Mis en place en 2000 par le CNRS avec l'aide financière des industriels et des professionnels de la prothèse auditive, le groupement de recherche (GDR) sur les prothèses auditives achève aujourd'hui ses travaux.
Le dessein de cette recherche, dirigée par le Pr Lionel Collet et qui a associé cinq laboratoires du CNRS, était de caractériser et d'étudier chez les malentendants appareillés l'évolution des performances auditives, de la compréhension, de la mémoire, de l'attention ainsi que les modifications psychopathologiques.
Lors de la création de ce GDR, le taux d'appareillage en France était de 1 appareil pour 319 personnes, contre 1 appareil pour 120 personnes, en moyenne, en Europe (on compte environ 5 millions de personnes souffrant de surdité en France). Les premiers résultats exposés par le GDR montrent combien ce retard français, qui persiste malgré le remboursement - encore trop faible - de l'appareillage de la seconde oreille, est dommageable.
En ce qui concerne les conséquences fonctionnelles cérébrales de la réhabilitation auditive par une prothèse auditive, le GDR a montré, grâce à une série d'études longitudinales conduites avant et après appareillage auditif, une tendance à la normalisation des performances de sonie, de discrimination d'intensité, de discrimination fréquentielle et temporelle. « Cette amélioration des performances, retrouvée chez les sujets les plus âgés - plus de 80 ans -, constitue un argument majeur en faveur d'une plasticité cérébrale fonctionnelle de réhabilitation auditive liée au port de la prothèse auditive », commente le Pr Lionel Collet. La nécessité d'appareiller le malentendant le plus précocement possible, et de manière binaurale, s'il le faut, est donc indiscutable.
Le GDR montre, en outre, que l'appareillage est susceptible d'agir sur les capacités mnésiques en général en réduisant, voire en supprimant, les déficits mnésiques engendrés par le déficit auditif. Grâce à une étude transversale, faite à partir de tests mnésiques visuels (une liste de mots) et comparant des patients appareillés à des patients non appareillés, les chercheurs ont en effet observé que le besoin d'aide à la récupération mnésique était moins important chez les premiers que chez les seconds. Une étude longitudinale, comparant les mêmes patients avant appareillage et après huit mois d'appareillage, renforce les résultats : il apparaît que les performances de rappel libre et de reconnaissance des patients après appareillage sont supérieures à celles qu'ils avaient obtenues avant la compensation de leur déficit auditif.
L'humeur améliorée
Enfin, concernant les conséquences psychopathologiques, une étude épidémiologique, réalisée sur plus de 300 sujets malentendants candidats à la prothèse auditive, avant appareillage, a permis de mettre en évidence plusieurs points. Premièrement, il existe bien une symptomatologie psychopathologique chez les malentendants, qui consiste, plutôt qu'en de réels troubles anxieux ou dépressifs, en une perturbation de l'humeur associant anxiété, tristesse et démotivation. On peut remarquer également la présence d'une hypersensibilité émotionnelle au bruit, mais aussi à la lumière et aux odeurs. Ces deux syndromes de perturbation de l'humeur et d'hypersensibilité se trouvent très améliorés après six mois de port d'une prothèse auditive.
Globalement, les résultats du GDR, qui invitent à poursuivre des travaux dans le domaine clinique, montrent que le port d'une prothèse auditive est positif à la fois sur les capacités perceptives, mnésiques et psychopathologiques. Reste à espérer, en ces temps budgétaires difficiles, que les pouvoirs publics prennent l'engagement d'un remboursement plus conséquent des prothèses auditives. La prothèse auditive n'est pas un appareil de confort.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature