A la veille de l’ouverture des négociations conventionnelles, et alors que l’on s’attend à un PLFSS 2010 de rigueur, les chiffres que nous publions cette semaine devraient sans nul doute alimenter les discussions médecins-caisses. Disons le tout net : l’exercice 2008, n’aura globalement pas été très faste pour les médecins libéraux. Les tout premiers chiffres de l’Unasa (Union nationale des associations agréées), calculés sur les déclarations d’impôts des praticiens montrent, en effet, que pour nombre de disciplines, 2008 se sera en effet soldé par une croissance zéro des bénéfices. Alors même que la hausse des prix à la consommation a été de 2,8% l’an passé, cela renvoie à une baisse de pouvoir d’achat pour nombre de praticiens. Si ophtalmologistes, psychiatres et anesthésistes font une année honorable, cardiologues, angéiologues ou ORL connaissent une évolution négative.
Dans ce contexte, le bilan 2008 du généraliste ressemble assez aux exercices précédents. Calculé à partir des 19 242 confrères adhérents d’une AGA affiliée à l’Unasa, le bénéfice moyen du médecin de famille s’établit à 76?000 euros, soit une augmentation annuelle de 4,8%, après trois années de hausse similaire de leurs revenus (+3,9 % en 2005, +4 % en 2006, +3,8 % en 2007).
À la vérité, on aurait pu s’attendre à pire. À la différence de 2007, aucune hausse du C n’est, en effet, intervenue l’an passé et seuls les effets indirects de la hausse de juillet 2007 ont encore eu une incidence sur la première moitié de 2008. Un euro de hausse sur le C, c’est en moyenne
5 000 euros de plus par professionnel en année pleine. Le passage du C de 21 à 22 euros à la mi-année en 2007 a donc probablement été à l’origine d’une hausse moyenne d’environ 2 500 euros des recettes du praticien. L’ effet des revalorisations tarifaires aurait néanmoins pu être plus important, si l’activité du généraliste avait été soutenue l’an passé.
A noter également que les charges du généraliste sont reparties à la hausse. Alors que, depuis trois ans, les bénéfices progressaient davantage que les chiffres d’affaires, c’est l’inverse pour 2008 : les recettes s’accroissent en moyenne d’un honnête 6,6%, alors que le revenu net n’augmente que de 4,8 %... En d’autres termes, si en 2007, le généraliste convertissait en moyenne 57,6 % de ses recettes en bénéfice, ce ratio n’est plus que de 56,6 % en 2008.
Zones rurales : le bonus de 20 %
Au total, l’an passé, ni la valeur de l’acte de référence, ni les volumes d’actes n’ont progressé. Et compte tenu d’une légère hausse des charges, tout cela fait de 2008 une année moyenne pour les adhérents généralistes de l’Unasa. Le bilan 2008 est pourtant plus contrasté qu’il n’y paraît, les plus gros revenus de la profession parvenant à s’en sortir honorablement. Alors que le premier quartile de recettes – des généralistes qui gagnent autour de 34 000 euros – voient leurs revenus baisser de 3,5%, la situation est complètement différente pour les plus gros potentiels de clientèle. Le dernier quartile de recettes qui atteint les 127 000 euros de bénéfice enregistre, en effet, une forte progression de près de 12 % qui tranche par rapport à la moyenne.
Faut-il voir dans cette forte hausse l’effet du bonus de 20 % en zones déficitaires qui prenait effet en année pleine en 2008 ? Sans doute, car les hauts revenus se retrouvent – par définition – souvent dans les zones rurales isolées. Or, depuis mars 2007, l’assurance-maladie a -en application de l’avenant n°20 à la convention- versée un forfait annuel à 650 praticiens soit en moyenne 26 000 euros par professionnel. Il est donc probable que ce « bonus » tarifaire conséquent soit l’explication de la hausse forte des recettes dans les cabinets qui comptent les plus grosses patientèles. Pour combien de temps bénéficieront-ils de ce coup de pouce ? Mystère. Car, après s’être acquitté de l’avenant n°20, la Sécu proposait au début de l’été de ne plus prendre en charge les cotisations des médecins dont les revenus dépassent la barre des 100 000 euros. Une façon de retirer d’une main aux médecins de campagne, ce qu’elle leur a donné de l’autre !
Dans le contexte actuel, 2009 peut-t-elle être meilleure que 2008 pour l’ensemble de la profession ? Il y a peu de chances que ce soit soit l’année du rattrapage tarifaire, car le fait que le C à 23 euros soit reporté au mieux en 2010 a déjà privé les généralistes d’environ 5 000 euros de revenus supplémentaires en année pleine. Ceux qui choisiront le Capi et parviendront à atteindre les objectifs de ce contrat individuel peuvent espérer une hausse de leurs revenus. Et, pour le reste, il faudra compter sur une hypothétique reprise d’activité, à la faveur, peut-être, d’une épidémie de grippe H1N1.
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