant le jeûne glucidique préopératoire de plus de 12 heures, il aggrave l'insulinorésistance périopératoire. Il faut autoriser les liquides clairs (dont 100 g d'hydrates de carbone) jusqu'à 2-3 heures avant l'intervention. Dans le cas particulier du diabétique, le bénéfice d'un contrôle strict de la glycémie sur la morbi-mortalité n'est pas démontré. Enfin, la réalisation pratique du contrôle glycémique nécessite la mise en place d'un protocole écrit adapté au fonctionnement de la structure de travail.

&gt; Dr GERARD BOZET

Source : lequotidiendumedecin.fr: 8436