Synthétisé par les poumons dans l'objectif de favoriser la régulation du flux pulmonaire, le monoxyde d'azote (NO) voit ses concentrations sériques diminuer chez les sujets nés au niveau de la mer et exposés à une atmosphère hypoxique. Une équipe de chercheurs américains a cherché à préciser le taux de monoxyde d'azote expiré dans deux populations nées et vivant en haute altitude : des Tibétains issus d'un village situé à 4 200 mètres d'altitude et des Boliviens vivant à 3 900 mètres. Ils ont comparé les résultats obtenus à ceux d'une population nord-américaine vivant à basse altitude.
« La concentration en monoxyde d'azote de l'air expiré, chez les non-fumeurs en bonne santé du Tibet, est de 18,6 ppb, soit près du double de la valeur de référence des sujets vivant à basse altitude (7,4 ppb) », expliquent les auteurs. Chez les sujets habitant en Bolivie, cette valeur était de 9,5 ppb, soit une hausse de 25 % par rapport à la valeur de base. La correction de l'hypoxie par ventilation au masque, sous 42 à 50 % d'oxygène, a induit une majoration de 2,5 ppb du NO expiré chez les Tibétains, mais n'a pas entraîné de changements chez les Boliviens, suggérant que les mécanismes sous-tendant les hauts niveaux de NO sanguin dans ces deux populations sont différents.
Une majoration de la production
La mesure du NO expiré est le reflet quantitatif de la dynamique (production/consommation) de NO au niveau des poumons. Chez les sujets nés et vivant en haute altitude, il semble que les valeurs de NO ne soient pas liées à une baisse de la consommation, en raison de l'existence de piégeurs de radicaux libres à action rapide situés au niveau de l'hémoglobine - d'autant plus que l'hématocrite de ces sujets est généralement élevé. Une mesure prenant en compte les valeurs individuelles d'hématocrite a montré que les concentrations sériques de NO ne sont corrélées ni à cette valeur ni à la saturation de repos en oxygène. « Pour ces raisons, nous pensons que seule une majoration de la synthèse de NO peut expliquer nos résultats », précisent les auteurs. Le NO est synthétisé par des enzymes, les NO synthétases, et leur production dépend de la présence de molécules d'oxygène. Chez les sujets nés au niveau de la mer, l'hypoxie s'accompagne d'une baisse des concentrations en NO. En revanche, chez ceux nés en altitude, des modifications enzymatiques pourraient expliquer les valeurs en monoxyde d'azote retrouvées. Afin de mieux comprendre l'effet sur les poumons de la majoration du taux de NO, les investigateurs ont procédé à des expérimentations sur des volontaires au niveau de la mer, chez qui le taux de NO a été artificiellement majoré. « En conditions de ventilation hypoxique, nous avons noté une amélioration des capacités de fixation d'oxygène chez les sujets dont le taux de NO est compris entre 1,3 et 31,6 ppb », expliquent les auteurs. En outre, chez les sujets à taux de NO majoré, les concentrations en oxygène en fin d'inhalation sont passées de 8,5 à 7,5 %, alors que celles de CO2 sont demeurées inchangées.
Pour le Dr Cynthia Beall (Cleveland), « les valeurs de NO retrouvées chez les sujets vivant en haute altitude contribuent à une meilleure dilatation des veines pulmonaires, à une majoration du flux sanguin pulmonaire, à une majoration de l'oxygénation au niveau de l'hémoglobine et pourraient contribuer à une meilleure délivrance de l'oxygène aux tissus périphériques, en particulier au niveau du système nerveux central lors d'un effort physique ou au niveau utéro-placentaire chez les femmes enceintes ».
« Nature », vol. 414, pp. 411-412, 22 novembre 2001.
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