Les études REVIVE II et SURVIVE avaient pour objectif d'évaluer l'efficacité d'un nouvel inotrope positif, le lévosimendan, dans la prise en charge de l'insuffisance cardiaque aiguë. La première suggère la possibilité d'une amélioration fonctionnelle dans une évaluation contre placebo, la seconde ne démontre pas d'effet de la survie dans une évaluation contre dobutamine.
LA NECESSITE d'utiliser des critères à la fois rigoureux et objectifs pour l'évaluation des traitements de l'insuffisance cardiaque aiguë a rendu celle-ci difficile. S'il faut en effet disposer d'études démontrant une amélioration hémodynamique (l'insuffisance cardiaque aiguë étant le prototype même d'une défaillance hémodynamique), tout en permettant l'obtention ou le maintien d'une diurèse satisfaisante, il faut aussi que cette action entraîne une diminution des symptômes, donc une amélioration clinique. En parallèle, il est nécessaire que le traitement ne diminue pas la survie. Or, peu, voire aucun traitement n'a encore démontré, selon les critères d'évaluation actuels, des capacités à améliorer l'hémodynamique, diminuer la symptomatologie et prolonger la survie. Plus encore, certains traitements améliorent l'hémodynamique sans diminuer les symptômes, d'autres atteignent ces deux objectifs mais ne prolongent pas la survie, voire parfois la diminue. Tel a été le cas, notamment, des inotropes positifs du type inhibiteurs de la phosphodiestérase (milrinone, énoximone...), largement évalués dans la fin des années 1980 et le début des années 1990. Les études effectuées avec ces molécules ont régulièrement montré une augmentation de la mortalité qui a été attribuée, pour partie, à une augmentation de la concentration calcique intracellulaire.
Une nouvelle classe.
Le levosimendan est le principal représentant d'une nouvelle classe thérapeutique, les sensibilisateurs au calcium. Cette molécule, utilisable par voie intraveineuse, pour renforcer l'inotropisme, au lieu de contribuer à majorer les concentrations calciques intracellulaires, améliore la sensibilité au calcium des protéines contractiles, notamment de la troponine C. Ainsi, la contraction myocardique est renforcée sans augmentation de la consommation d'oxygène et, théoriquement, mais aussi d'après les études cliniques disponibles, sans entraîner d'arythmies ventriculaires majeures.
Cette molécule a aussi une action sur les canaux potassiques ATP-dépendants permettant une vasodilatation, notamment coronaire.
Les études cliniques ont montré que, dans l'insuffisance cardiaque aiguë, le lévosimendan augmente l'index cardiaque (entre 35 et 40 %), diminue la pression capillaire pulmonaire, diminue les pré- et postcharge ventriculaires gauches et augmente le flux coronaire. L'effet hémodynamique est maintenu après 48 heures malgré l'arrêt du traitement. L'étude LIDO, publiée en 2002, avait montré que l'amélioration hémodynamique était supérieure à celle procurée par la dobutamine et n'était pas atténuée par l'utilisation concomitante d'un traitement bêtabloquant, contrairement à ce qui était constaté sous dobutamine.
La première étape, celle de l'amélioration hémodynamique, a donc été correctement franchie pour cette molécule. Qu'en est-il des autres étapes ? L'étude LIDO avait indiqué que le levosimendan pouvait diminuer la mortalité totale à 1 et 6 mois. Cet effet a paru confirmé à 1 jour et 2 semaines par l'étude RUSSLAN, l'autre grand essai disponible concernant cette molécule. Ainsi, les études cliniques évaluant de façon rétrospective la mortalité, de même que des paramètres cliniques combinés (mortalité et réadmission à l'hôpital) ont indiqué que le lévosimendan paraissait supérieur à la dobutamine.
L'étude REVIVE II.
L'étude REVIVE II (Randomized Multicenter Evaluation of Intravenous Levosimendan Efficacy) est un essai randomisé, qui a été effectué en double aveugle contre placebo, chez 600 patients en insuffisance cardiaque aiguë et ayant une fraction d'éjection inférieure à 35 %, afin de juger si le lévosimendan procure une amélioration clinique. Ses résultats ont été présentés par Milton Packer (Etats-Unis).
Elle a montré que, à J5, le nombre de patients fonctionnellement améliorés a été supérieur sous lévosimendan que sous placebo (19,4 vs 14,6 % ) et que moins de patients sous lévosimendan que sous placebo ont eu une altération de leur état clinique (19,4 % vs 27,2 % respectivement). Le nombre de patients sans modification de l'état fonctionnel a été identique dans les deux groupes (61 % vs 58 %). Par ailleurs, l'incidence de la mortalité à 90 jours n'a pas différé entre les deux groupes : 45 décès sous lévosimendan et 35 sous placebo. Les principaux effets secondaires ont été l'hypotension (50 % vs 36 %) et les tachycardies ventriculaires (25 % vs 17 %).
L'étude SURVIVE.
L'objectif de l'étude SURVIVE (Survival Of Patients With Acute Heart Failure In Need Of Intravenous Inotropic Support) était d'évaluer l'effet du lévosimendan, comparativement à celui de la dobutamine, sur la mortalité globale à 6 mois chez 1 327 patients hospitalisés pour insuffisance cardiaque aiguë et ayant une fraction d'éjection ventriculaire gauche inférieure à 30 %. Ses résultats ont été présentés par Alexandre Mébazaa (Paris). Ils ne montrent pas de différence significative entre les deux groupes en ce qui concerne la mortalité totale. Il y a eu plus d'accès de fibrillation auriculaire sous lévosimendan et les incidences de tachycardies ventriculaires ont été comparables.
Le lévosimendan apparaît donc comme une alternative à la dobutamine dans la prise en charge de l'insuffisance cardiaque aiguë, chez des patients dont la pression artérielle n'est pas trop basse, du fait du risque de majoration d'une hypotension par l'action vasodilatatrice. Son effet intrinsèque sur la mortalité n'est pas connu, puisque l'étude SURVIVE a été effectuée contre un comparateur actif, mais, comparativement à la dobutamine, elle ne modifie pas le pronostic.
D'après les communications de Milton Packer (University of Texas Southwestern Medical Center, Dallas) et de Alexandre Mébazaa (hôpital Lariboisière, Paris).
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