De notre correspondante
à New York
On sait, par les études animales, que l'athérosclérose est, morphologiquement, une maladie inflammatoire. Ainsi, lorsqu'un animal est soumis à un régime athérogène, les monocytes adhèrent à l'endothélium vasculaire et s'accumulent dans les sites artériels sujets aux lésions. Ils sont ensuite attirés dans l'intima artérielle, où ils se différencient en macrophages, lesquels accumulent des lipides et perpétuent la réponse inflammatoire locale.
L'inflammation est aussi impliquée dans les manifestations cliniques tardives de l'athérosclérose. Dans une plaque vulnérable, elle pourrait provoquer un angor instable en favorisant la rupture ou l'érosion. L'angor instable est associé à des signes d'inflammation non seulement dans la paroi artérielle, avec la présence de macrophages activés dans les sites de rupture de plaques, mais aussi dans la circulation systémique, avec des leucocytes activés et des taux élevés de protéine C réactive. Il reste à savoir quelle est la source précise de l'inflammation. En d'autres termes, les leucocytes sont-ils uniquement activés dans le lit vasculaire de la sténose impliquée ?
Activation des neutrophiles
Une équipe italienne, dirigée par le Dr Attilio Maseri (université Vita e Salute, Milan), a éclairci cette question. Ils ont recherché si, chez les patients atteints d'angor instable, l'activation des neutrophiles est confinée au lit vasculaire perfusé par la coronaire sténosée impliquée, ou si elle s'étend aussi au lit vasculaire des artères normales ou quasi normales à l'angiographie. L'activation des neutrophiles a été mesurée par leur contenu en myéloperoxidase.
Deux groupes de patients avec un angor instable ont été étudiés. L'un ayant une sténose de l'interventriculaire antérieure gauche (24 patients), l'autre avec une sténose de la coronaire droite (9 patients). L'activation des neutrophiles a été simultanément mesurée dans l'aorte, la veine fémorale et la grande veine cardiaque qui draine le sang uniquement de l'interventriculaire gauche (et non de la coronaire droite). Ils ont aussi étudié deux autres groupes de patients, l'un avec un angor stable et une sténose de l'interventriculaire antérieure gauche (13 patients), l'autre ayant un angor de Prinzmetal et une ischémie récurrente (13 patients), ainsi qu'un groupe témoin (6).
Le même degré d'inflammation
Comme prévu, des signes d'inflammation ont été trouvés dans l'interventriculaire antérieure gauche chez les patients ayant un angor instable et une lésion dans l'artère coronaire gauche. De façon inattendue, les patients ayant un angor instable et une lésion dans l'artère coronaire droite ont été trouvés avec le même degré d'inflammation que les précédents patients. Aucun signe d'inflammation n'a été trouvé dans la veine fémorale des 5 groupes de patients.
A l'inverse, les patients ayant un angor stable n'ont pas de signe d'inflammation dans la circulation coronarienne, bien que l'angiographie révèle une athérosclérose similaire à celle des patients qui ont un angor instable. Il n'y a pas non plus d'inflammation dans les artères coronaires des patients qui ont de multiples épisodes d'angor de Prinzmetal, censés résulter de mécanismes physiopathologiques distincts.
Par conséquent, l'ischémie myocardique seule n'est pas suffisante pour induire l'état inflammatoire coronarien trouvée chez les patients à angor instable. Et « cela remet en question l'hypothèse largement acceptée selon laquelle une plaque vulnérable est responsable du développement de l'instabilité coronarienne », concluent Buffon, Masieri et coll., qui ajoutent que cette « hypothèse stimule actuellement le développement de techniques pour détecter et stabiliser de telles plaques ».
L'angiographie coronaire n'est pas utile
« Globalement, l'étude suggère que le lien entre l'inflammation et la maladie coronarienne active ne naît pas des événements propres à une seule plaque vulnérable qui va se rompre », commentent dans un éditorial les Drs Keaney et Vita (université de Boston). « L'étude présente un certain nombre d'implications importantes », ajoutent-ils. « Premièrement, elle souligne la notion que l'angiographie coronaire n'est pas particulièrement utile pour identifier les plaques athéroscléreuses enflammées susceptibles de se rompre et de produire un IM. Deuxièmement, ajoutent-ils, l'étude suggère que les personnes à risque accru d'IM aigu pourraient avoir de nombreuses lésions vulnérables dans tout l'arbre coronarien et, chez ces patients à haut risque, les traitements médicaux systémiques risquent d'être plus utiles que les traitements focaux actuels (angioplastie, stent et brachythérapie) ». Enfin, l'étude « suggère que les patients sujets à un angor instable auront une telle extension de l'inflammation coronaire que la détection non invasive des plaques vulnérables pourrait être possible. En ce moment, des efforts considérables visent à développer des méthodes d'imagerie (échographie intravasculaire, IRM et sondes de température locale) et des marqueurs circulants (protéine C réactive, cytokines) comme candidats à la détection des plaques athéroscléreuses vulnérables ».
« New England Journal of Medicine », 4 juillet 2002, pp. 5 et 55.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature