« La Légende de Bagger Vance », de Robert Redford

A l'ancienne

Publié le 17/04/2001
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Q UI a dit que le cinéma, cela ne devait plus être une jolie histoire, de bons sentiments et de belles images bien léchées ? Pas Robert Redford en tout cas. Car en nous faisant retourner dans les années vingt, dans une ville (Savannah la sudiste) qui frôle l'opérette, avec des personnages presque tous positifs, y compris ceux qui devraient être méchants, il nous offre un film comme on n'ose plus en faire, et on a tort.

Ce n'est pas qu'il n'y ait pas de drame dans « Bagger Vance ». Il y a en a même de grande ampleur, les combats horribles de la première guerre mondiale et la Dépression de 1929. Le héros de l'histoire répond au drôle de nom de Rannulph Junuh ; ancien champion de golf, il revient traumatisé de France et s'enferme dans une vieille maison en compagnie d'une bouteille et parfois de joueurs de poker. Mais un homme venu de nulle part, Bagger Vance, va le sauver grâce à la petite balle blanche.
Redford tient à ce qu'on sache qu'il n'a pas réalisé un film sur le golf. Reste que plus de la moitié des séquences se passent sur les greens puisque le tournoi où Junuh affronte deux des meilleurs joueurs du moment, est censé être une allégorie de la rédemption par la victoire sur soi-même, l'honnêteté, la fraternité (des mots qu'on n'ose plus guère prononcer).
Alors, les incultes en matière de golf s'ennuieront peut-être légèrement lorsque les joueurs ajustent longuement leur geste et que l'on suit la balle dans son envolée. Mais si Redford prend son temps, c'est pour que le spectateur ait le temps d'admirer les belles images bucoliques qu'il nous offre. Tout est vert, tout est lumineux, même quand il pleut, et les personnages eux-mêmes rayonnent. Matt Damon joue de ses mèches blondes et de son sourire éclatant, Will Smith arbore une mine adoucie bien loin de « Men in black », Charlize Théron essaye d'être éthérée, Joel Gretsch ressemble à Redford, Walter Hagen est un faux dur. Et puis il y a l'enfant, symbole de la foi et de l'innocence.
Tous ces ingrédients peuvent apparaître séparément quelque peu indigestes et rebattus mais le charme opère. On entre dans une sorte de royaume enchanté, celui d'un cinéma qui aurait encore toute sa vigueur romanesque et ne serait pas pollué par le goût de la violence et des effets trop spéciaux. A l'ancienne. Cela ne peut pas faire de mal.

CARTON Rene

Source : lequotidiendumedecin.fr: 6900