D EPUIS 1994, plusieurs publications ont fait état d'une baisse de la mortalité toutes causes confondues chez les consommateurs modérés d'alcool. La courbe des décès, qui suit une forme en U, peut s'expliquer principalement par la baisse de la mortalité d'origine cardio-vasculaire, en cas de prise de 20 g d'alcool pur par jour. Les mécanismes sous-tendant cette variation de la survie des consommateurs modérés restent encore imparfaitement appréhendés. Néanmoins, des études cliniques ont prouvé que l'alcool induit des variations des concentrations sériques en lipoprotéines avec une augmentation du HDL cholestérol et des apolipoprotéines A, et tend à créer un profil hémostatique favorable.
Une équipe de chercheurs allemands s'est intéressée au lien entre la consommation d'alcool et les marqueurs de l'inflammation en partant du fait que l'athérosclérose - à l'origine des décès cardio-vasculaires - est maintenant considérée comme une affection à composante inflammatoire. On a en effet mis en évidence au sein des plaques athérothrombotiques des cellules inflammatoires, particulièrement des macrophages et des lymphocytes T. En outre, le nombre total des leucocytes circulants et la fibrinogénémie constituent des facteurs de risque indépendants des maladies coronariennes et des infarctus du myocarde. Enfin, il existe une association positive entre la protéine C réactive (CRP) plasmatique et le risque cardiaque, ainsi qu'une association inverse entre l'albuminémie et ce même risque.
Un suivi prospectif
L'équipe du Dr Armin Imhof (Ulm) a choisi de fonder son étude sur une population d'hommes et de femmes âgés de 18 à 88 ans, inclus dans une cohorte nationale de suivi prospectif mise en place en Allemagne entre 1987 et 1988. Un enquêteur a été envoyé au domicile des participants afin de compléter un questionnaire standardisé sur l'histoire médicale, les habitudes alimentaires et le statut socio-économique. La consommation d'alcool a été appréciée sur la semaine précédant la visite de l'enquêteur et 6 catégories ont été individualisées : abstinence, consommation quotidienne comprise entre 0 et 20 g, entre 20 et 40 g, entre 40 et 60 g, entre 60 et 80 g, enfin, plus de 80 g. Un examen sanguin avec dosage de la CRP, des alpha 1 et alpha 2 globulines, de l'albumine, de la transferrine et une estimation du nombre des leucocytes a été effectué dans les suites de l'entretien. Les résultats des entretiens et des tests ont été exploitables chez 781 hommes et 995 femmes.
« Environ 6 % des hommes et 13 % des femmes n'avaient consommé aucune boisson alcoolisée dans les 7 jours précédant l'examen », expliquent les auteurs. La valeur de la CRP rapportée à la consommation quotidienne d'alcool suit une courbe en U (CRP minimale pour une consommation de 20 à 40 g d'alcool chez les hommes et de 40 à 60 g chez les femmes). Les valeurs du nombre des leucocytes, des alpha 1 et alpha 2 globulines suivent, elles aussi, une courbe de forme similaire chez l'homme, alors que chez les femmes seule la valeur des leucocytes suit une telle courbe.
S'intéressant au statut tabagique des membres de la cohorte, les auteurs ont individualisé trois grands groupes de sujets : les personnes qui n'ont jamais fumé, les fumeurs et les anciens fumeurs. Si dans les deux premiers groupes, la valeur de la CRP suit effectivement une courbe en U, chez les anciens fumeurs, cette tendance n'apparaît pas, sans que les investigateurs puissent donner à ce fait d'explication.
« Lancet », vol. 357, pp. 763-767, 10 mars 2001.
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