Métabolisme cellulaire

L'AMP kinase, une potentielle cible thérapeutique

Publié le 17/04/2008
Article réservé aux abonnés
1276167852F_Img321069.jpg

1276167852F_Img321069.jpg

L'AMPK (AMP activated protein kinase) est une enzyme qui joue un rôle important dans le métabolisme cellulaire. Elle mesure l'état énergétique des cellules et réagit en réorientant le métabolisme en fonction des besoins. Elle a un rôle clé dans le métabolisme des glucides et des acides gras et la connaissance de son mode de fonctionnement apporte des informations utiles dans la compréhension de la physiopathologie du diabète de type 2. Elle pourrait, de plus, être à l'origine d'une nouvelle approche thérapeutique du diabète.

LA CELLULE a besoin d'énergie pour fonctionner, c'est-à-dire pour fabriquer des protéines, pour les sécréter, pour transporter des métabolites… Elle trouve cette énergie sous forme d'ATP, monnaie énergétique de la cellule qui provient de l'utilisation de substrats énergétiques comme le glucose et les acides gras… Afin que la cellule puisse survivre, l'ATP doit être maintenu à un niveau constant et la régulation du métabolisme glucido-lipidique vise à maintenir une homéostasie énergétique dans toutes nos cellules, en particulier dans le cerveau. L'AMPK intervient dans cette régulation en appréciant l'état énergétique de la cellule. Quand une déplétion en énergie se produit (hypoglycémie, hypoxie, contraction musculaire…), l'ATP diminue au profit de son produit de dégradation, l'AMP, qui augmente et active l'AMPK. Celle-ci rétablit l'équilibre énergétique en activant les voies productrices d'énergie (transport des substrats dans la cellule, glycolyse, par exemple) et en inhibant celles qui sont consommatrices d'énergie (gluconéogenèse, par exemple).

L'AMPK intervient au niveau de différents organes.

– Dans le muscle, l'AMPK est activée par la contraction musculaire. Il en résulte une augmentation du transport de glucose et de l'oxydation des acides gras et une amélioration de la sensibilité à l'insuline. Sa stimulation a donc un effet bénéfique dans l'insulinorésistance.

– Dans le foie, l'AMPK favorise la bêta-oxydation des acides gras pour produire de l'énergie et inhibe la lipogenèse à court et à long termes (processus qui coûte de l'énergie). Elle diminue aussi la synthèse de cholestérol. En ce qui concerne le métabolisme glucidique, l'AMPK inhibe la production hépatique de glucose en inhibant la néoglucogenèse. Stimuler l'AMPK conduit donc à diminuer la stéatose hépatique et la production de glucose.

– Dans le cerveau, l'AMPK a un rôle d'intégration pour fournir de l'énergie à l'ensemble de nos cellules. Quand le cerveau détecte une baisse du niveau d'énergie, une sensation de faim survient qui est suivie du besoin de se nourrir. L'AMPK intervient au niveau de la régulation de la prise alimentaire dans l'hypothalamus. L'activation de l'AMPK stimule donc la prise alimentaire et la prise de poids.

– Il existe dans l'organisme des modulateurs physiologiques de l'activité AMPK. Ce sont les adipokines produites par le tissu adipeux, leptine et adiponectine. La leptine est une sorte de « lipostat » qui est activé ou inhibé en fonction de l'état des réserves adipeuses. L'adiponectine augmente l'oxydation des acides gras, le transport de glucose et améliore la sensibilité à l'insuline.

– Il existe aussi des activateurs pharmacologiques de l'AMPK. Ainsi, la metformine est un activateur de l'AMPK dans le foie et dans le muscle. Un certain nombre de travaux suggèrent que c'est par ce mécanisme que s'expliquerait, au moins en partie, son action bénéfique dans le diabète de type 2.

L'AMPK apparaît donc comme une nouvelle cible thérapeutique, et de nombreux travaux ont exploré récemment cette voie de recherche. Le développement de composés qui pourraient constituer de nouveaux traitements du diabète et/ou de l'obésité est en cours. Le composé AICAR stimule l'AMPK mais il n'est pas suffisamment spécifique pour être utilisé en thérapeutique. Un composé synthétisé par Abbott (A 769 662) a une activité spécifique de l'AMPK. Des études expérimentales ont montré que ce composé diminue la glycémie et les triglycérides d'animaux diabétiques. Comme il ne traverse pas la barrière hémato-encéphalique, il ne passe pas dans le cerveau et n'induit pas de prise de poids par action sur la prise alimentaire. Enfin, chez des animaux obèses, il a diminué la stéatose hépatique. Cependant, ce produit n'a pas une bonne tolérance orale et des travaux complémentaires sont nécessaires pour mettre au point des composés utilisables chez l'homme. Ces résultats sont malgré tout très prometteurs et confirment que la stimulation de l'AMPK est une cible thérapeutique nouvelle et intéressante dans le traitement du diabète de type 2 et/ou d'autres troubles métaboliques.

D'après la conférence plénière « l'AMPK, une enzyme au coeur du métabolisme énergétique » de Pascal Ferré, université Pierre-et-Marie-Curie, Paris.

> YVONNE EVRARD

Source : lequotidiendumedecin.fr: 8356