Le lien entre les troubles anxieux et de l'humeur, d'une part, et la migraine, d'autre part, a été souligné dans de nombreux travaux. Ainsi, une étude prospective longitudinale, la Zurich Cohort Study a montré une relation statistiquement significative avec la dépression atypique (RR = 1,77, p < 0,032), l'anxiété généralisée (RR = 2, p < 0,005), le trouble panique (RR = 2,77, p < 0,003) et la phobie (RR = 2, p < 0,003). En revanche, cette étude n'a pas constaté de lien entre migraine et dépression majeure, et migraine et phobie sociale.
Les comorbidités familiales
Un autre travail (Yale Family Study), présenté par K. R. Merikangas, NIH, Bethesda, Etats-Unis), a mis en exergue le lien entre migraine et troubles psychiatriques dans la famille. Cette enquête, qui portait sur 250 migraineux et 1 218 de leurs proches, a mis en évidence une augmentation significative des troubles psychiatriques dans les familles des céphalalgiques : troubles bipolaires (RR = 3,8) ; dépression majeure (RR = 2,2) ; anxiété généralisée (RR = 2,8) ; agoraphobie (RR = 4,1) , phobie sociale (RR = 1,8). Ce même travail a également montré une augmentation de certaines pathologies somatiques dans les familles des migraineux : prolapsus de la valve mitrale (RR = 6) ; troubles digestifs (RR = 2,7) ; allergies (RR = 2) ; traumatisme crânien (RR = 2).
L'existence de comorbidités familiales a été confirmée par un travail prospectif portant sur 203 jeunes migraineux suivis pendant huit ans par le biais de trois questionnaires (Yale Hight Risk Study). L'analyse des données ainsi recueillies montre : une augmentation progressive de la fréquence de la migraine avec l'âge (de 8 à 26 ans, dans l'étude), avec une prépondérance du sexe féminin à partir de la puberté ; une augmentation de fréquence de la migraine chez les jeunes dont la mère est migraineuse (RR = 4,7), sans corrélation significative avec les migraines du père (RR = 1,3). Dans la population étudiée, ce travail pointe également un lien entre migraine et anxiété généralisée, et migraine et phobies simples ou sociales. Enfin, le risque de migraine était augmenté chez les jeunes présentant des troubles du sommeil, des problèmes somatiques, une allergie ou une irritabilité.
Les risques inhérents aux troubles psychiatriques
En marge du lien unissant migraine et troubles anxiodépressifs, plusieurs auteurs se sont interrogés sur l'impact de ces derniers sur la sévérité et l'évolution de la migraine. Françoise Radat (Bordeaux, France) a présenté un travail évaluant le rôle des troubles psychiatriques dans le passage à la chronicité des migraines épisodiques. Des troubles psychiatriques étaient recherchés (sur les critères du DSM IV) chez 41 patients migraineux (témoins), 41 anciens migraineux devenus céphalalgiques chroniques après abus médicamenteux (CCAM). Les patients étaient interrogés sur leurs antécédents familiaux psychiatriques. Cette enquête a montré que les CCAM présentaient, plus souvent que les autres, une anxiété (RR = 6), des troubles de l'humeur (RR = 21,8), des troubles paniques (RR = 12) et des conduites addictives vis-à-vis des médicaments (RR = 7,6) ; elle a également révélé que les troubles psychiatriques précédaient le passage à la chronicité de la migraine. Enfin, il a mis en évidence une corrélation entre troubles addictifs dans la famille et CCAM. Les auteurs concluent qu'une comorbidité psychiatrique augmente fortement le risque de chronicité de la migraine.
Des parents anxieux
Enfin, Frederica Galli (Rome, Italie) a recherché l'existence de troubles psychiatriques chez les parents de quatre groupes de jeunes patients : migraineux, épileptiques, asthmatiques et jeunes en bonne santé. Ce travail a mis en évidence que les parents de migraineux et d'asthmatiques présentaient davantage de troubles anxieux et de dépressions que les parents d'épileptiques et d'enfants en bonne santé (6 % versus 15 %). Les parents de céphalalgiques chroniques présentaient les plus hauts taux de troubles psychiatriques. Cette étude n'a cependant pas pu faire la part des facteurs génétiques et environnementaux dans cette comorbidité familiale.
D'après les communications de Kathleen R. Merikangas (National Institute of Health, Bethesda, Etats-Unis) ; Françoise Radat (unité de traitement des douloureux chroniques, Bordeaux) ; Frederica Galli (département de neuro-psychiatrie infantile, Rome, Italie).
Les facteurs de risque d'AVC
La migraine est un facteur de risque d'ischémie cérébrale chez les femmes en âge de procréer. A cet égard, le travail de Michael Donaghy a été de rechercher des facteurs prédictifs de ce risque. La durée d'évolution, la fréquence des crises et le type de migraine ont été analysés chez 86 femmes ayant fait un AVC et chez 214 migraineuses (témoins). Le risque d'AVC était associé à une durée d'évolution de la migraine supérieure à 12 ans (RR = 4,61), une migraine d'emblée avec aura (RR = 8,37) et une fréquence des crises supérieures à 12 par an (RR = 10,4). La prise d'un contraceptif oral ne modifiait pas significativement ces chiffres. L'augmentation de fréquence des crises de migraine était associée à une élévation du risque d'AVC.
Dr D. C.
D'après la communication de Michael Donaghy, département de neurologie clinique, Oxford, Grande-Bretagne.
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