L'AP-HP veut faire connaître et reconnaître son activité dans le domaine de la recherche clinique. Avec 470 projets de recherche en cours, concernant 60 000 patients, elle se situe en effet au premier rang européen dans ce domaine.
L'organisme plus directement en charge du financement et de la coordination de ces projets est la délégation interrégionale à la recherche clinique (Dirc Ile-de-France), créée en 1992, et dont les responsabilités ont été étendues à toute l'Ile-de-France en 1994, dans la foulée du programme hospitalier de recherche clinique (Phrc), instauré en 1993 par Bernard Kouchner.
Aujourd'hui, il est incontestable que, aux yeux du public, la recherche clinique ne bénéficie pas de la visibilité accordée à des avancées spectaculaires, telles que la greffe de visage, la chirurgie robotisée ou l'injection de cellules souches – avancées dont les applications pratiques sont «encore limitées, voire totalement virtuelles», souligne le Pr François Lemaire (président de la Dirc Ile-de-France). Quoi qu'elle soit relativement méconnue, c'est bien la recherche clinique qui constitue l'indispensable pont entre les travaux fondamentaux et les applications cliniques dont bénéficieront les patients hospitalisés demain. Sans oublier la création de valeur, puisque, via la mission de valorisation de la recherche et des brevets, l'AP-HP détient 250 brevets actifs, résultant de sa recherche clinique.
Une autre prise en charge du choc septique.
Les domaines d'application recouvrent en fait l'ensemble des procédures diagnostiques et thérapeutiques. Certains exemples sont particulièrement significatifs. Tout d'abord, le traitement par corticoïdes dans le choc septique. Les travaux entamés en 1994 par le Pr Djillali Annane (hôpital Raymond-Poincaré, Garches), sur le rôle des corticostéroïdes endogènes dans l'état de choc, allaient absolument à contre-courant des conceptions de l'époque.
Pourtant, l'AP-HP a financé une première étude visant à montrer une corrélation positive entre libération endogène de corticostéroïdes et pronostic des patients, puis une seconde étude, montrant le bénéfice d'un traitement substitutif par corticostéroïdes. Aujourd'hui, toutes les recommandations internationales classent la corticothérapie comme prioritaire dans la prise en charge du choc septique. «La recherche française entièrement financée par fonds publics de l'AP-HP et du ministère de la Santé a contribué en grande partie au bouleversement de la prise en charge thérapeutique et du pronostic de cette infection mortelle»: cette ode à l'intervention étatique provient du… « Wall Street Journal » (21 août 2002).
Autre exemple : le dépistage de la trisomie 21. Le cumul du dépistage échographique de la clarté nucale au premier trimestre et du dosage sérique combiné à l'âge maternel au second trimestre aboutit aujourd'hui à 15-17 % de caryotypes réalisés avant la 18e semaine, taux considérable, qui s'accompagne, compte tenu des risques du prélèvement, de deux ou trois fausses couches d'enfants sains pour le dépistage d'une trisomie 21. «Le dérapage est complet; le risque a été survalorisé par accumulation de méthodes de dépistage indépendantes les unes des autres», affirme le Dr Patrick Rosenberg (CH Poissy - Saint-Germain).
Avec le Dr Laurence Bussières (hôpital Ambroise-Paré, Boulogne), et grâce à un financement de l'AP-HP, le Dr Rosenberg a donc mené durant trois ans, dans les Yvelines, une étude d'évaluation d'une stratégie alternative de dépistage, fondée sur la mesure de la clarté nucale au premier trimestre, et le dosage de deux marqueurs maternels (PAPP-A et béta hCG), également au premier trimestre.
Résultat : le taux de faux-positifs est tombé à 3 %, et la Haute Autorité de santé vient de recommander la généralisation à tout le territoire français du protocole testé dans les Yvelines (» le Quotidien » du 11 juin) – comblant ainsi un grave retard de la France sur nombre de pays étrangers, notamment la Grande-Bretagne. Reste à espérer une réaction rapide des pouvoirs publics, puisque les modalités du dépistage de la trisomie 21 en France sont encadrées par arrêté (27 mai 1997).
D'autres exemples de recherche clinique peuvent également être cités, notamment les travaux du Pr Elie Azoulay (hôpital Saint-Louis, Paris) et du groupe FamiRéa sur l'information et le soutien des familles dont un membre est en fin de vie en service de réanimation ou, encore, le développement par l'équipe du Pr Laurent Brochard (hôpital Albert-Chenevier, Créteil), depuis le début des années 1990, de la ventilation non invasive, technique, devenue indispensable chez les patients en détresse respiratoire. Ces travaux ont pu être menés parce que l'AP-HP, par l'intermédiaire de la Dirc Ile-de-France, s'est portée promotrice. Outre leur utilité concrète et immédiate, ces travaux ont en commun de ne guère susciter l'intérêt des industriels. Et l'AP-HP tient manifestement à faire savoir que sur le créneau où le service public est seul présent, elle prend ses responsabilités.
D'après une conférence de presse organisée par la Dirc Ile-de-France.
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