De notre envoyée spéciale
à Vienne
L'administration d'un traitement antiagrégant plaquettaire est indiquée après une intervention de revascularisation coronaire percutanée. Par ailleurs, une méta-analyse des essais randomisés en prévention secondaire et primaire a montré le bénéfice des statines sur le risque d'infarctus du myocarde, d'AVC et de mort cardio-vasculaire (« JAMA », 1997 ; 278 : 1660-1661).
Récemment un essai chez des patients ayant une vascularisation coronaire percutanée a montré que les statines diminuaient l'incidence des événements coronaires majeurs, et, cela, tous particulièrement chez les diabétiques (« JAMA », 2002 ; 287 : 3 215-3 222).
Toutefois, un travail ( ex vivo) a suggéré que les statines métabolisées par le cytochrome P450 3A4 (CYP3A4) comme l'atorvastatine diminuaient l'activité antiagrégante du clopidogrel, en réduisant la transformation de ce médicament en son métabolite actif (« Circulation », 2003 ; 107 ; 32-37). Mais l'impact clinique de cette interaction n'avait pas encore été évalué. C'est ce que s'est proposé de faire l'étude CREDO (article accepté le 8 juillet 2003 dans « Circulation ») dont les résultats ont été présentés au congrès de l'ESC.
L'efficacité conservée du clopidogrel
Il s'agit d'un essai en double aveugle, comparant un traitement par clopidogrel contre placebo, chez des coronariens qui subissaient une revascularisation coronaire per-cutanée ; un groupe de patients recevaient un prétraitement (300 mg) puis 75 mg/jour de clopidogrel pendant un an ; le second groupe n'avait pas de prétraitement, recevait 75 mg/j de clopidogrel pendant un mois, puis un placebo pendant les onze mois suivants. Tous les patients étaient sous aspirine. Les critères principaux de l'étude était la mortalité, la survenue d'un infarctus du myocarde ou d'un AVC pendant un an. Une sous-analyse de l'étude évaluait l'efficacité de l'antiagrégant chez les patients, en fonction du type de statine qu'ils recevaient : celles dont le métabolisme implique le CYP3A4 (atorvastatine, lovastatine, simvastatine) et celles sans intervention du CYP3A4 (pravastatine, fluvastatine).
Parmi les 2 116 patients inclus dans CREDO, 55,4 % recevaient une statine : 1 001 du groupe de celles métabolisées par le CYP3A4 et 158 de l'autre groupe.
D'une façon générale, l'étude CREDO a montré une réduction significative des événements ischémiques (décès, infarctus myocardique et AVC) dans le groupe clopidogrel comparé au groupe placebo (8,5 % vs 11,5 %, RR 26,9 %, p = 0,025). Le bénéfice du traitement antiagrégant était net, indépendamment du type de statine utilisé : dans le groupe CYP3A4 (7,59 % dans le groupe traité vs 11,77 % dans le groupe placebo, réduction de 36,4 %, p = 0,03), dans l'autre groupe (5,36 % dans le groupe traitement, 13,61 % dans le groupe contrôle, réduction de 60,6 % p = 0,11).
Par ailleurs, l'essai « INTERACT » (INTERACTions of atorvastatine and clopidogrel therapy - « Circulation », 2003 ; 107 : 1 568-1 569) se proposait de mesurer l'agrégabilité plaquettaire (grâce à une batterie de tests) chez 75 patients qui venaient de bénéficier de la pose d'un stent coronaire ; ces derniers avaient eu 325 mg/j d'aspirine pendant une semaine et 300 mg de clopidogrel avant l'intervention. Les patients étaient randomisés et recevaient, trente jours avant la pose du stent, soit l'atorvastatine (10-80 mg) soit une autre statine, soit pas de statine.
Une mesure objective de l'effet antiagrégant
La batterie de tests plaquettaires était réalisée au départ de l'étude, 4 heures et 24 heures après l'intervention.
Les résultats étaient les suivants : à la première mesure (avant l'antiagrégant), l'activité plaquettaire était plus basse dans les deux groupes statine que dans le groupe sans statine. A 4 heures et 24 heures après l'intervention, tous les patients avaient eu 300 mg de clopidogrel et l'agrégabilité plaquettaire était diminuée dans tous les groupes, mais il n'y avait pas de différence significative entre le groupe atorvastatine, le groupe autres statines et le groupe sans statine.
Les auteurs concluent que les statines en général et l'atorvastatine en particulier, n'affectent pas l'activité antiagrégante du clopidogrel. Les paramètres de l'inhibition plaquettaire étaient quasiment identiques chez les patients recevant l'atorvastatine, une autre statine ou pas de statine. Ce travail suggère en outre que les statines pourraient inhiber les plaquettes par un mécanisme direct et inconnu, probablement lié au clivage d'une alpha-thrombine par les récepteurs PAR-1. Cette hypothèse doit encore être validée.
Congrès de l'ESC. D'après la communication de V. L. Serebruany (Miami, Etats-Unis) et le poster présentant la sous-analyse de l'étude CREDO de J. Saw et al. (Cleveland, Caroline du Nord, Etats-Unis).
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