LA SIXIÈME SÉANCE de négociation conventionnelle aura été la bonne. Vendredi, en soirée, l'assurance-maladie et les trois syndicats médicaux signataires de la convention (Csmf, SML, Alliance) ont mis un terme au bras de fer tarifaire qui durait depuis la mi-décembre. Le principe d'un accord avait été acquis la veille afin d'éviter à tout prix un nouveau psychodrame. Le relevé de conclusions prévoit d'abord l'augmentation ferme de la consultation généraliste (C mais aussi V) de 21 à 22 euros au 1er juillet 2007, point qui faisait déjà consensus. Le C2 (avis d'expert) passera mécaniquement à 44 euros à la même date. Les conditions du passage du C à 23 euros, noeud gordien des discussions, ont fait l'objet d'une interminable rédaction pesée au trébuchet, suffisamment équivoque pour ne fâcher personne. Il est prévu de mettre en oeuvre le tarif de 23 euros «au 1erjuin 2008, en fonction des marges de manoeuvre prévues par la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2OO8» que votera le prochain Parlement. Les partenaires ont convenu de se réunir «avant le 31décembre 2007» pour arrêter la date définitive, qui dépendra donc du prochain Ondam (objectif national de dépenses d'assurance-maladie). Il appartiendra au prochain gouvernement de prévoir un budget suffisant sur les soins de ville.
Mais à peine l'accord était-il signé que l'échéance du 1er juin 2008 pour le C à 23 euros faisait l'objet d'interprétations divergentes, «date butoir» absolue pour les syndicats médicaux, simple objectif pour la direction de l'assurance-maladie. Deuxième condition : l' «engagement» des médecins dans la maîtrise médicalisée et dans des programmes de prévention en 2007 et 2008 (dépistage du cancer du sein, vaccination antigrippale chez les personnes âgées, iatrogénie médicamenteuse, diabète). En clair, la caisse n'exige plus de « résultats » préalables chiffrés sur les prescriptions. Ainsi rédigé, l'accord semble satisfaire toutes les parties.
Xavier Bertrand, qui voulait afficher un compromis avant son départ du ministère, prévu en fin de semaine, pourra se prévaloir d'avoir fait le nécessaire pour respecter son engagement sur «le rendez-vous duC à 23euros», à l'heure où la médecine générale devient une spécialité. A l'inverse, un conflit ouvert avec les praticiens libéraux sur les tarifs aurait terni son image et son bilan.
Frédéric Van Roekeghem, le directeur de l'Uncam, a gagné ses galons de gardien inflexible des comptes en refusant de « lâcher » le C à 23 euros sans contrepartie, ce qui était l'exigence initiale des médecins libéraux. Le tarif de 23 euros dépendra en effet des « marges » prévues par la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2008, inconnues à ce jour. «La date finale dépendra des conditions d'équilibre de la Sécurité sociale», a martelé Frédéric Van Roekeghem, directeur de la caisse. Dans ces conditions, il estimait avoir respecté le mandat de négociation étroit fixé par les partenaires sociaux, notamment en limitant au maximum le risque d'intervention du comité d'alerte cet été. D'autant qu'un nouveau plan de maîtrise médicalisée des prescriptions pour 2008 a été accepté par les praticiens libéraux. Comme prévu, il fixe des objectifs poste par poste : baisse de 5 % de la prescription d'antibiotiques par rapport à 2007 ; stabilisation des montants pour les statines ; baisse de 5 % des anxiolytiques et hypnotiques ; et, par rapport à la tendance 2008, baisse de 2 % pour les antihypertenseurs, de 1 % des IJ en volume, de 5 % des volumes des IPP et de 5 % pour les transports ; transfert de 2,5 points des dépenses en rapport avec une ALD (100 %) vers les dépenses sans rapport avec une ALD (remboursement de droit commun) ; baisse de certains actes diagnostiques et thérapeutiques. Deux accords de bon usage de soins (Acbus) sont prévus sur les antiagrégants plaquettaires (AAP) et la coloscopie après polypectomie.
Au-delà de ce plan de maîtrise collectif, la caisse veut s'orienter dans les prochains mois vers une déclinaison individuelle de certains engagements (chaque médecin ayant son «profil» d'activité et un retour d'information sur ses indicateurs) : délivrance de génériques ; juste prescription des IPP dans le répertoire ; antibiotiques ; respect de la réglementation du bizone.
Difficile, mais équilibré (Unof).
Les syndicats signataires de la convention veulent croire qu'ils sont sortis par le haut de ce marathon conventionnel.
La Csmf, qui avait agité la menace de la rupture, annoncé son désengagement des commissions conventionnelles et menacé d'une action nationale en avril, pourra se présenter devant son assemblée générale, samedi et dimanche prochains, avec quelques arguments. De fait, le passage du C à 23 euros n'est pas conditionné à des «résultats» chiffrés préalables de maîtrise médicalisée ou de prévention, ce qui aurait eu des relents de régulation comptable, mais à un simple «engagement» des praticiens en 2007 et 2008. Cela suffira-t-il à convaincre la « base » de la Csmf ? Par le passé, certaines assemblées générales confédérales ont été agitées, mais Michel Chassang, président de la Csmf, affirme avoir préservé l'essentiel dans un contexte tendu, où les dépenses de janvier et février repartent à la hausse. «C'est un accord très difficile mais équilibré, compte tenu des circonstances», a résumé Michel Combier, président de l'Unof (généralistes de la Csmf).
Le SML a pu se démarquer de son partenaire encombrant, la Csmf, en proposant la semaine dernière une solution de repli qui a sans doute contribué à débloquer les négociations (même si cet accord n'a guère de chances de calmer tous les généralistes et en particulier les opposants à la convention).
Dans la nuit de vendredi à samedi, les partenaires tentaient de trouver un accord pour les spécialistes, portant sur la deuxième tranche de Ccam technique, les conditions d'élargissement de l'application du C2 et les compensations financières pour les spécialités cliniques.
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