LA DéCOUVERTE d’un cancer du sein et les différentes phases de traitement représentent une lourde épreuve pour la femme et son entourage. Comme l’a rappelé le Dr Daniel Serin (institut Sainte-Catherine, Avignon), en 1998, lors des premiers états généraux de la Ligue contre le cancer, les malades avaient émis une revendication qui avait fortement interpellé les soignants et qui les avaient fait réfléchir : «Donnez-nous des médecins plus humains», avaient-ils déclaré. «Les patients réclament des soins de qualité, accessibles à tous, et une prise en compte du malade dans sa globalité, c’est-à-dire comme un être souffrant», a confirmé le Dr Serin. C’est dans ce contexte que s’est développée une nouvelle discipline – la psycho-oncologie –, qui s’intéresse aux conséquences psychologiques de la traversée du cancer par les malades, leur entourage et les soignants.
Ses objectifs : déceler les souffrances, aider les patients et leurs proches et aider les soignants. Une formation psychiatrique est nécessaire pour assumer ces tâches, ainsi qu’une bonne connaissance des problèmes spécifiques à l’oncologie.
Réconcilier la femme avec son sein malade.
«Vingt pour cent des malades ont besoin, à un moment ou un autre du parcours, d’un soutien psychologique; ce sera parfois après la fin du traitement, quand la prise en charge se relâche», a indiqué le Dr Serin. Le chirurgien, le chimiothérapeute, le radiothérapeute ou le médecin généraliste doivent savoir repérer le problème et passer la main au psycho-oncologue.
Une des difficultés le plus fréquemment rencontrées par la femme après un cancer du sein concerne sa vie sexuelle. «La femme doit se réconcilier avec son image et en particulier avec son sein malade», a expliqué le Dr Marie Veluire (sexologue). «Il faut qu’elle accepte de le toucher, de l’enduire de crème, de le caresser. Il faut que ce sein malade reste partie intégrante de son corps, qu’il ne devienne pas un objet étranger.»
Les difficultés seront variables en fonction de la valeur érogène qu’avait la poitrine avant l’intervention, tant pour la patiente que pour son partenaire. «Le désir est difficilement compatible avec une maladie mortifère, surtout quand celle-ci touche un organe emblématique de la féminité et que, en plus, la patiente perd ses che-veux», dit encore le Dr Veluire. «Il est donc bien normal que, pendant les traitements, la vie sexuelle soit en sommeil. Mais un an après la “guérison”, bien des couples n’ont pas encore retrouvé une vie sexuelle satisfaisante.»
Pour aider ces femmes, il faut : évaluer leur fonctionnement sexuel et le lien conjugal, dépister les fausses croyances, les encourager à se toucher et à s’appuyer sur des rituels et leur dire que la rééducation existe aussi dans le domaine de la sexualité.
Le rôle des associations.
Dans l’après-cancer, les associations de patients jouent également un grand rôle. Elles permettent de ne pas se sentir isolé, de parler, de rencontrer d’autres personnes avec les mêmes difficultés, de restaurer son image grâce à des soins spécifiques. En effet, certaines, comme Etincelle*, proposent l’aide de psychologues, de diététiciens et d’esthéticiennes. La femme peut bénéficier de conseils nutritionnels, de soins de beauté, de démonstrations de coiffage de cheveux d’appoint ou d’utilisation de turbans.
Autre acteur majeur dans le dépistage, la prise en charge, l’accompagnement des patients et la recherche, la Ligue contre le cancer**, participe elle aussi à l’amélioration de la qualité de vie après le traitement. Dans ce contexte, une permanence juridique accompagne les patients dans leurs démarches vis-à-vis des banques (pour obtenir des prêts) et vis-à-vis de leur employeur pour réussir leur réinsertion professionnelle, étapes essentielles pour pouvoir à nouveau faire des projets.
1res Rencontres de l’Institut du sein.
www.etincelle.asso.fr etincelle@etincelle.asso.fr www.ligue-cancer.asso.fr
Un institut qui coordonne toute la filière de soins
Raccourcir les délais entre l’évocation du diagnostic et la prise en charge effective du cancer du sein ; proposer une filière de soins homogène où sont assurées et coordonnées toutes les étapes de la prise en charge multidisciplinaire selon des pratiques validées ; et préserver le caractère humain et personnalisé de cette prise en charge souvent très technique ; tels sont les objectifs que s’est fixés l’Institut du sein créé il y a un an à l’initiative de chirurgiens oncologues hospitalo-universitaires (anciens de l’institut Curie à Paris, du centre Antoine-Lacassagne à Nice et du centre du sein de Liège).
« En créant cet institut, nous avons souhaité offrir aux femmes la même garantie de qualité des soins en adéquation avec les standards que dans les grands centres anticancéreux, avec une prise en charge plus humaine, chaque patiente ayant un interlocuteur désigné qui coordonne tous les rendez-vous et répond à toutes les questions, indique le Dr Krishna B. Clough (ancien chef de service de chirurgie sénologique à l’institut Curie). Point important pour la femme, le délai entre le diagnostic et le premier rendez-vous n’excède pas quinze jours et celui entre l’intervention chirurgicale et le début de la chimiothérapie ou la radiothérapie n’excède pas dix jours. » L’Institut du sein coordonne toutes les étapes thérapeutiques, conformément à des protocoles bien établis. Une réunion de concertation pluridisciplinaire hebdomadaire examine les dossiers sortant des référentiels ; toutes les décisions sont prises de façon concertée.
Après un an d’existence, l’Institut du sein vient d’organiser sa première journée de formation intitulée « Cancer du sein : prise en charge des situations nouvelles ».
> Dr D. C.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature