Lait de soja, de riz, d’amande ou encore de chèvre, de brebis ou de jument… les boissons végétales ou laits d’origine non bovine sont utilisés dans l’alimentation des nourrissons par certains parents, les raisons invoquées étant essentiellement une allergie aux protéines de lait de vache ou un végétarisme. Les pédiatres et diététiciens s’inquiètent d’ailleurs de ce phénomène croissant. De plus, ils soulignent que les tentatives pour convaincre les parents de l’inadéquation de ces produits d’alimentation courante aux besoins nutritionnels des enfants restent vaines.
Pourtant, il est bien exact que ces laits ou jus ne sont pas adaptés au nourrisson et ne permettent pas de couvrir intégralement leurs besoins, comme le souligne l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) dans un avis rendu public le 14 mars. Pire : ils peuvent être dangereux, surtout en cas d’alimentation exclusive. « Ainsi en 2011, un cas d’alcalose métabolique sévère chez un enfant de 12 mois nourri exclusivement au lait d’amande a été notifié à l’Anses ». Parallèlement, deux études (l’une en cours de publication, l’autre de Foureau et al, 2012) recensent 13 cas de complications graves pouvant conduire au décès, imputables à la consommation exclusive de boissons végétales chez le nourrisson (jus de châtaigne, d’amande, de riz ou de soja parfois donnés en association) : dénutritions majeure avec œdème et hypoalbuminémie profonde, état de mal convulsif lié à une hypocalcémie, état de mal convulsif lié à une acidose hyponatrémique (l’enfant est décédé des séquelles de cet accident), arrêt de croissance pondérale par carence d’apports protéino-énergétique, syndrome de kwashiorkor, détresse respiratoire liée à une alcalose métabolique, anémie carentielle en fer et vitamine B12.
L’Anses s’est donc saisie du sujet et a réalisé une évaluation de ce type de boissons disponibles sur le marché français. Bilan : 211 jus végétaux ont été recensés et 5 laits non bovins. Sur un échantillon de 75 boissons, on note des teneurs énergétiques plus faibles que celles requises dans les préparations pour nourrissons, mais aussi des apports en protéines, en lipides, en sel inadaptés au jeune enfant.
En revanche, en cas d’allergie aux protéines de lait ou d’une volonté affirmée de végétarisme, il existe bel et bien des préparations infantiles qui sont adaptées et indiquées chez le nourrisson : une mention figure alors clairement sur le conditionnement (par exemple les préparations infantiles à base de riz ou de soja mentionnant un usage destiné aux nourrissons et aux enfants en bas âge).
Des étiquettes trompeuses
Mais un problème demeure : les produits identifiés par l’Anses, qui ne sont pas destinés à un usage infantile, mentionnent parfois un usage possible chez l’enfant. Certes, il n’est pas marqué en toute lettres « préparation pour nourrisson, ou « préparation de suite »… Toutefois, certains de ces produits sèment le doute, avec des mentions d’étiquetage telles que « ce produit peut se donner à un bébé dans un biberon ou à la cuillère en début de sevrage », ou « particulièrement adapté aux jeunes enfants en période de croissance », ou encore des dessins d’un enfant tenant un biberon, un ourson…. Bref, autant de mentions qui peuvent porter à confusion, et inciter les parents à croire que ces produits sont adaptés à l‘alimentation de bébé. C’est pourquoi l’Anses souhaite que « l’étiquetage de ces produits indique d’une part la composition nutritionnelle », mais aussi et surtout « qu’ils ne conviennent pas à l’alimentation des enfants âgés de moins d’un an et que leur utilisation peut être à l’origine d’accidents graves ».
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature