Arraché au terme d'une négociation marathon, le protocole d'accord entre les trois caisses nationales d'assurance-maladie et MG-France, qui se traduit par 307 millions d'euros d'honoraires supplémentaires pour les généralistes en année pleine, est vivement dénoncé par la majorité de la profession et par la droite.
Pourtant, l'encre de la signature était à peine sèche qu'Elisabeth Guigou prenait soin de souligner publiquement l'ampleur d'un protocole qui, a-t-elle estimé, prévoit « une augmentation très substantielle » des honoraires et, au-delà, la « revalorisation du métier de généraliste ».
Aumône
En position de force après le succès de la « Journée sans toubib » du 23 janvier, l'Union des omnipraticiens français (UNOF), qui boycottait les négociations, a rejeté un accord « minoritaire et inacceptable » qui « se contente d'essayer de colmater quelques brèches dans la précipitation ». Son président, le Dr Michel Chassang, appelle les généralistes à « amplifier » la grève des gardes de nuit et de week-end, et à se mobiliser pour la manifestation nationale prévue en mars à Paris.
Pour la CSMF, l'accord équivaut à une « aumône sur la consultation ». Le Dr Dino Cabrera, président du Syndicat des médecins libéraux (SML), a également dénoncé ce texte et appelé à la poursuite du mouvement. Même le Syndicat des médecins indépendants de France (SMIF), qui a participé en tant qu'observateur à toute la négociation, relativisait la portée de l'accord. « Il a manqué notamment que le C à 20 euros soit acté à une date précise », a déclaré le Dr Abraham Sabbah, secrétaire général du SMIF. Au-delà de ces déclarations prévisibles, les termes de l'accord ont aiguisé les dissensions au sein de MG-France. Le Dr Philippe Sopéna, ancien vice-président, qui anime l'opposition interne, a qualifié l'accord de « gravement insuffisant » et indiqué qu'il « ne mettra pas fin au mouvement des généralistes ». Il estime que le bureau de MG-France n'est pas mandaté pour signer un tel protocole et exige la convocation d'une AG extraordinaire. « Il faut savoir finir une grève mais il faut aussi savoir ne pas la brader », résume le Dr Sopéna. Malgré ces voix discordantes, MG-France a levé son mot de grève des gardes et son boycott de la télétransmission. Son président, le Dr Pierre Costes, s'explique en page 4 sur la portée de cet accord.
Elisabeth Guigou en première ligne
Parfaitement conscient de la fragilité d'un tel accord, le gouvernement a décidé d'assurer immédiatement le service après-vente.
Alors que la CSMF et l'UNOF réclamaient depuis des semaines l'intervention du ministère, et même de Lionel Jospin, Elisabeth Guigou et Bernard Kouchner reçoivent ce matin les deux syndicats représentatifs des généralistes, officiellement pour « poursuivre les travaux » sur l'amélioration des conditions d'exercice. Le Dr Michel Chassang (UNOF) a décidé de répondre favorablement à cette invitation. « Je n'y vais pas pour cautionner un texte que refuse la majorité des généralistes mais au contraire pour dire tout le mal qu'il faut penser de cet accord », a-t-il déclaré au « Quotidien ». « Je proposerai un deal à la ministre, ajoute le Dr Chassang. Elle accepte de revaloriser le C à 20 euros et le V à 30 euros et nous nous engageons à lancer immédiatement le chantier de la démographie, la sécurité, la garde, la nomenclature et l'entreprise médicale pour aboutir avant le 30 juin à un nouveau système. »
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