La façon dont les accréditations sont actuellement délivrées aux hôpitaux et aux cliniques ne satisfait pas Alain Coulomb, qui s'apprête à révolutionner la procédure.
Pour le nouveau directeur général de l'ANAES (Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé), le système actuel a atteint ses limites : « Le référentiel est lourd et bureaucratique, les professionnels de santé, insuffisamment impliqués, et la démarche ne rassure pas assez les usagers », constate-t-il. Trois cents établissements ont été accrédités entre 2000 et 2002, 650 le seront cette année. Pour atteindre son objectif - 100 % des établissements accrédités en 2006 -, l'ANAES s'apprête à lancer une seconde vague d'accréditation des hôpitaux et cliniques, dont l'expérimentation doit débuter en 2004.
L'Agence prépare depuis trois mois les modalités de mise en oeuvre de cette nouvelle vague. Les grandes lignes en ont été dévoilées lors du dernier conseil d'administration de l'ANAES, le 25 avril.
L'enjeu est clair : il s'agit de « simplifier les référentiels et la procédure d'accréditation pour améliorer l'appréciation de la qualité du service médical rendu au patient », indique le rapport du conseil d'administration dont « le Quotidien » a obtenu une copie.
La deuxième phase de l'accréditation va donc être axée autour du concept de performance. Performance économique : la santé a un coût, les établissements devront en tenir compte dans leur démarche d'évaluation. Performance qualitative : les établissements devront mesurer la qualité de leurs activités cliniques. Performance scientifique : chaque usager doit pouvoir bénéficier des avancées technologiques.
Pour l'ANAES, cette prise en compte de la performance implique « une évolution vers une médicalisation de l'accréditation ». Traduction : l'évaluation des activités de soins, qui n'apparaissent pas en tant que telles dans la procédure actuelle (celle-ci mesure les moyens mis en uvre par les établissements pour améliorer leur qualité), va être renforcée. De même que l'implication des équipes cliniques dans l'accréditation. Sont particulièrement visés les médecins, « qui ne se sentent pas assez concernés et qui ne se reconnaissent pas dans les marqueurs définis par la première vague », d'après Alain Coulomb (voir encadré). Les praticiens vont donc être mis à contribution et devront définir des indicateurs permettant d'évaluer leurs pratiques professionnelles. L'attribution de sanctions en cas de non-respect de ces indicateurs n'est pas envisagée. L'ANAES mise donc sur la bonne volonté des médecins pour réformer le système.
Dés l'an prochain, certains établissements (déjà accrédités) vont tester cette nouvelle procédure. L'ANAES prévoit d'accréditer 600 établissements par an via la première procédure, et 200 par an via la seconde procédure, jusqu'en 2006. Au-delà, toutes les accréditations seront « médicalisées ».
La culture médicale montrée du doigt
« Le facteur bloquant au développement de l'accréditation », pour Dominique Dessalles, docteur en pharmacie et expert hygiéniste, c'est sans conteste « les médecins ». Cette femme travaille depuis des années pour le compte d'un cabinet de conseil toulousain (Iso-Phile), et, à ce titre, accompagne les cliniques privées dans leur démarche d'accréditation. Elle se dit bien placée pour juger de l'évolution des mentalités : « Depuis le lancement de l'accréditation, la culture administrative et surtout paramédicale s'est bien améliorée. Les soignants sont plus impliqués, ils sont rassurés de savoir que la responsabilité dans les dysfonctionnements du type retard de planning ou erreur médicale est largement partagée avec les médecins. »
A l'inverse, la mentalité des médecins n'aurait guère évolué, à en croire Dominique Dessalles. « Ils ne veulent pas entendre parler d'évaluation des pratiques, ils refusent de mettre sur papier leurs méthodes cliniques. » Pour cette experte en hygiène, l'échec - relatif - de la première vague d'accréditation tient au fait que « les évaluateurs de l'ANAES n'ont pas assez mis les médecins sur la sellette ».
Dominique Dessalles apprécie le virage donné à la procédure d'accréditation par Alain Coulomb. Elle espère qu'avec l'évaluation de leurs pratiques professionnelle les médecins vont cesser de se considérer comme « intouchables ».
D. Ch.
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