L’AUGMENTATION du C n’était pas au pied du sapin, mais les médecins espèrent du moins qu’elle n’interviendra pas à Pâques ou à la Trinité.
La séance de retrouvailles entre l’Union nationale des caisses d’assurance-maladie (Uncam) et les syndicats signataires de la convention (Csmf, SML et Alliance), qui s’est tenue le 21 décembre pendant cinq heures, a permis de mesurer la contrainte financière qui pèse sur ce nouveau round de négociations tarifaires dont la prochaine séance a été programmée le 18 janvier. Une négociation qui s’annonce également très politique, à moins de quatre mois du premier tour de l’élection présidentielle.
De l’avis général, aucune décision majeure (en particulier sur le C) ne sera prise sans l’aval direct du gouvernement.
A cet égard, le bilan prévisionnel de la maîtrise médicalisée pour 2006, qui a été dévoilé par la Cnam aux syndicats médicaux (voir tableau ci-contre), est une arme à double tranchant.
D’un côté, il confirme l’ampleur des efforts réalisés l’an passé par les libéraux (601 millions d’euros d’économies en 2006 grâce au respect des engagements de diminution des prescriptions de médicaments et des arrêts de travail) ; de l’autre, cet état des lieux montre que le contrat inscrit dans l’avenant n° 12 à la convention n’est pas respecté en totalité mais seulement aux trois quarts, le poste des ALD (notamment le respect des règles du bizone) constituant le maillon faible.
Durcissement.
Le directeur de la Cnam, Frédéric Van Roekeghem, n’a pas manqué de souligner que la tendance était encourageante, mais que les médecins pouvaient faire encore mieux. Dans un entretien avec « les Echos » daté du 21 décembre, le patron de l’assurance-maladie annonçait déjà qu’il demanderait aux médecins «des propositions permettant d’accélérer les résultats de la maîtrise médicalisée en 2007, notamment sur les ALD, afin de dégager des marges de manoeuvre qui sont extrêmement faibles aujourd’hui».
Même si la Csmf explique que les médecins libéraux ont tenu leurs engagementsen 2006 (si l’on prend en compte le poids des prescriptions venant de l’hôpital et facturées sur le compte des soins de ville), la négociation sur le rythme de la hausse de la consultation en 2007 risque de se durcir. D’autant que le budget des soins de ville voté par le Parlement pour 2007 (+ 1,1 %) n’autorise guère de fantaisies (compte tenu notamment de l’effet report).
De son côté, le ministre de la Santé appelle, dans nos colonnes, les partenaires à «aboutir» sur le C = CS en 2007 (« le Quotidien » du 21 décembre), en se gardant de préciser les étapes de cette convergence tarifaire.
Le directeur de l’assurance-maladie, qui négocie également avec les professions paramédicales, ne manquera pas de rappeler qu’il reste sous la menace d’un déclenchement du comité d’alerte sur les dépenses maladie en juin prochain (un euro supplémentaire sur le C coûte 220 millions d’euros en année pleine à la Sécu). Dès lors, la revendication de la Csmf et du SML d’obtenir immédiatement (janvier ou février) une première augmentation de un euro (à 22 euros), puis le C à 23 euros au deuxième semestre, risque de se heurter à la volonté de la caisse de gagner du temps.
Mais la fenêtre de revalorisation est étroite politiquement : pour beaucoup, il serait suspect d’augmenter la consultation de médecine générale juste avant les échéances électorales.
«Toute la difficulté de la Cnam et du gouvernement est de justifier, notamment aux yeux des assurés, une augmentation rapide de la consultation, qui peut apparaître comme un cadeau électoral aux médecins, surtout si les objectifs d’économies ne sont pas totalement respectés», résume un chef de file syndical.
Les représentants de la profession devraient insister sur la modération des volumes d’actes depuis quelques mois, «preuve» selon eux que la course aux actes est enrayée lorsque les honoraires progressent.
Installation : la caisse renonce aux mesures pénalisantes.
