C'EST UN NOUVEL ÉPISODE particulièrement déplaisant du feuilleton des relations entre l'assurance-maladie et les médecins libéraux. Depuis de longues semaines, des centaines de praticiens s'inquiètent de n'avoir pas reçu leur relevé annuel d'activité détaillée issu du Système national interrégimes(Snir), document qui récapitule les montants d'honoraires à reporter sur les fameuses déclarations de revenus 2035 (en matière de bénéfices non commerciaux). Un relevé utilisé en particulier par les médecins libéraux de secteur I qui ne sont pas adhérents à une association de gestion agréée (AGA) et soumis à la déclaration contrôlée, les autres praticiens devant tenir une comptabilité régulière.
Cette année, la date de renvoi de cette déclaration 2035 a été fixée au plus tard au 2 mai, soit dans une semaine, exactement (contrairement à la déclaration 2042 qui porte sur l'ensemble des revenus et qui peut être adressée jusqu'au 31 mai). Mais, en début de semaine encore, les médecins concernés ne disposaient toujours pas de leur relevé d'activité qu'ils reçoivent d'habitude en février ou en mars afin de pouvoir se retourner.
Ainsi plongés dans le flou, le plus souvent sans aucune réponse de leur caisse primaire, de très nombreux médecins ont alerté leur syndicat, la Cnam, les services fiscaux ou tout autre organisme. « Le Quotidien » a reçu plusieurs appels ou courriers de médecins désabusés, inquiets ou en colère. «C'est insupportable,s'emporte ce médecin généraliste installé aux Lilas (Seine-Saint-Denis). La caisse de Bobigny m'a adressé une fin de non-recevoir, les syndicats ne nous informent pas. C'est du mépris total.» Cet autre praticien a entendu parler d'un «bug informatique général à la Cnam». Guère plus rassurant. Un troisième, à Toulouse, se demande s'il y aura un «report de la déclaration 2035» du fait de l'incurie de l'assurance-maladie. «La sous-directrice de la Cpam de Toulouse m'a répondu qu'elle ne pouvait rien faire et que cela partait de Paris à la fin avril.»
En début de semaine, la Csmf a sonné le tocsin en écrivant directement au directeur général de l'assurance-maladie, Frédéric Van Roekeghem. «A 10jours de la date limite d'envoi de ces déclarations, et à notre connaissance, aucun des médecins concernés n'a reçu de sa Cpam ce document», déplore le président Michel Chassang. Il réclame l'envoi des relevés Snir aux médecins concernés «dans les plus brefs délais afin qu'ils ne soient pas sanctionnés par l'administration fiscale ».
Le Dr Roger Rua, secrétaire général du SML, redoute lui aussi des «contestations et des pénalités», et fustige l'absence d'explications des caisses. «Un grand nombre de médecins généralistes de secteurI ne sont pas en AGA pour des raisons de simplicité, rappelle le Dr Alain Liwerant (MG-France) . Pour eux, ce qui se passe est très ennuyeux.»
La Cnam évasive.
Du côté de la Caisse nationale d'assurance-maladie (Cnam), on affirme que le «problème» vient d'être réglé. «A la fin de la semaine dernière, un courrier est parti accompagné d'une version simplifiée du relevé d'honoraires pour les professionnels de santé au titre de l'année2006, promet-on. Tous les médecins sont en train de le recevoir et cela leur permettra de remplir dans les temps leur déclaration.» In extremis, donc,à en croire la Cnam, et sous réserve que ces précieux documents arrivent rapidement dans toutes les boîtes aux lettres. Ce qui n'est jamais garanti, sans compter les circonstances particulières (congés) qui compliquent la donne. Quant au document exhaustif interrégimes sur le relevé d'activité détaillée (actes codifiés, majorations, dépassements…), les médecins devraient le recevoir à la fin du mois de mai seulement. «Nous avons eu un problème de transmission tardive des éléments d'activité de la part d'un régime»,explique-t-on du côté de la caisse, sans donner plus de précisions.
Cette affaire, et la relative opacité du discours de l'assurance-maladie, illustre la nécessité de normaliser les rapports entre les médecins libéraux et la Sécu que chaque accroc risque de fragiliser. Aujourd'hui même, la Csmf présentera publiquement un nouveau «contrat de bonnes pratiques conventionnelles». Son objectif tombe à pic : dépassionner les relations entre les partenaires et rendre plus efficace le fonctionnement de la convention. Pas sûr, toutefois, que ce contrat pourra éviter tous les bugs…
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