DANS LEUR TRAVAIL, Rita Piipari (Helsinki) et coll. ont mis en parallèle l'accroissement de la proportion des fumeurs avec celle de l'asthme dans les mêmes pays et ils se sont interrogés sur l'existence d'un lien, en recherchant l'apparition d'asthmes à l'âge adulte.
Pour s'assurer que les cas inclus dans l'étude correspondaient bien à des asthmes nouveaux, ils ont mené une étude cas-témoin d'un genre particulier : une population de sujets a priori sains sur le plan respiratoire ont été suivis et les cas ont été incorporés à mesure de l'apparition d'un asthme. Les asthmes antérieurs, les Bpco et les emphysèmes ont donc été éliminés dès le départ.
Sur le plan clinique, au minimum un symptôme d'asthme devait être apparu et une obstruction bronchique réversible devait être démontrée aux exportations fonctionnelles respiratoires.
Au cours des deux ans et demi qu'a duré l'étude, 521 individus de la cohorte sont devenus asthmatiques, alors que 923 sujets témoins non asthmatiques ont été sélectionnés dans la même région méridionale de Finlande.
Les individus ont fourni des renseignements précis sur leurs habitudes tabagiques : non-fumeurs, fumeurs anciens, actuels, occasionnels. Les résultats ont tenu compte de la durée cumulée du tabagisme, en calculant le produit (nombre de cigarettes fumées par jour) x (nombre d'années).
Les résultats montrent que le risque d'apparition d'un asthme est significativement augmenté chez les fumeurs. « Nous constatons cette augmentation de risque aussi bien chez les fumeurs encore actifs - + 33 % en moyenne - que chez les ex-fumeurs, pour lesquels l'accroissement est encore plus élevé : + 49 % », précise la chercheuse finlandaise.
Le paradoxe des gros fumeurs.
Le risque est dose-dépendant : il s'accroît avec le nombre de cigarettes fumées par le sujet. En revanche, on constate un fait apparemment paradoxal : la relation entre risque d'asthme de novo et le tabagisme existe pour les ex-fumeurs et les fumeurs modérés, mais non pour les gros fumeurs (plus de 15 cigarettes par jour ou plus de 200 cigarettes-années). Ce qui pourrait s'interpréter par une résistance particulière des gros fumeurs : ils ne peuvent fumer beaucoup que dans la mesure où ils n'ont pas de susceptibilité à l'asthme, le tabac étant par lui-même bronchoconstricteur.
Un risque très élevé chez les femmes.
Par ailleurs, les femmes présentent une susceptibilité beaucoup plus importante que les hommes, que ce soit au tabagisme actif ou passif. Les chiffre sont éloquents : l'augmentation du risque est de 140 % chez les femmes alors qu'elle n'est que de 34 % chez les hommes ex-fumeurs (si l'on prend comme référence les hommes n'ayant jamais fumé).
Lorsqu'on considère les femmes fumeuses ou ex-fumeuses, on voit qu'elles courent un risque d'être touchées par un asthme nouveau qui est de 138 % à 134 % plus élevé.
« Cet impact plus grand du tabagisme sur les femmes peut s'expliquer par une susceptibilité accrue face à la fumée. On a constaté que même les fumeuses courent un plus grand risque (+ 57 %) d'être touchées par un asthme nouveau, comparées aux hommes non fumeurs. Cela expliquerait les grandes différences mises en évidence dans notre étude », conclut la chercheuse finlandaise.
« European Respiratory Journal », 2004, vol. 24, n° 5.
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