Quels programmes pour l'avenir de la médecine génér ale ?

Le Cnge et le Snemg font plancher les ca ndidats

Publié le 12/03/2007
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À L'INVITATION du Collège national des généralistes enseignants (Cnge) et du Syndicat national des enseignants de médecine générale (Snemg), les responsables santé de plusieurs candidats à l'élection présidentielle étaient invités à la faculté de médecine de Créteil à plancher sur le thème «y aura-t-il encore des médecins généralistes demain» ?

Une question cruciale aux yeux du Cnge et du Snemg, qui dénoncent tous deux «une spécialité universitaire à peine née et déjà en péril».

Avant de faire travailler les politiques (Gérald Kierzek et Daniel Solaret pour l'UDF, Françoise Tenenbaum et Claude Pigement pour le PS, Philippe Juvin pour l'UMP et André Cicollela pour les Verts), les responsables des deux syndicats de généralistes enseignants ont balisé le terrain et développé leur projet de valorisation de leur spécialité universitaire.

Avec pour planter le décor, un sombre tableau : selon le Dr Pierre-Louis Druais, du Cnge, «seule la moitié des diplômés en médecine générale exercent réellement en ambulatoire. Dans le même temps, les nouveaux diplômés s'installent de plus en plus tard, et partent à la retraite de plus en plus tôt». Conséquence : «Des difficultés renforcées d'accès aux soins avec augmentation du nombre de zones sans médecin de proximité.» Le Dr Vincent Renard, du Snemg, fait pour sa part la liste des «décisions urgentes et indispensables» qu'il convient de prendre. Il faut tout d'abord, dit-il, «réguler les flux entre spécialités dès la fin du 2ecycle, et reconnaître statutairement et financièrement les enseignants en médecine générale ambulatoire en 2eet 3ecycles». Le Snmeg demande également l'intégration de 120 enseignants titulaires sur toute la France, «avec un budget fléché n'empiétant pas sur les autres spécialités». De plus, Snmeg et Cnge réclament la nomination de 150 enseignants associés supplémentaires en plus des 115 actuels, et la nomination, sur un budget réservé à la spécialité, d'un chef de clinique en médecine générale ambulatoire par faculté (la plate-forme commune du Snemg et du Cnge est disponible en ligne sur le site www.cnge.fr). Le tout représentant un budget annuel de 12 millions d'euros, «ce qui représente à peine 8heures du déficit annuel de la Sécu», comme l'a rappelé peu après le socialiste Claude Pigement.

Sifflets et applaudissements.

Enseignants et étudiants ont ensuite écouté les représentants des candidats à la présidentielle, n'hésitant pas à les interrompre pour les applaudir ou les siffler.

Côté UDF, Gérald Kierzek et Daniel Solaret ont mis l'accent sur la nécessité de «régionaliser le système de santé, avec des structures contrôlées et dirigées par les acteurs de santé eux-mêmes». L'UDF prône en outre la mise en place d'un numerus clausus régional, l'évolution vers de nouveaux modes de rémunération, ainsi que la mise en place de passerelles d'exercice entre la ville et l'hôpital.

Chez les partisans de Ségolène Royal, Françoise Tenenbaum (par ailleurs vice-présidente de la région Bourgogne) a pour sa part plaidé pour la multiplication en zones rurales des maisons de santé pluridisciplinaires. Quant à Claude Pigement, il s'est prononcé, «au-delà du C=CS», pour la parité des rémunérations entre généralistes et spécialistes. Le responsable des questions de santé au PS a en outre réaffirmé l'attachement de Ségolène Royal au statut du généraliste «autour duquel tout s'organise». Claude Pigement a également estimé que «le paiement à l'acte ne peut plus répondre seul aux nouveaux défis», et que le problème des zones sous-médicalisées ne se résoudrait «qu'en s'attaquant à celui de l'aménagement du territoire». Il a enfin insisté sur la nécessité de réfléchir aux délégations et aux transferts de tâches, et manifesté son opposition «aux dépassements tarifaires et aux franchises non remboursées».

Pour le Dr Philippe Juvin, conseiller santé de Nicolas Sarkozy, «la régionalisation paraît évidente à tout le monde, il faut nous doter d'un outil régional». En revanche, à l'UMP, on réaffirme l'attachement à la «primauté du paiement à l'acte», même si on n'est pas opposé à certains forfaits. Philippe Juvin a également donné un coup de chapeau au Pr Yvon Berland, «dont le rapport sur la délégation des tâches constitue une vision moderne de la médecine», et – une fois n'est pas coutume – il est tombé d'accord avec Claude Pigement sur la nécessité de s'attaquer aux problèmes d'aménagement du territoire pour régler la question des déserts médicaux. Philippe Juvin a quelque peu fait réagir l'assistance en prophétisant que les praticiens libéraux devraient un jour ou l'autre, à l'instar de ce que fait déjà le NHS anglais (National Health System), «publier des indicateurs de la qualité de leur activité pour que les patients puissent choisir leur médecin en connaissance de cause. Si les médecins ne le font pas eux-mêmes, il y aura un jour un classement de l'hebdomadaire « le Point » sur la médecine générale ambulatoire, comme il le fait déjà pour les hôpitaux».

Enfin, pour André Cicollela, des Verts, «le médecin distributeur de médicaments, c'est fini. Il faut refonder le système de santé autour de trois axes: les soins tout d'abord, en favorisant le préventif; l'environnement, car bien des épidémies ont des causes environnementales; et l'éducation, pour que le citoyen puisse être acteur de sa propre santé».

Le Snjmg réclame des mesures urgentes afin d'enrayer la fuite

Le Syndicat national des jeunes médecins généralistes (Snjmg) interpelle, lui aussi, les candidats à la présidentielle sur la fuite croissante de l'exercice de la médecine générale. Le syndicat redoute, si l'exercice en ambulatoire ne s'adapte pas, que les générations futures, notamment les femmes qui représenteront en 2020 plus de la moitié des médecins, continuent de délaisser la discipline. Le phénomène est grave, puisque, ces trois dernières années, 2 000 internes ont délaissé la médecine générale lors du choix de leur spécialité d'internat. Les jeunes généralistes souhaitent que plusieurs mesures soient prises en urgence : l'amélioration du statut de collaborateur libéral et la création du statut salarié, la diversification des modes de rémunération et la création de mesures incitatives pour l'exercice en commun (cabinets de groupe, réseaux...). Le Snemg souhaite également lutter contre la précarité des jeunes médecins en centre de santé grâce à l'embauche en contrat à durée indéterminée (CDI) et non en contrat à durée déterminée (CDD) de six ans. Plusieurs dispositions pourraient permettre de rendre plus facile la vie des internes en médecine générale, indique le syndicat, comme la revalorisation des indemnités d'adoption et de paternité ou la prorogation de la durée de validité des licences de remplacement en cas de maternité, de paternité, d'adoption ou de maladie.

> HENRI DE SAINT ROMAN

Source : lequotidiendumedecin.fr: 8124