AU STADE de la cirrhose hépatique liée à l'abus d'alcool, la poursuite de l'imprégnation éthylique est associée à une accélération de la dégradation de la fonction hépatique et à une forte mortalité. Parvenir à sevrer les malades est un objectif important, mais difficile. Les produits qui réduisent l'envie de consommer de l'alcool sont en règle générale à métabolisme hépatique. Les individus porteurs d'une cirrhose hépatique sont exclus des essais de ces agents largement métabolisés par le foie, en raison des dommages hépatiques potentiels qu'ils risquent de produire. La naltrexone par exemple est contre-indiquée chez les personnes ayant une maladie hépatique. Un autre exemple, le topiramate risque d'induire une hyperammoniémie. L'acamprosate n'a pas fait l'objet d'essais chez des cirrhotiques.
L'utilisation possible du baclofène apparaît comme une bonne nouvelle dans ce domaine.
Le baclofène est un agoniste des récepteurs GABA*. Des observations préliminaires ont indiqué qu'il réduit l'envie (craving), la consommation effective d'alcool et améliore l'abstinence chez les personnes alcoolodépendantes.
Le baclofène est peu métabolisé par le foie (15 %), mais principalement par le rein, qui l'élimine. Aucun effet secondaire hépatique n'a été rapporté jusqu'ici, aussi bien chez les alcoolodépendants que dans les utilisations en neurologie.
A Rome, Giovanni Addolorato et coll. ont réalisé un essai chez 84 personnes ayant une cirrhose hépatique et une dépendance à l'alcool. Le produit a été testé comparativement au placebo pendant douze semaines.
Chez les 42 personnes qui ont eu le baclofène, 30 (71 %) ont été totalement abstinentes à la fin du traitement contre seulement 12 (29 %) du groupe placebo, soit une différence très significative (p < 0,0001, IC : 2,4-16,1).
La tolérance du produit est bonne : le nombre d'arrêts de traitement n'est pas en défaveur du baclofène (6/42 versus 13/42 pour le placebo).
Le suivi des patients a continué. Et a montré que la durée cumulée d'abstinence est multipliée par deux chez ceux qui ont eu le baclofène comparativement au placebo : 62,8 jours versus 30,8 jours (p = 0,001). Il n'y a pas eu d'effet indésirable hépatique.
Il est très important de noter avec les auteurs que «cette réduction de la prise alcoolique est associée à une réduction significative des marqueurs cliniques des dommages hépatiques: ALAT, gamma GT, bilirubine, INR. Une constatation qui, d'une part, confirme les données recueillies par auto-observation et, d'autre part, suggère que la réduction de la consommation d'alcool est suffisante pour réduire les dommages hépatiques».
« The Lancet », vol. 370, 8 décembre 2007, pp. 1915-1885. * Le Vidal précise que le baclofène est indiqué dans les contractures spastiques (de la sclérose en plaques, des affections médullaires et d'origine cérébrale).
Un récepteur pousserait à boire
Des scientifiques ont identifié un variant d'un gène qui influerait sur la consommation d'alcool. Il s'agit d'un gène impliqué dans la communication des cellules cérébrales entre elles, et qui semble exercer une influence directe sur la consommation d'alcool chez la souris. Vadaz et coll., du National Institute on Alcohol Abuse and Alcoholism (branche des NIH), ont trouvé un variant d'un gène nommé Grm7, qui code un récepteur inhibant la libération du glutamate et de différents neurotransmetteurs dans le cerveau. Il est, chez la souris, associé à une consommation plus importante d'alcool. Une tâche qui n'est pas facile, car les souris ne boivent pas spontanément d'alcool. Il reste maintenant à découvrir si un gène similaire existe chez les humains.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature