ILS SONT exactement 318 à avoir un exercice privé à l'AP-HP. C'est peu, rapporté à l'effectif médical global du CHU parisien, qui compte environ 10 000 praticiens à plein-temps. Régulièrement, malgré tout, leur activité défraye la chronique.
Y a-t-il, parfois, des dérives ou des abus de certains grands pontes parisiens ? La réglementation qui encadre l'exercice libéral à l'hôpital est très claire. Le directeur général de l'AP-HP a lancé un audit pour s'assurer qu'elle est respectée dans ses murs. «J'ai simplement procédé à un certain nombre de contrôles, explique Benoît Leclercq au “Quotidien” . Cela ne veut pas dire que l'on en manquait auparavant, ceux-ci sont plus explicites et annoncés. (...) Ce faisant, je n'interviens pas sur l'activité libérale elle-même, je n'interviens pas, par exemple, sur les honoraires. A ce sujet, je rappelle simplement le principe du tact et de la mesure.»
La direction de l'AP-HP vérifie plusieurs points : la transparence des tarifs, la transparence du discours vis-à-vis du patient sur le secteur d'exercice et les délais de rendez-vous. Les premiers résultats de l'audit seront dévoilés dans le courant d'avril.
D'ores et déjà, Benoît Leclercq est en mesure d'affirmer que seulement 85 % des locaux où se pratique une activité privée affichent les tarifs – d'après les réponses fournies par le tiers des médecins concernés. «Les 15% restants doivent se mettre aux normes», prévient le directeur général de l'AP.
La communauté médicale, qui se sent parfois stigmatisée, affirme être au clair sur le sujet. «On n'a rien à craindre de cette enquête, car, à ma connaissance, il n'existe pas de déviances», déclare le Pr Roland Rymer, radiologue. Comme d'autres, le président du CCM (Comité consultatif médical) de l'hôpital Lariboisière rappelle son attachement au secteur privé : «Il concourt au maintien de l'attractivité des postes hospitaliers», insiste le Pr Rymer.
Rares abus.
Le président de la CME de l'AP-HP, le Pr Yves de Prost, reconnaît cependant que des abus existent, même s'ils sont rares. De précédents audits internes ont relevé plusieurs dysfonctionnements : certains praticiens n'annoncent pas clairement leurs tarifs. D'autres versent avec retard à l'hôpital leur redevance trimestrielle. Quelques-uns, qui se comptent sur les doigts d'une main, ont une activité privée plus importante que leur activité publique, ce qui est contraire à la réglementation.
En France, chaque hôpital où il existe un secteur privé dispose d'une commission de l'activité libérale, chargée de vérifier le respect des règles. A l'AP-HP, cette commission centrale a instruit sept dossiers litigieux en 2005. «Deux praticiens ont eu un avertissement car il persistait des incertitudes sur leur dossier», raconte le Dr Alain Faye, membre de cette commission. Mais «jamais, à l'AP-HP, la commission n'a pris une décision de sanction», ajoute le Dr Faye.
Le président de la CME confirme : «Il y a eu des demandes de régularisation au cours de la dernière décennie, et deux démissions de praticiens qui ont reçu un blâme et qui ont préféré partir dans le privé, mais jamais de sanction à l'encontre de médecins hospitaliers se traduisant par une interdiction de leur exercice privé à l'hôpital», selon le Pr Yves de Prost.
Ce nouvel audit diligenté par la direction s'impose-t-il ? Yves de Prost pense utile de «mieux détecter et mieux sanctionner» les abus. «Il faut chasser les brebis galeuses», dit-il. Sur le principe, le Dr Alain Faye semble du même avis. Mais le chirurgien de l'hôpital Pompidou rappelle que seule la commission centrale de l'activité libérale de l'AP-HP – qui regroupe la CME, le conseil d'administration, l'Ordre des médecins, la Ddass et la Cpam – est habilitée à enquêter sur l'exercice privé des médecins hospitaliers. «Si le directeur général de l'AP-HP veut demander la suspension de certains praticiens, l'ARH devra d'abord mener une enquête qui donne la possibilité aux médecins de se défendre. La réglementation doit être respectée dans les deux sens», rappelle-t-il.
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