De notre correspondante
En juillet 2001, la nouvelle loi sur l'IVG modifiait plusieurs dispositions de la loi Veil. Elle autorisait notamment le recul du délai de dix à douze semaines pour l'intervention, et la possibilité de prendre en charge des mineures sans l'autorisation de leurs parents.
Qu'en est-il deux ans après ? Et comment se pratique aujourd'hui l'avortement, dans les centres IVG ? C'est à ces questions qu'essayaient de répondre les 15es Journées nationales d'étude sur l'avortement et la contraception organisées durant deux jours à Lille* avec la participation de 500 médecins et professionnels de santé.
Délais de prise en charge trop long, accueil très variable d'un centre à l'autre, et absence de possibilité de choix de la méthode utilisée... Beaucoup d'insuffisances ont été pointées par les participants. Entre l'esprit des textes et la réalité de terrain, le fossé est encore important. A tel point qu'un groupe d'appui a été créé par le ministère de la Santé pour garantir que les moyens et la manière de prendre en charge les femmes sont préservés. Après dix-huit mois de réflexion, ce groupe pluridisciplinaire vient de rendre ses recommandations.
Premier constat : l'accès à l'IVG reste difficile et précaire. Les délais d'accès sont beaucoup trop longs (trois à quatre semaines en Ile-de-France et PACA !) et la continuité des soins durant les vacances pas toujours assurée. Il faut aussi donner le choix aux femmes de la méthode (pour le moment, elle est le plus souvent dictée par les choix thérapeutiques de l'équipe soignante).
L'information des femmes reste insuffisante, aussi bien sur la contraception que sur l'IVG. Un gros effort doit être fait dans ce sens.
La prise en charge des mineures
Le groupe conseille également une prise en charge attentive des mineures. Craignant d'être impliqués juridiquement en cas de complications, certains anesthésistes sont encore réticents. Le rôle de l'adulte accompagnant - en cas d'absence des parents - n'est pas assez précis.
Pour les mineures, la contraception d'urgence a eu un succès considérable : entre le 1er janvier et le 1er août 2002, 45 000 boîtes ont été facturées, dont 25 000 à des mineures. Aujourd'hui, le nombre de boîtes délivrées chaque année est proche des 90 000. Reste à voir si le nombre d'avortements diminuera dans les mêmes proportions.
Quant à l'IVG médicamenteuse en ville, elle n'est pas encore opérationnelle : « Deux ans après, la loi n'a toujours pas été capable de la mettre en place, déplore Emmanuelle Jeandet-Mengual, inspectrice générale de l'Action sociale et présidente du groupe d'appui. Le développement de cette pratique permettrait pourtant de diminuer les délais de prise en charge dans les centres d'IVG. Mais les textes ne sont pas appliqués, faute d'un accord sur le médicament utilisé.»
Autre point soulevé, le risque de désengagement des cliniques privées : « Le forfait IVG n'ayant pas été réactualisé depuis 1991, le risque est grand de voir les cliniques renoncer à cette activité. Or elles assurent actuellement 30 % des IVG en France. »
Enfin, dernière proposition qui nécessite une modification de la loi : donner aux sages-femmes la possibilité de pratiquer les IVG. « Ce sont elles qui prennent en charge les femmes pendant les IVG médicamenteuses, constate E. Jeandet-Mengual. Si l'on veut anticiper la baisse du nombre de médecins, il est nécessaire d'impliquer les sages-femmes dans la pratique des IVG. »
* Journées organisées par l'ANCIC (Association nationale des centres d'interruption de grossesse et de contraception) et par l'équipe du service d'orthogénie du centre hospitalier de Roubaix.
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