Il paraît opportun de dépister systématiquement un diabète de type 2 chez les personnes souffrant d'un syndrome d'apnée du sommeil (SAS) en réclamant un dosage de la glycémie à jeun, soulignent, au terme de leur travail, Nicole Meslier, André Racineux et coll. (unité de pathologie du sommeil, département de pneumologie, CHU d'Angers). Le SAS, qui touche près de 10 % des hommes d'âge moyen, se traduit par de fréquentes pauses respiratoires pendant le sommeil. Il est assorti de troubles cardio-vasculaires parfois sévères et de problèmes diurnes de trouble de la vigilance et de l'attention.
Les cliniciens du CHU d'Angers se sont intéressés à tous les hommes ronfleurs qui leur avaient été adressés par un praticien pendant trois ans pour une suspicion de SAS. Seuls les hommes, beaucoup plus fréquemment touchés, ont été retenus pour l'étude afin d'éviter des biais.
Ces ronfleurs ont été soumis à un enregistrement polysomnographique pour identifier les pauses respiratoires d'au moins 10 secondes. Le sujet était qualifié d'apnéique au-delà de 10 pauses par heure. C'était aussi le cas en présence d'une diminution d'au moins 30 % du flux ventilatoire juste avant un réveil nocturne.
La recherche d'un diabète a été réalisée le lendemain matin : mesure de la glycémie à jeun puis deux heures après une charge en glucose (75 g de glucose).
Le critère diagnostique du diabète de type 2, selon les normes de l'OMS, consiste en un taux de glucose supérieur à 7 mmol/l à jeun ou égal à 11,1 mmol/l après la charge en glucose. Des valeurs comprises entre 7 et 11,1 mmol/l indiquent une intolérance au glucose.
Près de 700 ronfleurs ont été initialement pris en compte. L'ensemble des données a ensuite pu être recueilli chez 595 de ces sujets. Le diagnostic de SAS a été posé chez 494 personnes, qui présentaient le profil typique des apnéiques : âge moyen de 55,6 ans, surpoids avec un IMC (indice de masse corporelle) de 30,1, association fréquente avec une HTA (42 % des cas).
C'est ainsi que l'association entre SAS et les troubles du métabolisme glucidique est apparue.
Fréquence doublée
L'équipe d'Angers parvient à la conclusion que les sujets souffrant d'un SAS présentent une fréquence multipliée par 2 du diabète de type 2. En témoignent les chiffres de 30,1 % dans le groupe SAS versus 13,9 % chez les ronfleurs sans apnée. L'intolérance au glucose est accrue de presque 50 %.
La moitié des apnéiques, contre un peu plus du quart seulement des ronfleurs, présente une anomalie du métabolisme lié au diabète.
Le degré de résistance à l'insuline augmente en proportion de la gravité de l'apnée du sommeil.
Les chercheurs ont constaté que 40 % des diabétiques repérés lors de leur étude avaient auparavant échappé au diagnostic.
Le lien proportionnel entre apnée et diabète ne peut s'expliquer par des facteurs de risque connus, comme l'âge et le poids, pour lesquels une correction statistique a été faite. Et cela même si les patients apnéiques étaient en moyenne plus gros que les simples ronfleurs, font remarquer les auteurs.
Une explication est proposée mais doit être confirmée.
Certaines données physiopathologiques suggèrent que la diminution du taux d'oxygène dans le sang pourrait favoriser le diabète. L'hypothèse est étayée par le fait que la correction des troubles respiratoires de la nuit par un masque nasal assurant une ventilation supplémentaire réduit l'HTA associée à l'hypoxémie.
Quoi qu'il en soit, l'intolérance au glucose est à même de contribuer aux anomalies cardio-vasculaires des sujets souffrant de SAS.
Les chercheurs d'Angers cherchent maintenant à savoir si, en traitant les apnées du sommeil, on peut obtenir une correction des troubles métaboliques glucidiques du diabète. Et d'autres recherches sont prévues pour vérifier que l'association apnées du sommeil-diabète existe également, comme on le soupçonne, chez les femmes.
« European Respiratory Journal », 2003, vol. 22, n° 1.
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