De notre correspondante
à New York
Chaque année, dans les pays occidentaux, environ 2 personnes sur 1 000 sont atteintes de thromboembolie veineuse. Si d'importants progrès ont été faits en diagnostic et en traitement, de nombreuses questions demeurent sur sa pathogenèse.
Des facteurs de risque héréditaires ou acquis (cancer, chirurgie, immobilisation, fractures, paralysie, accouchement, estrogénothérapie) sont identifiés chez une bonne part des patients, mais dans quelque 30 %, elle reste inexpliquée.
Facteurs de la coagulation activés
L'athérosclérose pourrait-elle être associée à un risque accru de thrombose veineuse ? C'est la question que s'est posée une équipe de médecins italiens et hollandais. En effet, l'athérosclérose est associée à une activation des plaquettes et de la coagulation, ainsi qu'à une augmentation du turnover de la fibrine. Si ces facteurs de la coagulation activés apparaissent dans le débit lent de la circulation veineuse, cet état prothrombotique pourrait favoriser la survenue de thrombose veineuse.
Pour répondre à cette question, l'équipe dirigée par le Dr Prandoni, de l'université de Padoue (Italie), a conduit une étude cas-témoin. Leur objectif, comparer le nombre de plaques d'athérome carotidiennes, visualisées à l'échographie, dans trois groupes de patients : l'un avec une thrombose veineuse profonde (TVP) spontanée ; un autre avec une thrombose veineuse profonde secondaire à des facteurs de risque acquis ; un dernier, indemne de thrombose servant de témoin.
L'étude porte sur tous les patients (n = 378) avec TVP des membres inférieurs admis à l'hôpital universitaire de Padoue entre 1996 et 2001. Ont été exclus ceux qui avaient un antécédent de thromboembolie veineuse, ou présentaient une athérosclérose symptomatique.
Sur les 299 sujets restants, 153 avaient une TVP spontanée et 146 une TVP secondaire. Une échographie carotidienne a été effectuée à l'insu des données cliniques du patient.
La détection d'une ou de plusieurs plaques carotidiennes est nettement plus fréquente chez les patients avec thrombose inexpliquée (47 %) que dans le groupe des patients avec thrombose secondaire (27 %) ou dans le groupe témoin (32 %).
Un risque 2,3 fois plus élevé
Cette association persiste après ajustement pour les divers facteurs de risque d'athérosclérose et pour les anomalies thrombophiliques recherchées chez la moitié des patients (hyperhomocystéinémie, facteur V de Leiden, et anticoagulant lupique). Ainsi, le risque ajusté d'athérosclérose carotidienne chez les patients avec TVP spontanée est 2,3 fois plus élevé qu'en cas de TVP secondaire. L'association est encore plus marquée chez les sujets âgés (avec un risque ajusté égal à 3 chez les plus de 60 ans, qui passe à 4 chez les plus de 70 ans).
« Bien que nos résultats n'apportent pas la preuve d'un rôle causal de l'athérosclérose dans la thromboembolie veineuse, ils suggèrent l'existence d'un lien entre les troubles artériels et les troubles veineux », concluent les auteurs. « Cela ouvre d'importantes voies nouvelles pour les futures rechercheset soulève la possibilité d'interventions préventives par les statines et les agents antiplaquettaires. »
Deux études récentes ont montré que les statines réduisent le risque de thromboembolie veineuse. Cela pourrait être expliqué par leur capacité à améliorer la fonction endothéliale et prévenir le développement et la déstabilisation des lésions athéroscléreuses.
« New England Journal of Medicine », 10 avril 2003, p. 1435.
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