PLUS LE palmarès de Lance Armstrong se sera enrichi de trophées, plus la suspicion aura agité les esprits, aussi bien dans le monde sportif, y compris parmi les coureurs, que dans les milieux médicaux et dans le public : à une époque troublée par de nombreuses affaires de dopage, tant de victoires, remportées notamment dans sept Tours de France consécutifs et acquises avec une telle facilité, ne peuvent décidément convaincre les sceptiques. Pourtant, comme tous les participants au Tour 2006, l'Américain s'est soumis sans encombre aux contrôles. Encore samedi dernier, avant le contre-la-montre de Saint-Etienne, à la veille de l'arrivée à Paris, avec les premiers coureurs classés, il a subi un test sanguin inopiné. Et il a été déclaré apte à poursuivre la compétition.
« Toujours pas la preuve qu'il ne se dopait pas ».
« Mais tout le problème, constate le Dr Gérard Dine, c'est que, si on n'a pas pu prouver en effet, ni cette fois-ci ni les précédentes, que l'Américain se dopait, on n'a toujours pas fait la preuve qu'il ne se dopait pas. »
Une preuve que seul, affirme le directeur de l'Institut de biotechnologies de Troyes, professeur à l'Ecole centrale de Paris, un système de traçabilité aurait pu apporter. « Or toutes les demandes réitérées à ce propos depuis 2000 auprès de la Fédération internationale sont à ce jour restées lettre morte. Si un suivi longitudinal existe bien pour les cyclistes, il est mis en œuvre par les médecins des équipes qui, dans le cas d'Armstrong, ont été plusieurs, ces dernières années, à se succéder, tous se retranchant derrière le secret médical. »
Pourtant, preuve a déjà été faite que, après une néoplasie testiculaire, comme celle qui a frappé Armstrong en 1996, un champion pouvait retrouver un niveau de performance international et ce « dans un environnement médical licite et éthique ». C'est ainsi qu'a été rapporté le cas* d'un nageur français de haut niveau qui se soumettait à un suivi longitudinal avec une partie biologique spécialisée. A la suite d'une orchidectomie et de deux cures de chimiothérapie, le champion, six mois après le diagnostic, grâce à un entraînement très adapté, se qualifiait et terminait huitième de finale française. Il n'avait reçu ni corticoïdes, ni facteurs de croissance hématologique, ni aucune préparation à visée dopante, ainsi qu'en atteste le suivi biologique dont il n'a cessé de faire l'objet, avant, pendant et après son traitement.
« Pour que la confiance soit rétablie autour des enjeux du sport de haut niveau, souligne le Dr Dine, la médecine du sport doit trouver sa place et employer les compétences nécessaires et les outils existants, aujourd'hui accessibles grâce aux progrès de la technologie, dans un cadre de transparence et de référence à l'éthique. »
Dans le cas d'Armstrong, l'exemplarité aurait été maximale. Au lieu de quoi, la suspicion restera indélébile.
* Néoplasie testiculaire : diagnostic dans le cadre d'un suivi biologique longtiudinal, traitement et retour à la compétition de haut niveau pour un nageur de statut international » (Science & Sports 2001, 16, 29-31).
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