L'Académie nationale de médecine a adopté une position favorable au développement des recherches utilisant la récente technique d'édition du génome, CRISPR-Cas9 "permettant la modification ciblée du génome, y compris" sur les cellules germinales et l'embryon humain". Tout en recommandant fermement "le maintien de la législation actuelle interdisant toute intervention sur la structure de l’ADN ayant pour conséquence de modifier le génome de la descendance et les cellules reproductrices".
Simple d'usage et peu onéreux, le sytème CRISPR-Cas9 (« clustered regularly interspaced short palindromic repeats ») repose sur l’association d’une séquence d’ARN guide et d’une endonucléase (Cas9) ) qui permet de cibler très précisément n’importe quelle séquence du génome, de couper les deux brins d’ADN afin de supprimer ou de remplacer le fragment de la molécule visé ou d’insérer une nouvelle séquence d’ADN.
La technique d'édition de génome CRISPR-Cas9 a été développée à partir de 2012 par plusieurs chercheurs, dont notamment Emmanuelle Charpentier, jeune française professeur de microbiologie et de biochimie formée à l'université Pierre et Marie Curie et aujourd'hui membre scientifique et directrice de l'Institut Max-Planck d'infectiologie à Berlin.
La loi française proscrit depuis 1994 toute modification du génome de la descendance. Mais "le développement de méthodes comme CRISPR-Cas9 conduit à s'interroger sur leur utilisation potentielle sur les cellules germinales et l'embryon humain", souligne le rapport adopté par l'Académie, rédigé sous la plume du Pr Pierre Jouannet, professeur émérite à l'Université Paris-Descartes.
"La seule indication médicale acceptable serait d'éviter la transmission d'une pathologie génique à l'enfant mais les conditions, notamment celles relatives à l'efficacité et à l'innocuité de ces méthodes, ne sont actuellement pas réunies pour envisager leur utilisation clinique", souligne le rapport, fruit des réflexions d'un groupe de travail.
De ce fait et "indépendamment de toute autre considération d'ordre éthique, il paraît aujourd'hui inconcevable que les techniques de modification du génome soient utilisées sur l'embryon ou les cellules germinales avec comme perspective de faire naître un enfant", indique le rapport. "En revanche, les recherches sur l'embryon humain et les cellules germinales devraient être possibles quand elles sont médicalement et scientifiquement justifiées", déclare à l'AFP Pierre Jouannet. "Il faut les soutenir", ajoute-t-il.
L'Académie recommande "d'adapter les textes nécessaires au développement" de ces recherches en France et en Europe.
Au sein de l'Académie, le débat a été "riche", dit-il. Le rapport a été adopté le 12 avril par 50 voix pour, 20 contre et 14 abstentions. L'Académie l'a rendu public à l'occasion d'un atelier de réflexion sur l'édition du génome organisé jeudi dans ses locaux par la Fédération des académies européennes de médecine (FEAM).
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