Les observations de ses juridictions financières que la Cour des comptes a choisi de rendre publiques pour 2001 sont au nombre de 26 et ne reflètent pas l'ensemble des activités de cette instance dont les missions ont été récemment élargies. La Cour choisit « les constats et les analyses les plus riches d'enseignements, ou ceux qu'elle estime, dans un souci d'information et d'exemplarité, devoir porter à la connaissance de l'opinion ». D'autre part, des thèmes importants, comme la Sécurité sociale, font l'objet de rapports particuliers.
Appelée à contrôler les organismes publics, la Cour s'est penchée sur le CNRS, avec ses 26 000 agents, dont 11 000 chercheurs, et 40 % du budget de la recherche. Et le diagnostic est sévère : « La Cour a constaté le vieillissement de l'organisation, inchangée depuis un quart de siècle, le défaut de pilotage stratégique, les insuffisances de la gestion budgétaire et comptable, le problème posé par le renouvellement des personnels. »
La direction générale n'y peut pas grand chose puisque c'est le comité national de la recherche scientifique ( « le parlement des chercheurs ») qui détermine largement la politique scientifique et le sort des unités de recherche. En outre, note la Cour, quatre directeurs généraux se sont succédé en huit ans et le conseil d'administration et le conseil scientifique n'ont guère engagé de débats de nature stratégique. C'est ainsi que « les évolutions fondamentales que constituent l'émergence d'un espace européen de la recherche et la constitution de pôles régionaux n'ont guère été anticipées ni suffisamment accompagnées ».
Sur le plan de la gestion, la crise budgétaire du milieu des années quatre-vingt-dix, liée à la confusion entre autorisations de programme (promesses de crédits) et crédits de paiement (crédits effectifs) a altéré la confiance entre chercheurs et direction générale, entraînant des pratiques de « thésaurisation » de crédits par les laboratoires. Faute d'évaluation des résultats, c'est une logique budgétaire de dépense qui domine et, paradoxalement, il y a de plus en plus de crédits non consommés. La Cour des comptes se réjouit de la mise en place annoncée d'un nouveau logiciel budgétaire, comptable et financier et souhaite une procédure budgétaire associant toutes les unités de recherche et obtenant d'elles toute la transparence sur leurs diverses sources de financement.
Enfin, la Cour s'inquiète, comme nombre de chercheurs, de la gestion des personnels, qui pèche sur plusieurs points. Les recherches interdisciplinaires, tout d'abord, qui ne se développent pas suffisamment malgré des procédures incitatives. La faible mobilité des hommes ensuite, et le peu d'impact de l'évaluation sur le déroulement de la carrière et la rémunération des chercheurs. Dernière crainte, et non des moindres, pour l'avenir de la recherche française : le renouvellement à long terme, sachant que 56 % des chercheurs (plus de 6 000) atteindront la limite d'âge dans les vingt prochaines années, la moitié d'entre eux vers 2008-2010.
Un contrat d'objectifs
Dans leurs réponses aux observations de la Cour, les ministres de l'Economie et de la Recherche évoquent les réformes en cours : un décret à venir sur le régime budgétaire et financier des établissements scientifiques et techniques, la création d'un département des sciences et technologies de l'information, l'élaboration d'un plan stratégique à dix ans avec, pour les quatre ans, à venir la signature d'un contrat d'objectifs entre l'Etat et l'établissement, premier du genre. Quant au président (Gérard Mégie) et à la directrice générale (le Dr Geneviève Berger), nommés fin 2000, ils mettent en avant de premières actions témoignant « d'une volonté d'évolution et de l'affichage affirmé de priorités nouvelles » : priorité à l'interdisciplinarité et aux jeunes équipes, postes d'ingénieurs pour des actions de valorisation, progression des effectifs et des crédits pour les domaines prioritaires des sciences du vivant et des sciences et technologies de l'information, sans oublier la création d'entreprises à partir de recherches conduites par l'organisme.
La Cour avait, en 1988, relevé dans un rapport particulier les insuffisances du dispositif de lutte contre la toxicomanie. Examinant en 2001 les suites données à ce rapport, elle constate des améliorations : orientations mieux définies avec le plan interministériel triennal, rationalisation de l'utilisation des crédits, meilleure information du public et des professionnels. En revanche, elle juge que « le dispositif reste très déficient » en matière de prévention, spécialement en milieu scolaire et universitaire. Il faudrait aussi : multiplier les actions de formation des personnels du secteur sanitaire et social ; supprimer les difficultés d'accès aux traitements de substitution dans certaines régions et pour les personnes incarcérées ; mieux définir la place des centres spécialisés dans l'ensemble du dispositif de soins.
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