ALORS qu’ Helicobacter pylori provoque chez presque tous ses hôtes humains une gastrite superficielle, chez d’autres, il est responsable d’une gastrite chronique atrophique. Cette pathologie caractérisée par une perte des cellules pariétales productrices d’acide majore largement le risque de survenue d’un adénocarcinome gastrique.
Une équipe, composée de chercheurs américains et suédois (Jung D.Oh et coll.), vient de réussir le séquençage de souches impliquées dans cette gastrite atrophique. Leur travail apporte la validation de l’outil utilisé, fondé sur des puces à ADN. Il permettrait de séquencer rapidement des souches d’ H.pylori chez des patients (soit de façon isolée, soit par lots) et, donc, d’envisager un pronostic.
S’adapter aux modifications qu’il occasionne.
Tout comme la pathologie gastrique peut évoluer tout au long de la vie, H.pylori est fortement suspecté de s’adapter aux modifications qu’il occasionne sur l’organisme. Des travaux ont déjà montré une perte rapide de la notion de clone bactérien au cours de l’infection, ainsi qu’un taux élevé de mutations et de recombinaisons.
Se fondant sur les conclusions d’une étude pionnière, publiée en 2001, à partir d’un seul patient, les auteurs proposent un scénario lorsque la pathologie demeure stable avec le temps : la bactérie s’adapte bien à son lieu de résidence ; les variations rencontrées sont dominées par la perte ou le gain de gènes variables ; de nouvelles souches ne peuvent prendre pied sur la muqueuse déjà colonisée.
En revanche, lorsque le milieu se modifie, une sélection dirigée devrait survenir, allant dans le sens de l’accumulation de mutations et de gènes destinés à favoriser l’adaptation. Ainsi, écrivent les auteurs, la recherche de cette sélection adaptative et de la perte de diversité des souches bactériennes fournirait un moyen d’identifier des marqueurs biologiques prédictifs de la gastrite atrophique chronique. Ces marqueurs, tels que des mutations d’un seul nucléotide ou de gènes entiers, seraient d’un grand intérêt pour le diagnostic clinique et pour la compréhension des interactions moléculaires entre H.pylori et son hôte.
Dans un travail antérieur, les chercheurs avaient utilisé un modèle de souris transgénique atteinte de gastrite chronique atrophique. Ils avaient montré, tout d’abord, que la perte des cellules pariétales productrices d’acide stimule la prolifération de cellules souches épithéliales gastriques ; ensuite, que des isolats d’ H.pylori responsables de gastrite atrophique (HpGA1) issus d’un patient peuvent coloniser ces cellules progénitrices.
Des sondes visant 99,6 % des gènes bactériens.
L’article publié dans les « Proceedings » de l’Académie des sciences américaine fournit la séquence complète du génome de la souche HpGA1. Pour y parvenir, l’équipe a eu recours à des puces à ADN (Affymetrix HpGA1). Elles contenaient des sondes visant 99,6 % des gènes bactériens, afin d’identifier ceux régulés par l’acide gastrique à pH5 et 7, au cours de la croissance bactérienne. Ces mêmes puces à ADN ont permis d’établir le typage génétique de 5 autres souches d’ H.pylori responsables de gastrite atrophique et prélevées au cours d’une étude sur le cancer gastrique, en Suède. Enfin, des isolats obtenus chez un autre patient ont bénéficié de la même analyse. Dans ce cas, l’intérêt a été la possibilité d’un nouveau typage génétique quatre ans plus tard, alors qu’un adénocarcinome s’était déclaré.
Les données recueillies chez ces patients, et autant de souches d’ H.pylori, ont permis tout à la fois de valider les sondes utilisées et de fournir une vue d’ensemble du génome en relation avec l’adaptation de la bactérie à la gastrite atrophique chronique et à ses conséquences.
« Proceedings of the National Academy of Sciences », édition avancée en ligne.
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