Le Conseil d’État vient de désavouer l’assurance maladie et le ministère de la Santé en suspendant l’arrêté du 22 octobre 2013. Pour la première fois dans l’Hexagone, la prise en charge d’un traitement, ici l’apnée du sommeil, était conditionné à la bonne observance du traitement par pression positive continue (PPC). Depuis octobre dernier, l’assurance maladie suit par télétransmission le bon usage des appareils par les malades. Le déploiement du système devait s’achever en 2016. Cinq jours avant la décision du Conseil d’Etat, la Commission nationale informatique et liberté (Cnil) avait jugé légale cette télétransmission des données. Si l’arrêté avait été appliqué, le patient aurait alors dû utiliser au moins trois heures par jour la PPC. Dans ce cas, la location de l’appareil aurait été remboursée. Pour une sous-utilisation persistante, le paiement était dégressif avant un arrêt complet de prise en charge. Ce dispositif avait provoqué un tollé chez les professionnels et les associations de patients. Alain Murez, président de la FFAAIR (Fédération française des associations et amicales des malades insuffisants ou handicapés respiratoires) l’avait qualifié d’inique.
Deux millions de malades concernés
Pourquoi les pouvoirs publics ont-ils pris le risque d’instaurer une telle mesure ? Dans le contexte de restriction budgétaire, l’économie envisagée était loin d’être négligeable. 500 000 Français bénéficieraient de cette technique. Selon le Pr Dominique Robert, président du Syndicat national des associations d’assistance à domicile, le nombre des patients affectés par cette pathologie serait proche des deux millions. Entre 2011 et 2012, les remboursements ont progressé de 11 % pour dépasser 400 millions d’euros. Or, selon les estimations du ministère de la Santé, 20 % des patients ne respectaient pas les conditions d’utilisation. D’où un gain espéré de près de 80 millions d’euros si l’arrêté d’octobre dernier n’avait pas été censuré par le Conseil d’Etat. Certes, la non-observance génère un coût élevé pour la collectivité. « Pour autant, la réponse n’est pas la surveillance mais l’éducation des patients », réplique Christian Saout, coprésident du think tank Coopération patients à l’AFP.
Au-delà de l’apnée du sommeil, ces nouvelles conditions de remboursement auraient été susceptibles d’être étendues à d’autres pathologies chroniques, depuis l’asthme jusqu’au diabète.
Le débat est donc loin d’être achevé. En effet, comme le signale Alain Murez sur le site de la FFAAIR, le Conseil d’État ne s’est pas prononcé sur le fond. Le médecin peut-il être exclu de l’évaluation de l’observance ? « Il ne saurait être question de débrancher des malades amnésiques sur des seuls critères techniques ou comptables. » On attend la réponse des autorités sanitaires…
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature