Dans les bras de Morphée

Le bâillement, un réflexe archaïque qui stimule la vigilance

Publié le 11/06/2003
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Le temps de la médecine

A l'exception de la girafe, tous les vertébrés bâillent : des reptiles jusqu'aux mammifères, en passant par les oiseaux et les poissons. Si la girafe ne bâille pas, c'est probablement parce qu'elle ne dort pratiquement pas. Car nous bâillons principalement le matin au réveil et le soir à l'approche de l'endormissement.

Les activités répétitives et monotones favorisent l'apparition des bâillements. Le confinement, la chaleur excessive, le jeûne mais aussi la suralimentation et l'alcoolisation sont d'autres facteurs qui majorent la fréquence des bâillements.
Depuis l'Antiquité, scientifiques et médecins tentent d'attribuer un rôle physiologique au bâillement. Toutes les théories ventilatoires et circulatoires proposées depuis Hippocrate jusqu'au milieu du XXe siècle ont été démenties. Selon l'hypothèse actuelle la plus plausible, le bâillement serait un réflexe intervenant dans le maintien de notre niveau de vigilance, une sorte de signal d'alarme ayant pour fonction de nous indiquer qu'il est temps de nous réveiller ou d'aller nous coucher. L'hypotonie musculaire secondaire au sommeil paradoxal en fin de nuit et les modifications de tonus musculaire liées à la fatigue ou à l'ennui seraient le facteur déclenchant du réflexe de bâillement.
Un bâillement est constitué par un cycle respiratoire paroxystique de 5 à 10 secondes mettant en jeu un nombre de muscles très important. Les bâillements surviennent souvent par salves de deux ou trois cycles et s'accompagnent de mouvements d'étirement du tronc en hyperlordose et, chez les bipèdes, d'étirement des membres en hyperextension. Leur survenue, comme celle de tous les réflexes, est involontaire. Une fois enclenché, le phénomène peut être modulé par notre volonté, mais il ne pourra jamais être stoppé.
S'il n'a jamais pu être identifié une structure cérébrale précise pouvant constituer un centre du bâillement, un nombre important de données laissent penser que ce réflexe fait intervenir l'hypothalamus et les régions bulbaires et pontiques.

Contagieux

Une des caractéristiques les plus intrigantes du bâillement est sa contagiosité : si un membre du groupe se met à bâiller, le réflexe va se propager, telle une maladie infectieuse, à la majorité des personnes présentes. Cette transmission commence de manière involontaire, mais elle intervient uniquement si le niveau de vigilance des contaminés est assez bas pour leur permettre de bâiller : vous n'arriverez jamais à déclencher un bâillement chez une personne impliquée dans une tâche intellectuelle soutenue. Comment cette contagion se déclenche-t-elle ? La vue semble être un facteur simulant important, mais pas essentiel puisque les aveugles sont aussi susceptibles à la contagiosité du bâillement. C'est la perception générale, même involontaire, d'un bâilleur qui va déclencher le réflexe chez un individu placé dans une situation propice au bâillement.

Pour en savoir plus : www.baillement.com.

Un congrès à Paris en novembre

Le XVIIIe Congrès de la Société française de recherche sur le sommeil se déroulera du 13 au 15 novembre à Paris (Sofitel Rive gauche). Parmi les thèmes retenus : obésité et sommeil, entre veille et sommeil : états dissociés, apnées du sommeil et maladies cardio-vasculaires, cognition et sommeil...
Secrétariat scientifique : Congrès sommeil, 91, bd de l'Hôpital, 75634 Paris Cedex 13, e-mail : sommeil@ext.jussieu.fr. Renseignements et inscriptions : www.b-c-a.fr/sommeil 2003.

Elodie BIET

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7351