En attendant le plat de résistance sur le C (qui conditionnera aussi le C2), l’assurance-maladie et les syndicats ont balisé le terrain des dossiers que Xavier Bertrand a demandé de régler en priorité.
Les partenaires ont avancé sur la démographie : la caisse a accepté de renoncer – du moins pendant quelques années – aux dispositions pénalisantesenvisagées initialement dans les zones surmédicalisées (non-prise en charge d’une partie des cotisations sociales) et qui avaient provoqué un tollé. Un «observatoire conventionnel de la démographie médicale» devra vérifier l’impact des mesures incitatives à l’installation dans les zones déficitaires (dont la future majoration de 20 % des honoraires dans les cabinets de groupe promise par Xavier Bertrand) ainsi que l’évolution de la situation dans les zones excédentaires. Mais la cartographie des zones éligibles aux aides se fait attendre et il faudra aussi préciser les cabinets qui bénéficieront des actes majorés ; sur ce point, la caisse a une approche plus restrictive que les syndicats.
Deuxième dossier : les modalités de la convergence des dispositifs du médecin référent et du médecin traitant. Elles se précisent. La Cnam a proposé un «lissage» sur trois ou quatre ans des pertes de revenus des médecins référents (différence entre les contrats et les forfaits ALD) qui prendrait la forme d’une aide financière individualisée dégressive à négocier (par exemple 100 % la première année, 75 % la deuxième, etc.). La possibilité de signer un nouveau contrat individuel de santé publique serait ouverte à tous les généralistes. Pour l’Amedref (Association nationale des médecins référents), cette compensation «ne résoudra pas le problème de la charge de travail ni de l’organisation des cabinets et risque de contraindre les médecins à faire davantage d’actes».
Sur le troisième dossier prioritaire, la mise en place du secteur optionnel avec dépassements encadrés, la négociation reprendra le 10 janvier avec une réunion tripartite (assurance-maladie, médecins et complémentaires). Le ministre de la Santé ne relâche pas la pression : après l’annulation par le conseil constitutionnel de l’article de la loi Sécu 2007 permettant de créer ce secteur tarifaire par arrêté en cas d’échec des négociations (« le Quotidien » du 18 décembre), Xavier Bertrand a aussitôt fait adopter la même disposition… dans le cadre de l’examen au Sénat d’un projet de loi sur les professions de santé. A défaut d’un accord conventionnel «un mois après l’entrée en vigueur de la présente loi», le gouvernement pourra autoriser certaines spécialités à pratiquer des dépassements encadrés pour une partie de leur activité.
Rappelons enfin que les partenaires conventionnels ont conclu au pas de charge un protocole sur l’accès aux soins des bénéficiaires de la CMU complémentaire (lire page 9). L’assurance-maladie s’est engagée à garantir aux professionnels qui assurent la dispense d’avance des frais un remboursement rapide des actes effectués.
Bilan 2006 (en millions d'euros) (prévisions sur la base des données fin octobre) | ||||
OBJECTIFS DE LA MAÎTRISE MÉDICALISÉE | PRÉVISION FIN 2006 | |||
Taux d' évolution annuel des dépenses | Montant d' économies attendu | Taux d' évolution | Montants d' économies | |
Arrêts de travail | 1 % | 190 | 2,2 % | 277 |
Total médicaments | 222 | 244 | ||
Antibiotiques | 10 % | 63 | 8,2 % | 52 |
Statines | 0 % | 93 | 3,4 % | 132 |
Psychotropes | 5 % | 13 | 7,2 % | 22 |
IPP | 2 % | 28 | 0,3 % | 13 |
Génériques | 126 | 126 | ||
Génériques (doubles comptes) | 101 | 101 | ||
ALD (PS libéraux) | 4 points | 292 | 1,1 point | 80 |
AcBUS (antiagrégants plaquettaires, coloscopie après polypectomie) | 49 | 0 | ||
Transports sanitaires | 38 | 0 | ||
Total | 791 | 601 |
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