De dix à quinze ans plus tard
La méniscectomie génère souvent une arthrose fémoro-tibiale.
Enlever un ménisque multiplie de 3 à 14, selon les enquêtes, le risque de gonarthrose dix à quinze ans plus tard.
Autrefois, la méniscectomie pratiquée par arthrotomie générait beaucoup d’arthrose. L’arthroscopie, qui a permis de pratiquer des méniscectomies partielles, est malheureusement autant génératrice d’arthrose, avec cependant quelques nuances :
– la méniscectomie externe ou latérale génère davantage d’arthrose fémorotibiale externe que la méniscectomie interne ou médiale n’induit d’arthrose fémorotibiale interne. Il s’agit donc d’être le plus économe possible surtout en matière de méniscectomie latérale ; malheureusement, il y a beaucoup plus de lésions méniscales médiales que latérales, qu’elles soient dégénératives ou traumatiques ;
– la partie la plus périphérique du ménisque, celle qui s’insère sur la capsule, est faiblement vascularisée. Une déchirure à cet endroit peut être suturée, peut cicatriser et donc ne générer que peu ou pas d’arthrose. Cette intervention ne concerne malheureusement qu’un petit nombre de patients car les déchirures méniscales siègent le plus souvent dans la partie interne, non vascularisée, rendant illusoire toute tentative de cicatrisation ;
– certaines indications restent incontournables : l’accident sportif avec blocage invincible par « anse de seau » survenant chez un sportif de haut niveau qui veut pouvoir continuer son activité sportive, même au prix d’une arthrose, quinze ans plus tard.
Ménisque dégénératif
L’arthrose fémorotibiale peut être aggravée par la méniscectomie.
Problématique tout à fait différente, on peut se trouver non plus face à un ménisque traumatique, mais face à un ménisque dégénératif soit par dégénérescence naturelle, soit secondairement à une arthrose du genou et qui peut secondairement devenir traumatique.
Des IRM pratiquées sur des genoux « normaux », au-delà de la cinquantaine, c’est-à-dire chez des sujets qui ne souffrent pas, montrent un pourcentage non négligeable de ménisques dégénératifs.
Chez un patient porteur d’une gonarthrose banale, peu importante, la survenue d’un accident aigu de son arthrose est difficile à diagnostiquer : on ne sait jamais, au vu de l’IRM, si cette poussée douloureuse brutale est liée à l’arthrose, à la dégénérescence méniscale ou aux deux.
La tentation est grande, chez de tels sujets, d’opérer le ménisque.
Après une méniscectomie, on peut alors observer plusieurs types de complications :
–aggravation de l’arthrose:
• progressive : amputation de la « cale » méniscale, même de mauvaise qualité car dégénérative. Mieux vaut un mauvais ménisque dégénératif que pas de ménisque ;
• brutale : chondrolyse rapide. La perte moyenne de cartilage passe de quelques millimètres par an dans l’arthrose à 1 à 2 mm en six mois.
–On peut parfois observer une ostéonécrose du condyle qui se terminera à court terme par une prothèse du genou.
–Les épanchements à répétition sont aussi une des formes évolutives de l’arthrose – forme hydarthrodiale – pouvant survenir après une méniscectomie sous arthroscopie.
En conclusion, il faut s’abstenir au maximum de pratiquer une méniscectomie dans un contexte déjà arthrosique, dans la plupart des cas au-delà de la cinquantaine.
Conduite à tenir
Ménisque dégénératif sur petite arthrose ou lors d’un premier accident aigu chez un sujet de la soixantaine : repos – éviter les mouvements brusques – orthèse, éventuellement anti-inflammatoires ; relayer par le traitement médical de l’arthrose avec notamment renforcement musculaire.
D’après un entretien avec le Pr Bernard Mazières, CHU de Toulouse-Rangueil.
Examen clinique d’un ménisque
Le syndrome méniscal aigu est bien connu. Accident aigu, c’est la déchirure méniscale classique du sportif qui en marchant ou en s’accroupissant ne peut pas étendre la jambe ou se relever. Blocage invincible, il se distingue du faux blocage ou blocage rotulien, qui donne la même impression, mais est simplement lié à la douleur et cède au repos. On peut parfois faire céder le blocage méniscal par des mouvements de rotation du pied, mais il se reproduira.Chez le sujet de la soixantaine porteur d’une arthrose ou simplement d’un ménisque dégénératif, le tableau est moins typique : douleur brutale cédant plus facilement, se reproduisant moins systématiquement s’il évite le mouvement qui l’a déclenchée.
L’épanchement qui accompagne le syndrome méniscal est purement mécanique et se résorbe progressivement.
L’examen clinique recherche le « cri du ménisque » : sur un genou en extension, on met le doigt sur l’interligne interne ou externe et l’on fait plier le genou en maintenant la pression sur l’interligne. Le ménisque qui a tendance à partir vers l’extérieur, se plaque sur la capsule articulaire et déclenche la douleur en heurtant le doigt.
Test d’Appley : patient sur le ventre, genou plié à 90°, on empaume le talon et l’on fait une rotation-compression ; si l’on réveille la douleur en rotation externe du pied sur la face interne, c’est le ménisque interne qui est lésé ; en rotation interne du pied, on réveille la douleur sur le compartiment externe pour le ménisque externe.
L’arthrographie ou l’arthroscanner montrent les fissures, la dégénérescence du ménisque. L’IRM, examen non invasif, montre les ménisques, les ligaments croisés, mais l’examen clinique prime sur une IRM, qui a de fortes chances de montrer des lésions méniscales chez de nombreux sujets.
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