DES TRAVAUX conduits à l’école de médecine de la faculté de Harvard pourraient aboutir à la mise au point d’une nouvelle stratégie pour le traitement du cancer de la prostate. Yoshioka et coll. ont mis en évidence une nouvelle cible thérapeutique : l’angiogénine.
L’angiogénine est une ribonucléase angiogénique dont la surexpression a été observée dans de nombreux cancers humains, notamment dans les tumeurs prostatiques. Une étude publiée en 2005 a montré que l’expression du gène codant pour l’angiogénine augmente progressivement dans le tissu prostatique au fur et à mesure de la progression tumorale. De même, chez la souris, le développement d’un cancer de la prostate expérimentalement induit par des manipulations génétiques est associé à une multiplication par un facteur 32 du niveau d’expression de l’angiogénine.
Ces observations ont conduit Yoshioka et coll. à s’interroger sur le rôle de cette ribonucléase angiogénique dans la pathogenèse du cancer de la prostate. Les chercheurs ont travaillé in vitro sur des cellules tumorales humaines en culture et in vivo dans le modèle de la souris.
Lors d’une première série d’expériences, Yoshioka et coll. ont inhibé l’activité de l’angiogénine dans des cellules humaines dérivant de cancer de la prostate. Cette stratégie leur a permis de mettre en évidence un rôle important de la protéine dans la prolifération des cellules cancéreuses. Il est en effet apparu que l’inhibition de l’angiogénine par des ARN interférents conduit à une réduction significative du taux de prolifération cellulaire.
Ce phénomène est également constaté in vivo. Pour le démontrer, les chercheurs ont injecté à des souris « nude » des cellules tumorales de la même lignée que celle utilisée lors de l’expérience précédente. Chez les souris du groupe témoin, cette xénogreffe conduit au développement de tumeur dont le poids atteint plus de 500 mg au bout d’un mois. Mais chez les animaux traités avec un ARN interférent antiangiogénine, la prolifération des cellules tumorales est ralentie et la néovascularisation de la tumeur significativement inhibée. Ces deux mécanismes entraînent une réduction de la croissance tumorale de plus de 80 %.
Un inhibiteur de la translocation nucléaire, la néomycine. Comme toutes les protéines cellulaires, l’angiogénine est produite dans le cytoplasme, mais pour exercer son activité cette protéine particulière doit être transloquée dans le noyau des cellules. Il est donc théoriquement possible d’inhiber l’activité de la protéine en inhibant simplement sa translocation dans le noyau cellulaire. Yoshioka et coll. ont testé cette idée avec succès : en traitant les souris greffées avec un inhibiteur de la translocation nucléaire, la néomycine, les chercheurs ont montré qu’il était possible d’obtenir un arrêt complet du développement tumoral dans 50 % des cas et une réduction de la croissance tumorale d’en moyenne 23 % dans les autres cas.
L’efficacité d’autres inhibiteurs de la translocation est actuellement en cours d’évaluation.
N. Yoshioka et coll., « Proc Natl Acad Sci USA », édition en ligne avancée.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature