CHEZ LES MAMMIFERES, les chromosomes sont regroupés selon des paires de chromosomes identiques ou autosomes, et deux chromosomes sexuels qui déterminent le sexe et les caractères somatiques qui leur sont liés.
Mais tandis que les individus mâles ont un chromosome X et un chromosome Y (de petite taille et contenant très peu de gènes), les individus de sexe féminin ont deux chromosomes X. Pour équilibrer l'expression des gènes entre les sexes (et éviter que les sujets féminins possèdent deux fois plus de protéines fabriquées par les chromosomes sexuels que les sujets masculins), la nature a trouvé un moyen : l'inactivation aléatoire d'un chromosome X dans le sexe féminin, très tôt au cours de l'embryogenèse ; cela se traduit chez les femmes par l'extinction de la quasi-totalité des 2 000 gènes portés par un chromosome X.
Des tissus mosaïques.
Les tissus somatiques féminins sont ainsi des mosaïques, composés de cellules sous la dépendance du chromosome X paternel et d'autres sous la dépendance du chromosome X maternel.
L'hypothèse a été émise d'une seconde forme de compensation de dosage afin de protéger les mammifères des effets délétères de l'expression d'une seule copie (haplo-insuffisance) du chromosome X dans les cellules somatiques.
Deux chercheurs, Christine Disteche et Di Kim Nguyen (université de Washington, Seattle), révèlent dans un nouveau travail que la transcription des gènes sur le chromosome X est globalement doublée dans les cellules somatiques (cellules diploïdes) de plusieurs espèces mammifères, par rapport à la transcription d'un autosome.
Ils montrent également que, dans les cellules germinales haploïdes (spermatides et ovocytes), le chromosome X est exprimé, mais non surexprimé, ce qui préserve l'équilibre d'expression entre le chromosome X et les autosomes dans ces cellules haploïdes. La régulation positive transcriptionnelle du chromosome X actif doit survenir après la fécondation, très tôt au cours de l'embryogenèse, proposent les chercheurs.
Enfin, ils ont constaté que les gènes liés à l'X sont hautement exprimés dans les tissus cérébraux de plusieurs espèces mammifères et davantage encore chez l'homme que chez la souris.
« Il n'existait jusqu'ici aucune preuve que l'expression globale du chromosome X du mammifère était régulée positivement », déclare au « Quotidien » le Dr Christine Disteche, chercheuse à l'université de Washington (Seattle). « Nous avons exploité une nouvelle approche (analyse des microarrays) pour déterminer le débit transcriptionnel global de l'X, comparé au débit autosomal. Nos résultats montrant une régulation positive de l'X chez les mammifères unifient le concept d'expression équilibrée dans un génome donné, et l'idée que des mécanismes ont évolué afin d'éviter les effets délétères de l'haplo-insuffisance. »
Des implications cliniques potentielles.
« Nos résultats indiquant une proportion élevée de gènes liés à l'X exprimés dans les tissus cérébraux pourraient avoir des implications pour la compréhension du retard mental lié à l'X. Nos résultats concordent avec de précédentes estimations sur la proportion des gènes liés à l'X qui interviennent dans la fonction cérébrale humaine, des estimations fondées sur la fréquence du retard mental lié à l'X. »
« Nous projetons maintenant de déterminer quels sont les mécanismes moléculaires de la régulation positive du chromosome X, en relation avec le développement et la spécificité tissulaire. »
« Nature Genetics », 12 décembre 2005, Nguyen et coll., DOI : 10.1038/ng1705.
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