LE BUDGET RÉSERVÉ aux soins de ville dans le Plfss 2007 (projet de loi de financement de la Sécurité sociale) n’en finit plus de faire des vagues. Après les protestations en ordre dispersé contre l’objectif de dépenses fixé pour la ville l’an prochain (+ 0,8 %), et le «différentiel» avec le taux hospitalier (+ 3,5 %), c’est désormais le Centre national des professions de santé (Cnps) – où siègent une trentaine d’organisations de professions de santé libérales médicales et paramédicales – qui sonne l’alarme avec une rare unanimité et brandit la menace d’une «riposte graduée».
Dans une lettreadressée à tous les députés et sénateurs, le président du Cnps, Dinorino Cabrera, demande aux élus de «rétablir une équité» entre la ville et l’hôpital au cours de la discussion parlementaire (qui commence en séance plénière le 24 octobre), «de manière à permettre le maintien des soins de proximité».
Afin d’être encore mieux compris, le Cnps fait référence à «l’aventure de la maîtrise comptable, qui avait fait tant de ravages en 1997, aussi bien sur le plan politique que sur le plan économique, puisqu’il fut un échec cuisant».
Le Cnps, qui réunira son conseil d’administration jeudi prochain, sera reçu ce soir par Xavier Bertrand ; il demande également un entretien avec le Premier ministre. Et dans chaque département, les représentants des libéraux de santé sont invités à sensibiliser «individuellement» les élus.
Les bons élèves « pénalisés ».
Pour les membres du Cnps, ce taux de 0,8 %, quoi que prétende le ministre de la Santé, annonce automatiquement une régulation financière à court terme qui «rompt» avec la logique médicalisée de la réforme Douste-Blazy. Avec ce raisonnement simple : cet objectif «intenable» (en raison notamment de l’effet report des revalorisations de 2006 et des transferts croissants de charges de l’hôpital vers les soins ambulatoires) conduira tout droit à un dépassement de l’enveloppe de la ville dès le premier semestre 2007. Conséquence : le déclenchement du comité d’alerte sur les dépenses maladie en juin prochain, qui exposera chaque profession libérale à une baisse des tarifs. «Si rien ne bouge, la ville trinquera, c’est écrit», résume le Dr Cabrera. Une situation d’autant plus insupportable que la Cnam vient de souligner les bons résultats de la maîtrise médicalisée sur les huit premiers mois de 2006 (« le Quotidien » du 12 octobre). «On pénalise les meilleurs, ras-le-bol de servir de variable d’ajustement, on ne joue plus», poursuit Michel Chassang, président de la Csmf.
Piégés dans le même bateau, prescripteurs et professions dites «prescrites» (infirmières, kinés...) unissent leur voix pour «peser» dans le débat.
Pour Claude Cohen (Syndicat national des médecins biologistes), «la maîtrise comptable est déjà là, on ne parle que de chiffres». La biologie a essuyé l’été dernier un plan d’économies de 96 millions d’euros par le biais d’une baisse des tarifs de certains actes.
Vice-président du Syndicat national des masseurs-kinésithérapeutes-rééducateurs (Snmkr), Jean-Jacques Magnies rappelle «l’absence de revalorisations depuis 2000» et s’interroge, vu la différence de traitement entre la ville et l’hôpital, sur les choix de santé du gouvernement. «On peut se demander s’il n’y a pas la volonté de choisir un système de soins plutôt qu’un autre.» Infirmières, pharmaciens d’officine, dentistes : tous entonnent le même refrain contre le «tour de vis» du gouvernement .
Devant les députés UMP inquiets, Xavier Bertrand a réaffirmé la semaine dernière que les marges d’action seraient «équivalentes» en ville en 2007 et en 2006. Mais ce discours ne convainc pas les professionnels de santé. «Le gouvernement a un mois pour corriger sa copie», tranche Michel Chassang (Csmf). Sinon ? «Notre pression est encore amicale, demain je ne sais pas ce qui peut arriver», met en garde Dino Cabrera.
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