OEil rouge, douloureux
L'uvéite antérieure est une inflammation aiguë ou chronique de l'iris (iritis), du corps ciliaire (cyclite) ou des deux (iridocyclite). Les uvéites antérieures possèdent donc une entité anatomoclinique fondée sur leur siège anatomique, les caractéristiques cliniques de l'atteinte inflammatoire et l'évolution. Du point de vue fonctionnel, l'oeil est rouge avec un cercle périkératique, douloureux, avec une baisse d'acuité visuelle, une photophobie et un myosis en présence de synéchies irido-cristalliniennes. A l'examen, on note des précipités rétrodescemétiques granulomateux ou non, un tyndall (le tyndall signant la présence de particules dans la chambre antérieure, visibles à la lampe à fente) apprécié de une à quatre croix, un flare protéique en chambre antérieure. D'autres signes peuvent être éventuellement associés : un hypopion, une hypertension oculaire, une collerette ou une atrophie irienne, une kératite.
Fond d'oeil
Devant toute première poussée d'uvéite antérieure, il est nécessaire d'effectuer systématiquement un fond d'oeil à la recherche de signes d'uvéite intermédiaire et postérieure, ainsi qu'un bilan minimal regroupant NFS, VS, CRP à la recherche d'un syndrome inflammatoire, une sérologie Tpha-Vdrl (recrudescence de syphilis), une intradermoréaction à la tuberculine (5 UI), ainsi qu'une radiographie du thorax à la recherche d'une tuberculose ou d'une sarcoïdose.
Nombreuses étiologies
Les étiologies des uvéites antérieures sont nombreuses :
– infectieuses : virales (HSV, VZV, CMV) ; bactériennes (tuberculose) ; maladie de Lyme, syphilis, lèpre, leptospirose ; parasitaires (toxoplasmose) ;
– spondylarthropathies : SPA, Fiessinger Leroy Reiter, arthrite juvénile idiopathique ;
– maladies de système : sarcoïdose, Behçet, Wegener, plus rarement SEP ;
– maladies oculaires : uvéites phacoantigéniques ; hétérochromie de Fuchs, Posner-Schlossman ;
– iatrogènes : rifabutine, bêtabloquant.
La première question à se poser est d'apprécier le caractère granulomateux ou non de l'uvéite antérieure car il oriente la recherche étiologique dont dépendent les conséquences thérapeutiques et pronostiques.
Uvéites antérieures non granulomateuses
Elles peuvent être uni- ou bilatérales.
Les uvéites antérieures non granulomateuses unilatérales évoquent certaines étiologies : les spondylarthropathies (SPA, Fiessinger Leroy Reiter) – dont le diagnostic repose sur un score regroupant plus de six critères spécifiques de cette étiologie (douleurs nocturnes lombaires ou dorsales, oligarthrite asymétrique, douleurs fessières, doigt ou orteil en saucisse, talalgie, iritis, urétrite non gonococcique, diarrhée moins d'un mois avant une arthrite, présence ou antécédent de psoriasis ou d'entérocolopathie chronique, signes radiologiques de sacroiliite, terrain génétique spécifique) – et par ailleurs l'arthrite juvénile idiopathique (AJI) ou une maladie de Behçet.
L'interrogatoire est dans tous les cas primordial. Il est par ailleurs toujours nécessaire d'éliminer un corps étranger intra-oculaire, une rubéose irienne dans le glaucome néovasculaire, une tumeur au premier rang desquelles le rétinoblastome.
Les uvéites antérieures non granulomateuses bilatérales évoquent l'AJI (60 % des cas), bilatétales, un Behçet, des collagénoses, une infection (VIH, syphilis).
Ainsi, dans les formes non granulomateuses, un bilan de deuxième intention sera à réaliser, comportant des radiographies du rachis dorsolombaire et des sacro-iliaques, un typage HLA avec HLA B 27 complet. Chez l'enfant, l'AJI sera d'abord évoquée (elles représentent 40 % des causes des uvéites antérieures de l'enfant) et le bilan comportera un dosage des anticorps antinucléaires, FAN positifs.
Uvéites antérieures granulomateuses
On parle d'uvéites antérieures granulomateuses lorsqu'il existe des précipités rétrocornéens granulomateux.
Les formes unilatérales évoquent plus particulièrement une étiologie infectieuse et notamment herpétique, une hétérochromie de Fuchs, une sarcoïdose. L'examen attentif de l'iris est nécessaire à la recherche de nodules iriens évocateurs d'une tuberculose ou d'une sarcoïdose. Situés dans le stroma, ce sont des nodules de Koeppe (évocateurs d'une sarcoïdose) ; au niveau de la collerette irienne, ils prennent le nom de nodules de Busacca. Une hétérochromie irienne fait d'abord penser à un Fuchs, des synéchies postérieures à une atteinte herpétique. Les uvéites herpétiques sont classiquement hypertensives et synéchiantes, associées à une kératite stromale avec une atrophie irienne en secteur et quelquefois un tyndall hématique.
Les formes bilatérales évoquent une sarcoïdose, une tuberculose, des trépanomatoses (syphilis), des infections virales (Htlv, surtout aux Antilles) ou parasitaires.
Complications
Les complications peuvent siéger dans la région maculaire avec des lésions responsables d'une baisse d'acuité visuelle comme un oedème chronique, une membrane épimaculaire, des plis rétiniens. Une cataracte, une hypo- ou une hypertonie oculaire, une kératopathie en bandelette sont aussi des complications éventuelles, sans oublier les synéchies postérieures entraînant une hypertension oculaire et une sécclusion pupillaire. Il faudra par ailleurs se montrer vigilant sur une hypertonie oculaire secondaire aux corticoïdes en collyre.
Ainsi, devant toute uvéite antérieure, le premier bilan est orienté par l'interrogatoire et les signes cliniques oculaires. Si ce premier bilan se révèle négatif, et en présence de récidive ou d'un passage à la chronicité, un bilan plus approfondi est pratiqué. La collaboration avec un médecin interniste est particulièrement judicieuse afin d'orienter le diagnostic étiologique et, donc, la décision thérapeutique.
Communications des Drs G. Ducos de Lahitte, C. Fardeau, L. Kodjikian et du Pr P. Le Hoang lors du 113e Congrès de la SFO.
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