Le temps de la médecine
Chaque jeudi, ils sont quatre à venir retrouver leur chien au centre ANECAH d'Alençon (Association nationale pour l'éducation des chiens d'assistance pour handicapés). Tous quatre handicapés mentaux, suivis à l'IME la Ribambelle, tout proche. Pendant deux heures, entourés d'une éducatrice, d'un membre de l'ANECAH et de deux adultes, ils vont s'occuper qui d'un labrador, qui d'un golden retriever.
L'objectif de ces rendez-vous hebdomadaires, explique Marie-Claude Lebret, fondatrice de l'association, est d' « apporter à l'enfant en difficulté du bien-être, du plaisir et un contact » avec, en filigrane, un triple objectif éducatif, pédagogique et thérapeutique.
Les diverses activités proposées répondent à ces critères de base. Et l'observateur est surpris de voir comment des enfants psychotiques aux troubles graves de la personnalité, agressifs ou résistants, se prêtent volontiers au jeu. A chaque instant son activité. Le toilettage du chien, bien sûr, avec le brossage, la douche, la brosse à dents. De nombreux enfants incapables de se laver correctement y sont parvenus après avoir appris sur l'animal. La relaxation aussi, en musique, favorise le rapprochement entre les deux êtres. Ils finissent enroulés l'un contre l'autre. Endormis.
Il y a aussi le travail du chien. Les labradors de l'ANECAH, destinés à seconder des handicapés physiques, savent répondre à cinquante ordres différents du genre « cherche-apporte », « pose », pour poser la tête sur les genoux, « tug », pour tire ou encore « au pied », pour marcher sans tirer sur la laisse. A l'enfant de faire effectuer un parcours à son compagnon en utilisant ces codes. Le bénéfice thérapeutique est net. Le jeune maître doit se repérer dans le temps, l'espace, savoir se placer, choisir le bon mot. Bien sûr, le plaisir, c'est aussi de se promener avec son chien ou de le sortir en ville. Sophie Lasne, de l'ANECAH, rappelle que les labradors et les goldens retrievers sont beaux et que cela favorise les relations avec autrui. A ce propos, Marie-Claude Lebret précise : « Nos animaux ont un comportement fiable, nous sommes extrêmement vigilants sur leur sélection. La sécurité est assurée. »
L'attente du thérapeute, explique Hélène Thromas, éducatrice à l'IME la Ribambelle (Alençon), est de dynamiser les enfants les plus démunis (troubles du langage, de l'attention, épilepsie), la plupart psychotiques atteints de graves troubles de la personnalité. Les séances avec les chiens entrent dans le cadre d'un projet individuel. Le contact avec le chien favorise la communication, la socialisation chez ces enfants, rapporte l'éducatrice. La motricité fine s'en trouve améliorée ainsi que les facultés de concentration. Ces enfants en difficulté, rappelle-t-elle, présentent un comportement violent, agressif ou d'opposition. Dès lors qu'ils côtoient le chien, la violence ne s'exprime plus. Les situations conflictuelles s'apaisent et ceux qui s'opposent aux sorties ne se posent plus de questions quand il s'agit de promener le chien. « L'enfant ne met plus en avant ses difficultés. Il est responsabilisé. Le désir apparaît chez lui. On pourrait parler d'humanisation grâce à l'animal. »
Un médiateur thérapeutique
Autre ami de l'homme depuis l'Antiquité, le cheval aide aussi les enfants en difficulté. Des similitudes existent avec ce qu'apporte le chien, des spécificités aussi. Au Mont-des-Oiseaux, à Wissembourg (67), Christelle Leclerc met en place un manège d'équithérapie, avec deux objectifs, pour l'instant, kinésithérapique et psychomoteur. Pendant deux heures et demie, chaque semaine, des enfants polyhandicapés viennent panser, puis monter des chevaux. « L'objectif est d'utiliser l'animal comme médiateur thérapeutique. Nous attendons une ouverture de l'enfant vers l'extérieur, notamment pour les psychotiques ou les autistes. » L'attitude des enfants se calque sur celle relevée auprès des chiens : perte de l'agressivité, recherche du contact avec l'animal. Marguerite Weith, de la Fédération Est de thérapeutique avec le cheval, parle de sécurisation affective primaire. « L'enfant fouine dans le pelage, il se laisse porter. Il revit et verbalise. L'angoisse n'existe plus... jusqu'à un certain degré. » Christelle Leclerc ajoute que le cheval n'est pas intrusif, parce qu'il ne parle pas. Sa masse montre à l'enfant des limites, des interdits.
Qu'il s'agisse de « thérapie assistée par l'animal » ou d'« activités associées à l'animal », ces démarches manquent encore d'évaluation. Des études sont attendues.
Des dauphins dressés
En Floride, des enfants handicapés mentaux bénéficient d'une thérapie assistée par l'animal plus originale que les petits Français : la delphinothérapie. Ici, des animaux en captivité sont dressés et conditionnés à interagir avec les êtres humains. Ils sont utilisés comme source de motivation ou de récompense face à un objectif donné (rééducation physique, du langage, concentration, communication). Le dauphin occupe une place d'intermédiaire entre l'enfant et l'adulte. Il fera l'objet de caresses, pourra être nourri ou jouer le rôle de remorqueur.
Dans l'expérience de Water Planet*, toutes sortes d'enfants atteints de troubles psychiques ont pu en bénéficier. La delphinothérapie a complété ou renforcé les résultats ou progrès obtenus au cours de thérapies traditionnelles. Elle ne cherche en aucun cas à les remplacer. Les niveaux d'attention et de motivation ont souvent été améliorés.
Des projets plus spécifiquement dédiés aux enfants autistes ont été mis en place. Les dauphins ont pu susciter chez certains d'entre eux des comportements spontanés non typiques et l'émergence de réponses sociales.
www.waterplanetusa.com.
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