Le Comité national de défense de l'hôpital (CNDCH), qui « se bat depuis quatre ans pour que les dysfonctionnements de nos hôpitaux n'aboutissent pas à des prises en charge indignes et honteuses », vient d'écrire une énième lettre d'alerte aux pouvoirs publics.
Différences notables avec les courriers précédemment envoyés par l'organisation : celui-ci s'adresse aux plus hautes autorités de l'Etat (le président de la République, les présidents du Sénat et de l'Assemblée nationale, le Premier ministre, le ministre de la Santé) ; la crise que redoutaient jusqu'à présent les lettres du CNDCH à longueur de lignes est devenue réalité avec la canicule.
L'automne approchant, les cassandres continuent de tirer la sonnette d'alarme : « L'état de nos hôpitaux est aujourd'hui tel, qu'en l'absence de mesures d'urgence, à l'occasion d'un hiver rigoureux, d'une épidémie de grippe ou de bronchiolite plus forte que les autres années, à tout moment, la catastrophe sanitaire de cet été risque de se reproduire », écrit le CNDCH. En cause, toujours : les restrictions budgétaires et la philosophie qui sous-tend la modernisation en cours de l'hôpital public. Gériatre à l'hôpital Georges-Clemenceau, en région parisienne, le Dr Alec Bizien accuse les fermetures de lits, et « la politique de flux tendu que l'on impose à l'hôpital ».
Il répète que « cet été,faute de lits d'aval, des gens ont été éjectés des urgences, renvoyés chez eux » et appelle une métaphore automobile à la rescousse : « Quand on a une voiture, on n'utilise pas en permanence la totalité de ses chevaux, on se sert de sa puissance pour monter les côtes. A l'hôpital, c'est pareil, il faut un tampon de garantie. » Dermatologue à l'hôpital Henri-Mondor de Créteil, le Pr Jean-Claude Roujeau a vu, le mois dernier, des patients mourir « de chaud » dans son service : « On n'avait rien pour s'occuper d'eux, raconte-t-il, il fallait se battre avec la chirurgie pour se procurer des vessies de glace » et pour hydrater les malades, l'hôpital n'a mis la main que sur « des vaporisateurs à plantes vertes ».
Le Dr Roujeau trouve désespérant qu'à Créteil, le grand centre commercial voisin de l'hôpital, et construit au même moment que l'hôpital, il y a trente ans, soit climatisé et pas le CHU : « On estime que personne n'irait faire ses courses par 35° mais climatiser l'hôpital alors que cela servirait dix jours par ans ? Non ! »
Le CNDCH ne veut plus que l'on « diminue les moyens des hôpitaux publics ». « Nous sommes complètement étranglés, constate son président, le Dr Patrick Werner, on nous a dit "restructuration" : on a fermé de petites structures mais surtout on n'a pas renforcé les grosses ; l'hôpital est passé aux 35 heures et les embauches indispensables n'ont pas été faites... Je ne pense pas que la finalité de l'hôpital public soit la rentabilité. Sa finalité, c'est le meilleur soin pour tous. » Président honoraire de l'organisation, le Pr François Guérin ne mâche pas ses mots : « C'est une politique meurtrière, dit-il, que de sacrifier le sort des malades au nom d'impératifs financiers. »
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