UNE EQUIPE américaine a identifié un biomarqueur qui pourrait permettre une mesure objective du manque de sommeil : l’amylase salivaire. Chez la mouche drosophile comme chez l’homme, une corrélation apparaît en effet entre le niveau d’activité de cette enzyme et le besoin de dormir.
La privation de sommeil est associée à une altération des performances cognitives et à une réduction de la vigilance qui conduisent à une augmentation du risque d’accidents de la route, du travail et de la vie courante. Le développement de méthodes permettant d’évaluer objectivement la carence pourrait contribuer à leur prévention.
C’est précisément dans cette optique que Seugnet et coll. ont cherché à identifier un biomarqueur dont le niveau varie lorsque le manque de sommeil augmente, puis revient au niveau basal lorsque le repos intervient.
Seugnet et coll. ont démarré leur étude en utilisant le modèle expérimental de la mouche drosophile, un modèle fréquemment utilisé par les chercheurs s’intéressant à la dynamique du sommeil. L’utilisation de puces à ADN a rapidement permis à l’équipe américaine de découvrir que l’expression du gène de l’amylase est systématiquement augmentée chez les diptères privés de sommeil.
Le niveau de transcription du gène de l’amylase augmente.
Pour vérifier l’existence d’une corrélation directe entre l’expression de l’amylase et le manque de sommeil, les chercheurs ont mesuré la concentration des ARN messagers (ARNm) codant pour l’enzyme dans la salive de mouches privées de sommeil pendant trois, six, neuf et douze heures. Cette expérience a montré que le niveau de transcription du gène de l’amylase augmente au cours de la veille prolongée. La quantité d’ARNm mesurée dans la salive des mouches est proportionnelle à leur manque de sommeil.
Au cours d’une seconde série d’expériences, les chercheurs ont pu démontrer que ce phénomène dépend des mécanismes qui assurent l’homéostasie du sommeil et non pas simplement de la durée du temps de veille. La concentration des ARNm de l’amylase n’augmente au cours d’une veille prolongée que chez les mouches capables de réguler leur cycle veille/sommeil. Chez des mutants qui n’ont pas besoin d’un repos prolongé pour récupérer d’une privation de sommeil, la transcription du gène de l’amylase reste stable tout au long de l’expérience.
En revanche, le gène de l’amylase ne semble pas participer à l’homéostasie du sommeil, des mouches chez lesquelles les deux gènes de l’amylase ont été invalidés ne montrent aucun trouble de la régulation des cycles veille/sommeil.
Pour finir, Seugnet et coll. ont mesuré la concentration des ARNm et l’activité de l’amylase dans la salive de sept hommes et deux femmes volontaires soumis à une veille de 28 heures. Les résultats de cette expérience suggèrent que les phénomènes observés chez la mouche sont transposables à l’humain. Cependant, l’ampleur de l’élévation de la concentration salivaire en amylase au cours de la veille varie énormément d’un humain à l’autre. Ces variations pourraient refléter les différences de sensibilité individuelle à la privation de sommeil.
L. Seugnet et coll., « Proc Natl Acad Sci USA », édition en ligne avancée.
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