LE RANELATE DE STRONTIUM a bénéficié d'un développement préclinique et d'essais cliniques rigoureux, conduits selon les grandes règles des essais internationaux. Sur le plan préclinique, les études menées in vitro et in vivo chez des rats et des souris ont permis de vérifier que le ranélate de strontium stimule bien l'activité ostéoblastique, qu'il a une activité antirésorptive, qu'il améliore les propriétés biomécaniques de l'os (par des tests biomécaniques) et qu'il n'altère pas la minéralisation. Comme le souligne le Pr P.-J. Meunier, principal investigateur de la première étude de phase II (1), « il fallait ensuite déterminer la dose à administrer ». Pour ce faire, une étude multicentrique « dose-réponse », baptisée Stratos, a été menée pendant deux ans chez 353 femmes présentant une ostéoporose. Elle a permis de montrer que le ranélate de strontium doit être utilisé à la dose de 2 g/j, plus efficace que celles de 1 g ou 0,50 g. La dose de 2 g/j permet en effet d'obtenir une augmentation assez spectaculaire de la densité minérale osseuse (DMO) lombaire (14,6 % en deux ans). En outre, bien que l'étude de phase II n'était pas conçue pour évaluer un éventuel effet antifracturaire, elle a montré une réduction de 44 % du nombre de patientes ayant présenté une nouvelle déformation vertébrale au cours de la deuxième année de traitement.
Un agent découplant.
Après les agents antirésorptifs (bisphosphonates, raloxifène, estrogènes), qui diminuent la résorption osseuse et visent à préserver l'os d'une destruction future, mais qui diminuent aussi l'activité ostéoblastique (formation et destruction osseuses étant couplées), après les agents proformateurs (teriparatide), qui stimulent sélectivement l'activité ostéoblastique et favorisent ainsi la reconstruction de l'os, le ranélate de strontium implique un troisième mécanisme d'action : il stimule l'activité ostéoblastique tout en ayant une activité antirésorptive. Il s'agit donc d'un agent découplant, qui se traduit par des signes biologiques, notamment une augmentation des phosphatases alcalines osseuses (témoins de la formation osseuse) et une baisse des NTX (N-télopeptides de liaison du collagène) urinaires (témoins de la résorption ostéoblastique).
Un autre intérêt du ranélate de strontium est de pouvoir être dosé dans le sang.
Un effet antifracturaire vertébral démontré.
Des études de phase III de grande envergure (études Soti et Tropos) visaient à démontrer l'effet antifracturaire vertébral du produit. L'étude Soti (2), analysée statistiquement en intention de traiter, a été conduite pendant trois ans dans 12 pays (hormis les Etats-Unis) et dans 75 centres. Elle porte sur 1 649 femmes ménopausées âgées de 69-70 ans ayant une ostéoporose assez sévère : au moins une fracture vertébrale à l'entrée dans l'étude et une DMO lombaire basse à l'ostéodensitométrie. Le critère de jugement principal était l'incidence des nouvelles fractures vertébrales pendant l'étude.
« On a constaté que, sur trois ans, le ranélate de strontium avait réduit le risque de nouvelles fractures vertébrales radiologiques de 41 % », commente le Pr P.-J. Meunier, mais cette réduction a atteint 49 % dès la première année, ce qui témoigne d'un effet antifracturaire précoce. En outre, le risque de nouvelle fracture vertébrale à expression clinique (se traduisant soit par une douleur, soit par une perte de taille supérieure à 1 cm) a baissé de 38 % du risque sur trois ans et de 52 % au cours de la première année.
Dans la deuxième grande étude Tropos, menée sur 5 091 femmes ostéoporotiques âgées de plus de 74 ans et analysées en intention de traiter, le critère d'évaluation principal était les nouvelles fractures périphériques (poignet, hanche, jambe, épaule), et non les tassements vertébraux. Les premiers résultats (en cours de publication) semblent tout à fait intéressants en termes de réduction du risque fracturaire sur l'ensemble des fractures périphériques et des fractures de hanche dans un groupe à haut risque. La tolérance de Protélos se révèle satisfaisante, notamment au niveau gastro-œsophagien, avec quelques rares cas de diarrhée (6 %), qui s'amendent après trois mois de traitement. Enfin, cet important travail mené sur la ranélate de strontium se poursuit encore puisque l'analyse statistique publiée jusqu'à trois ans va bénéficier de deux années supplémentaires.
D'après un entretien avec le Pr Pierre-Jean Meunier, faculté de médecine Laennec, Inserm U403, Lyon.
(1) « J Clin Endocrinol Metab » 2002 ; 87 : 2060-2066.
(2) « N Engl J Med » 2004 ; 350 (5) : 451.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature