LE BENZNIDAZOLE, traitement habituellement utilisé à la phase aiguë d'infection par Trypanosoma cruzi, le protozoaire à l'origine de la maladie de Chagas, pourrait être utilisé à la phase chronique. Il permettrait une élimination parasitaire totale et une restauration des fonctions immunitaires des lymphocytes.
Actuellement, lorsque la maladie évolue au long cours, pendant une période qui peut aller jusqu'à dix ans, le traitement utilisé a exclusivement pour objet de contrôler les manifestations cliniques cardiaques ou abdominales. Les traitements antiparasitaires étaient jusqu'à présent considérés comme inefficaces pour faire disparaître la parasitémie. Leurs effets secondaires limitaient leur utilisation.
L'équipe du Dr Juan Bustamente (Atlanta) a analysé l'effet sur le système immunitaire du traitement antiparasitaire habituellement utilisé à la phase aiguë, le benznidazole. Des souris infectées ont été traitées selon deux schémas thérapeutiques à distance de l'infection initiale : pendant 20 jours, à raison de deux prises par jour, ou pendant 40 jours, à raison d'une prise par jour. La recherche d'une parasitémie à l'issue des deux types de traitements a été négative et l'analyse histopathologique musculaire n'a pas mis en évidence d'ADN parasitaire au sein des muscles striés, sanctuaire habituel du parasite à la phase chronique.
Jusqu'à 300 jours après la fin du traitement.
Les auteurs ont ensuite analysé les capacités de restauration des fonctions immunitaires lymphocytaires chez les souris guéries. Jusqu'à 300 jours après la fin du traitement, soit 460 jours après l'infection, il persiste une population de lymphocytes CD8+ dotés des caractéristiques des cellules mémoires centrales : expression de CD62L, CCR7, CD127, CD122 et Bcl-2. Par ailleurs, des cellules mémoires spécifiques de Trypanosoma cruzi étaient détectées dans le sang et leur phénotype était modifié par rapport aux mêmes cellules avant utilisation du benznidazole. Cela constitue un signe objectif indiquant que le traitement permet une adaptation des capacités immunitaires spécifiquement dirigées contre le parasite.
Lorsque les lymphocytes CD8+ sont injectés chez une souris naïve soumise à une contamination parasitaire, aucune infection chronique ne se développe, signe de l'efficacité de ces cellules à lutter contre l'infection. Les auteurs ont procédé à des traitements dans des délais variables par rapport à l'infection et le benznidazole restait efficace même s'il était instauré 240 jours après l'infection.
Enfin, les souris considérées comme guéries rendues secondairement immunodéprimées, comme c'est le cas lorsqu'une greffe cardiaque est réalisée en raison des complications de la maladie de Chagas, peuvent lutter efficacement contre une réinfection par le parasite.
Pour le Dr Bustamente, ce travail montre qu'il est possible de restaurer une immunité efficace et spécifique à la phase chronique de la maladie ; la détection de CD8+ CD62L, CCR7, CD127, CD122 et Bcl-2 pourrait constituer un test d'efficacité médicamenteuse pour l'évaluation d'autres traitements.
« Nature Medicine », édition avancée en ligne.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature